Eglise catholique au Togo : blog d'un prêtre de Lomé !

Comment être sûr de ma vocation?

Appel intérieur et appel extérieur

 

Introduction


Comment savoir avec certitude que je suis appelé par Dieu pour telle forme de vie précisément ? C’est une question que bien de personnes se sont posées, se posent et se poseront dans leur cheminement vocationnel.


Quand vous allez à la banque pour faire un prêt, on exige que vous donnez des garanties de paiement ; pour obtenir un visa de voyage, vous devez présenter une caution d’une certaine somme d’argent ; quand vous faites votre dossier pour rentrer au séminaire, il vous faudra y ajouter un certificat médical attestant que vous êtes en parfaite santé ; quand vous vous présentez pour un service dans l’administration, vous devez prouver votre identité en montrant votre carte ; quand vous avez une voiture, l’obligation vous incombe de souscrire à une assurance pour les éventuels accidents ; etc. Ce tableau atteste assez explicitement que parmi les caractéristiques prégnantes du monde d’aujourd’hui et donc des hommes de ce temps, la sécurité, la précision, l’assurance, le risque zéro, tiennent une place importante.


Cette soif de garantie, d’assurance se traduit en religion par le désir d’entendre clairement l’appel de Dieu, le désir que Dieu nous donne des signes clairs, précis et matériels de son appel. Nous sommes souvent séduits par les récits bibliques de vocation : Samuel qui écoute la voix de Dieu (1Sam 3) ; Jérémie à qui la parole de Yahvé fut adressée (Jér 1) ; Ezéchiel qui vit la gloire de Dieu (Ez 1.2), et tous les autres prophètes ; de même les  Evangiles nous présentent Jésus qui appelle de vive voix ses disciples : « viens, suis-moi, je ferrai de toi un pêcheur d’hommes ». Pourquoi alors l’appel de Dieu ne se fait plus si clair ? Le Dieu qui appelle aujourd’hui est-il le même que celui qui appela les prophètes ? Des questions qui indiquent combien nous sommes malaisés dans notre cheminement vocationnel car incertains et en proie au doute : est-ce vraiment mon chemin ? Ne suis-je pas en train de me tromper de vocation ?


Toutes ces interrogations sont légitimes dans une certaine mesure et elles posent comme indispensable le lien naturel entre vocation et discernement. Pour discerner et bien discerner, il faut d’abord avoir une idée claire de l’appel ou vocation. Aussi allons-nous tenter, sans prétention, de cerner les contours de cette réalité qu’est l’appel de Dieu en deux mouvements : l’appel intérieur, l’appel extérieur.

 

1.      L’appel intérieur


Ø  Distinguer l’étincelle initiale de la vocation authentique


L’appel de Dieu ne nous est pas adressé durant la nuit au cours de visions mystérieuses ; il ne nous est pas non plus murmuré à l’oreille. Comme dans beaucoup d’autres domaines de la foi comme de la vie, Dieu œuvre par l’intermédiaire de causes secondes.


Son appel est suscité en nous par l’exemple d’autres personnes, par la lecture d’un livre ou par l’interpellation d’un professeur ou d’un ami proche : “N’as-tu jamais pensé à te faire prêtre, religieuse, religieux ?” Un événement fortuit peut être l’étincelle qui met le feu à notre imagination.

Il est important maintenant de ne pas confondre ces étincelles initiales avec un authentique appel de Dieu. Un certain nombre de personnes sont attirées initialement par la vie consacrée[1] à cause de détails tout à fait quelconques : les vêtements sacerdotaux que le prêtre porte à la messe, la barbe du frère qui travaille au centre, la médaille multicolore que porte une bonne sœur, l’érudition des prêtres etc. Ce sont là évidemment de très mauvaises raisons pour devenir prêtre ou pour se destiner à la vie religieuse et qui, plus tard, peuvent mettre dans une situation difficile une personne qui cherche réellement à vérifier l’authenticité de sa vocation.


Mais Dieu emprunte des voies mystérieuses. Ayant été mis en route vers la vie consacrée par quelque raison folle, nous pourrions bien finir à être poussés à continuer grâce à de bonnes raisons. Songeons à la Samaritaine qui “rencontre Jésus” par hasard et lui parle au bord du puits puis qui devient la première apôtre de son village.


Ø  De l’impression à la conviction


Il y a une évolution qui nous fait passer de l’idée et de l’impression d’être appelé à la conviction que nous plairions à Dieu en acceptant la voie de la vie consacrée. C’est une lutte qui doit se mener dans la prière et qui nous conduit à être prêts à prendre finalement une décision.


Il peut arriver que nous nous rendions compte à certains moments que quelque chose en nous-mêmes (dans notre cœur pour ainsi dire) nous attire vers Dieu et nous pousse à avoir des relations avec lui, même en dépit de nous-mêmes.


Ressentez-vous le désir de vivre comme un prêtre, une religieuse ? Avez-vous envie de le devenir ? Vous sentez-vous attiré(e) par ce genre de vie ? Éprouvez-vous un certain plaisir à penser à la vie religieuse, ressentez-vous à son encontre de l’enthousiasme ou de la joie ou encore un sentiment positif en dépit de vos craintes naturelles ou instinctives ?

En arrivez-vous à un stade où vous sentez, dans la prière et la méditation, que Dieu vous lance une invitation personnelle, que Dieu vous demande de vous engager, qu’il vous demande de choisir ?

Ces choses sont évidemment difficiles à décrire avec des mots mais celui (ou celle) qui les a vécues saura les reconnaître.

  • La vraie motivation : “pour le service

Le seul motif suffisant pour opter pour la vie consacrée ou le sacerdoce est le désir de servir les autres. Un prêtre est ordonné pour les autres, pas pour lui. Notre bonheur de nous consacrés à Dieu se mesure au bonheur que nous donnons aux autres.


“Être prêtre n’est pas embrasser une carrière dans le sens habituel du terme. Il ne s’agit pas de conquérir du prestige, d’obtenir un statut et d’acquérir certains avantages. Il s’agit d’aimer Dieu et son peuple et de découvrir la meilleure manière de répondre à l’amour de Dieu en servant les autres” (P. Etzel).


Pendant le cheminement vers le presbytérat, le candidat doit faire une demande à chaque étape : pour rentrer au séminaire, rite d’admission, prise de soutane, collation du ministère de lectorat puis acolytat, ordination diaconale et enfin ordination presbytérale. Dans chacune de ces demandes, il doit clairement mentionner qu’il veut devenir prêtre pour servir sinon la demande n’est pas valable.

 

2.      L’appel extérieur


L’appel extérieur est un ensemble de prédispositions, d’intérêts, de compétences, d’aptitudes vérifiables aussi bien par l’aspirant que par les autres.


Ø  L'aptitude à la vie consacrée


Avoir les aptitudes nécessaires, pour l’aspirant au sacerdoce par exemple, c’est avoir les dons et les charismes requis pour exercer un ministère presbytéral. En termes concrets, cela signifie être capable de venir à bout d’études théologiques ainsi que de savoir encourager et guider les autres. Le sacerdoce amène à s’occuper des autres et le prêtre sera utile dans la mesure où, par tempérament et grâce à des aptitudes acquises, il est “bon avec les gens”.


Ainsi toute personne qui se sent appelée à une forme de vie consacrée doit s’évaluer, se demander si elle a les aptitudes nécessaires pour épouser cette forme de vie avant de s’y engager. Ce discernement des aptitudes se fait avant de commencer la formation et il se poursuit pendant la formation sous le regard avisé des formateurs.


A titre indicatif, l’évaluation doit toucher les domaines suivants : santé, aptitude intellectuelle, maturité affective, vie en communauté, sens du détachement…

 

Ø  La confirmation par d'autres  


Il n’est pas toujours aisé de juger ses propres capacités et motivations. Mais nous ne sommes pas seuls. Beaucoup de personnes nous connaissent : amis, relations, membres de nos communautés paroissiales, compagnons d’études, formateurs ... Ils nous aident à juger de l’authenticité de l’appel que nous entendons. Si beaucoup d’entre eux découvrent en nous un prêtre ou une religieuse en puissance, c’est une confirmation importante venant du sein même de l’Église.


Ici, un conseiller spirituel peut se révéler utile. Un directeur spirituel est quelqu’un en qui vous avez confiance et qui peut rester objectif vis-à-vis de vous. Il ne prendra pas de décision à votre place. Il vous aidera à réfléchir sur ce que vous envisagez de faire et sur la manière dont Dieu dirige votre évolution. Un tel conseiller spirituel vous accompagnera sur la route du discernement.

 

Quand, lors de l’ordination, un candidat est présenté à l’évêque, celui-ci s’enquiert si la communauté estime qu’il a les qualités nécessaires. La réponse est habituellement donnée par le Recteur du Séminaire où le candidat a suivi sa formation ou le vicaire général, mais il répond en tant que représentant de tout le peuple : « Les personnes qui le connaissent ont été entendues et ceux à qui il revient d’en juger ont donné leur avis favorable, aussi j’atteste qu’il est digne d’être ordonné ». Les fidèles savent qui fera un bon prêtre et qui n’en fera pas un.


La confirmation par d’autres que vous avez la vocation constitue pour vous un signe précieux indiquant que vous l’avez effectivement.

 

Conclusion


L’homme est un être en perpétuelle quête de bonheur, de mieux être. Aussi est-il sûr et certain que nul ne peut accepter et se mettre à répondre à un appel de Dieu – qui suppose intrinsèquement des renoncements – si la forme de vie qu’il devra désormais épouser ne lui paraît comme une possibilité de se réaliser, un lieu où il pourra construire son bonheur. Personnellement, je dirai que la première assurance ou preuve de vocation est d’avoir la certitude que je serai heureux en devenant prêtre, religieux ou religieuse. Mais il faudrait d’abord que j’évalue mon bonheur : que signifie être heureux pour moi ? Est-ce mériter l’estime de ma famille et susciter ses compliments ? Avoir de l’argent ? Obtenir un statut au sein de ma communauté et être l’objet du respect qui en découle ? Ou simplement servir mes frères et sœurs ?

 

 

PRIÈRE POUR CONNAITRE  SA VOCATION
         (Par saint Alphonse de Liguori)

 

Mon Dieu, je suis ce misérable

qui par le passé vous ai méprisé;

mais maintenant je vous estime

et je vous aime par dessus toutes choses,

et je ne veux aimer autre chose que vous.

Vous me voulez tout pour vous,

et je veux être tout à vous.

"Parlez, Seigneur,

votre serviteur écoute." (1 Rois, III, 10.)

Faites-moi connaître ce que

vous attendez de moi;

je suis résolu à l’exécuter ponctuellement.

Je vous prie spécialement

de me faire connaître dans quel état

il vous plaît que je vous serve.

Amen

 

 

Romain Séménou, Diacre



[1] Sous l’expression « vie consacrée », prière entendre aussi bien la prêtrise, la vie religieuse et toute forme de vie consacrée.



03/12/2011
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