Eglise catholique au Togo : blog d'un prêtre de Lomé !

Quelle culture pour l’Afrique de ce siècle?

    Article   II.   Quelle culture pour l’Afrique de ce siècle?

  1. 1.      Culture : constance et mouvement

La culture s’apparente au modèle humain[1] : un corps corruptible et une âme immortelle. En effet chaque culture comporte d’une part un socle inamovible et incorruptible qui demeure tant que le peuple porteur de la culture existe, c’est l’âme de la culture ; et d’autre part un ensemble  d’existants[2] culturels susceptibles de changements et de corruption. Ainsi aucune culture ne peut mourir. «  L’histoire des peuples nous instruit que les racines culturelles d’un groupe humain ne se détruisent jamais, même sous la domination étrangère d’un pouvoir quel qu’il soit »[3]. Le drame culturel actuel propre à l’Afrique noire se joue au niveau des existants culturels, dont la valorisation et la transmission sont tombées en panne sèche. Le socle culturel africain demeure ; sur le sol rouge du sang de nos aïeux, il a vaincu le colonialisme et eu raison sur des terres lointaines de l’esclavagisme. Mais que devient-il aujourd’hui après tant de peines et de luttes? Qu’en faisons-nous, une gloire ou un opprobre ?

  1. 2.      Une culture en construction

L’africain de ce temps est une personne ayant une culture en construction, en recherche de stabilité. Et il est clair qu’une nouvelle culture se construit, une culture à laquelle bien d’attributs peuvent être associés  selon les facteurs pris en compte. Ainsi on parlera de culture entre tradition et modernité, de culture technologique, de culture de mode, de culture ouverte, de culture …

  1. 3.      Vers une culture internationale

De même, l’urbanisation grandissante, la politique de centralisation et la mobilité des personnes facilitée par le développement des infrastructures de transport favorisent et provoquent l’émergence de sociétés africaines de plus en plus métissées, mélangées. En effet les villes africaines, les grandes comme les petites sont cosmopolites à une échelle aussi bien nationale que continentale. Il est donc évident que l’africain d’aujourd’hui n’est plus l’homme d’une ethnie, d’une culture bien limitée et bornée dans une sphère territoriale. L’africain,  comme d’ailleurs tout être humain de ce vingt et unième siècle marquée par la mondialisation, est bon gré mal gré pris dans l’engrenage du brassage culturel. Un vœu implicite serait donc hébergé par le mouvement de mondialisation : inventer une culture internationale ou une culture interculturelle à l’instar de la langue espéranto de Zamenhof (1887).

  1. 4.      Un continent de l’avenir

La pyramide des âges du continent africain est très large à la base, et dans la plupart des pays d’Afrique, près de la moitié de la population est âgée de 15 ans et moins[4]. L’Afrique, du fait de la jeunesse de sa population est un continent de l’avenir qu’elle doit planifier et construire. Ce facteur – une population très jeune – est primordial dans la gestion de la question de culture. En effet, tous les efforts de redéfinition de la culture sont en vue de planifier l’avenir, de prévoir et de prévenir les situations éventuelles pouvant se présenter dans un futur proche ou lointain. Aussi devons-nous incessamment et essentiellement partir des paradigmes culturels propres à la portion majoritaire de la population et ayant la plus grande espérance de vie : la jeunesse.

  1. 5.      Qui es-tu africain de ce temps ?

L’homme tel quel, l’africain tel qu’il est aujourd’hui et qui intéresse la perspective d’inculturation que nous envisageons est un homme doté d’une culture en construction, ouverte aux autres cultures et fascinée par l’Occident – sa culture, son organisation socio-politique, sa technologie, … L’inculturation doit rejoindre à tout prix l’homme africain tel qu’il est aujourd’hui, l’inculturation ne serait une réussite qu’à condition que l’africain s’y sente à l’aise et en accord avec ses priorités et vues contemporaines. Le processus d’inculturation ne peut aucunement faire fi de cette donne car le risque d’une inculturation non inculturée, d’une inculturation qui laisserait les bénéficiaires dépaysés et étrangers à ses résultats puisqu’ils ignorent les éléments culturels qui fondent la démarche d’inculturation ou ne les considérant pas comme valeurs positive est très grand.


Abbé Romain SEMENOU,

LOmé, le 11 novembre 2011



[1] Modèle simpliste pour d’aucuns et dualiste pour d’autres, ces débats ne nous préoccupent guère. Nous reprenons juste ce que dit le catéchisme aux néophytes en marche vers le baptême.

[2] Les modes concrètes de vivre la culture, par opposition aux modes abstraites et théoriques de penser la culture

[3] F. KABASELE-LUMBALA,  l’avenir de l’inculturation liturgique en Afrique, in RUCAO n° 31, 2007, p 149

[4] "Afrique." Microsoft® Études 2007 [DVD]



14/11/2011
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