Saint Paul, l'apôtre des nations
PAUL
Introduction
Paul de Tarse, surnommé l'apôtre des Gentils, est le seul parmi les apôtres à n'avoir pas connu le Christ.
La vie de Paul se divise en deux parties [à peu près égales] dont l’événement de démarcation est la conversion-vocation de Damas.
- Ø Le premier pôle, c’est Paul, le pharisien : Paul serait né vers l’an 5 de notre ère dans une famille juive et il reste Juif jusqu’au chemin de Damas vers l’an 35/36.
- Ø Le second pôle, c’est Paul, le chrétien : de l’avènement de Damas à son martyre à Rome en 67, Paul est un des plus illustres amoureux du Christ.
Aussi notre exposé est-il bâti en trois points : Paul, le Pharisien ou Paul de la Loi ; L’entre deux : sur le chemin de Damas ; Paul, le chrétien ou Paul du Christ.
1. Paul, le Pharisien ou Paul de la Loi
- Aperçu historique
Paul est né à Tarse, en Asie Mineure. Il appartient au monde juif par sa famille et sa foi, et au monde hellénistique par son lieu de naissance et toute une part de sa culture. Juif de diaspora, Paul est ainsi au carrefour de deux civilisations. Il parle couramment le grec, comme il sait aussi l’hébreu (langue de la Bible) et l’araméen (la langue de Jésus). Il était un citoyen romain. Tarse, la ville natale de Paul est réputée au plan universitaire ; Paul y a donc connu la philosophie, la rhétorique (l’art du discours). Le sport aussi l’intéresse.
Juif, pharisien, il étudie à Jérusalem près d’un grand maître, Gamaliel (cf. Ac.22, 3 et 5, 37). Il était de retour à Tarse pendant les années de prédication de Jésus. Il vivait en travaillant les peaux d’animaux.
Les témoignages présentent Paul comme un homme de petite taille, chauve, et doué d'une remarquable énergie.
- Paul de la Loi
Pharisien sincère, Paul n’a qu’une passion : servir Dieu en pratiquant avec minutie la Loi. Quand il revient à Jérusalem, vers 36, il est affolé de la prédication de Pierre et des autres.
Théologien juif il perçoit que les discours des apôtres risquent de bouleverser le Judaïsme ; ils mettent ce Jésus, pourtant condamné comme blasphémateur par les autorités, sur le même plan que Dieu.
Pharisien intransigeant quand il s’agit de la pureté de la foi, Paul est décidé à combattre cette nouvelle secte. Il approuve la mort d’Etienne et il part à Damas pour y pourchasser les Chrétiens qui y ont trouvé refuge.
2. L’entre deux : sur le chemin de Damas
Le chapitre 9 des actes des Apôtres relate le récit de la vocation de Paul sur la route de Damas. Paul, le persécuteur, a été subitement terrassé par une apparition du Christ, qui lui dit : « Je suis Jésus que tu persécutes ». Paul n’en revenait pas !
On a bien envie de lui demander : « Dis nous, Paul ce qui t’arrive ? » Jésus, nous expliquera Paul, avait été condamné par la Loi dont les autorités religieuses étaient les garants, il était maudit de Dieu qui n’avait rien fait pour le délivrer, comme il est écrit : Maudit (par Dieu) celui qui pend sur le bois (Dt. 21, 23 ; cf. Ga 3,13). Or Dieu a glorifié ce « maudit » en le ressuscitant ! C’est donc qu’il se déclare d’accord avec lui. Et la Loi qui l’a condamné est donc elle-même condamnée par Dieu ! La Loi n’est plus rien. Pour Paul, c’est le sens même de sa vie qui s’écroule…Et l’on comprend qu’il reste trois jours prostré, aveuglé, à Damas, à faire son bilan. Mais dans ce grand vide douloureux, Jésus s’est installé. Désormais, libéré de la douleur d’avoir lutter à perte pour la Loi, Paul se lève pour la mission du Christ.
3. Paul, le chrétien ou Paul du Christ
Après Damas, un apôtre inattendu fait irruption dans le cours de l’Eglise naissante. En effet dès sa rencontre avec le christ à Damas, Paul participe, sur invitation de Barnabé, à l’activité missionnaire dans l’Eglise d’Antioche. D’Antioche Paul se lance sur les chemins des nations. Paul se demande : « Dieu est-il seulement le Dieu des Juifs ?ou aussi des nations (païennes) ? Oui, aussi des nations ! » (Rm 3, 29).
- La prédication de Paul
De l'hiver 50 à l'été 52 (au cours de son deuxième voyage), il s'attarde dix-huit mois à Corinthe, exerçant son métier de fabricant de tentes chez un couple de juifs convertis à Jésus, Priscille et Aquila, qui avaient été chassés de Rome par un décret de Claude (49-50). Tout en travaillant en semaine, Paul enseigne la Parole : «Chaque sabbat, il prenait la parole à la synagogue et tâchait de convaincre Juifs et Grecs» (Apôtres, XVIII, 4).
En fait, sa tentative passionnée d'enseigner l'Évangile à tous sera toujours beaucoup mieux acceptée par les païens (d'où son titre d'apôtre des Gentils) que par les différentes communautés juives, pourtant mieux préparées à comprendre une doctrine assez proche de la loi mosaïque
Recueillant partout un grand succès (mais se faisant en même temps des ennemis acharnés), Paul fonde plusieurs Églises autour du Bassin méditerranéen.
Lors du Concile des apôtres qui se tient à Jérusalem vers l'an 50, il infléchit les destinées du christianisme en faisant prévaloir l'idée qu'il est possible de catéchiser les païens sans recourir aux pratiques de la loi hébraïque. Ainsi, lors de ses derniers voyages, engage-t-il les prosélytes à se soucier davantage de l'esprit que de la lettre de la nouvelle «voie»
- La captivité
La fin de la vie de saint Paul est fertile en aventures. Vers 54-57, l'apôtre s'établit pour un peu plus de deux ans à Éphèse, d'où il sera chassé par la fameuse émeute des orfèvres qui l'accusaient de faire baisser le marché des statuettes de la déesse Artémis (Apôtres, XIX, 23). De 58 à 60, Paul est immobilisé à Césarée, où il est jeté en prison (Apôtres, XXIV, 27). Lorsqu'il revient à Jérusalem, le sanhédrin le fait comparaître afin de le juger et de le condamner. Faisant prévaloir sa citoyenneté romaine (seul un tribunal romain peut le juger), il est emprisonné à Jérusalem sur ordre du tribun romain.
Au bout de deux ans (la loi romaine interdisant la détention plus de deux ans sans procès), le sanhédrin demande une nouvelle comparution de Paul, qui refuse de se présenter. Celui-ci en appelle à César : cela signifie qu'un tribunal composé de proches de l'empereur le jugera. Pour cela, il se rend par mer de Palestine à Rome (c'est au cours de ce voyage qu'il est sauvé miraculeusement d'un naufrage).
De 61 à 63, en résidence surveillée à Rome, il bénéficie d'un statut suffisamment souple pour poursuivre sa prédication. Cet épisode est évoqué à la fin du livre des Actes : «Paul vécut ainsi deux années entières à ses frais et il recevait tous ceux qui venaient le trouver, proclamant le règne de Dieu et enseignant ce qui concerne le Seigneur Jésus-Christ avec une entière assurance et sans entrave» (Apôtres, 28, 30).
Puis, il est finalement libéré. La fin de sa vie relève des textes apocryphes qui ont donné plusieurs versions : incarcéré à nouveau par les autorités impériales en 66, sous le règne de Néron, il aurait été finalement décapité (probablement en 67), à l'emplacement de l'actuelle basilique de Saint-Paul-hors-les-Murs, à Rome (pour d'autres sur la route d'Ostie) ; il aurait effectué un voyage en Espagne avant de revenir à Rome où il fut décapité.
Conclusion
Paul a la réputation d’être difficile. Certes c’est vrai quand il s’agit d’aborder sa pensée théologique. Mais Paul est tellement attachant ! Il dit tout de sa personne. Il est en effet, avec Jérémie, le personnage de la Bible que nous connaissons le mieux. Il se révèle tel qu’il est, un saint bourré de défauts : il parle tout le temps de lui ; et en même temps un être tout donné à sa mission, pour qui seul compte l’amour de son Seigneur et le service de ses communautés. Avant Damas, Paul disait : « ma vie, c’est la Loi ». Après Damas il dit : « ma vie, c’est le Christ ». Puisse Dieu nous accorder aussi de dire un jour – non lointain – par la vérité de notre vie : « ma vie, c’est le Christ », Amen !
ANNEXES
- La théologie de Paul[1]
Sur le chemin de Damas, Paul a été saisi par le Christ glorifié. Pour que cette image du Ressuscité se révèle pleinement à lui, il faudra la vie quotidienne avec les différentes communautés dont les questions forceront Paul à approfondir sa connaissance du Christ. Donnons ici quelques points forts de cette théologie.
ü L’Eglise corps du Christ. Pourquoi me persécutes-tu ? demande Jésus à celui qui persécute des chrétiens…Paul perçoit là l’union intime entre Jésus et ses disciples : ils forment un seul corps, l’Eglise. Voilà désormais le fondement de la morale de Paul : par la foi et le baptême, vous avez revêtu le Christ, vous êtes devenus son corps, vivez donc en conséquence.
ü Justifié par la foi. Pharisien, Paul croyait être justifié par sa pratique loyale de la Loi. Ici, il découvre que seul le Christ peut rendre juste. Il ne s’agir donc pas de faire son salut, mais de le recevoir, gratuitement de la main de Dieu, par la foi. Cela ne veut évidemment pas dire qu’il suffit de croire et de se conduire n’importe comment. Si l’on croit, si l’on aime, on essaie de vivre en conséquence.
ü La grâce de Dieu. Paul découvre qu’il est aimé de Dieu gratuitement, miséricordieusement. Dieu ne nous aime pas parce que nous sommes bons, mais pour que nous le devenions. Et c’est là la source de la joie et de la sécurité de Paul et du croyant qui ne s’appuient pas sur ce qu’ils sont (ce serait souvent démoralisant) mais sur l’amour de Dieu qui, lui, est fidèle.
ü Jésus-Christ crucifié. Paul cherche à comprendre : si Dieu glorifie J-C, le maudit de la Croix, c’est que cette mort entrait dans son projet. Jésus n’a pas été condamné à cause de ses péchés à lui, mais il était à cause de nos péchés et dans sa plaie se trouvait notre guérison (cf. Es 53,4-5). C’est là, aux pieds du Crucifié, que Paul se découvre pécheur, mais pécheur gracié.
- Les lettres de Paul
Les canons attribuent à Paul 13 lettres (dont 7 sont indiscutées : 1Thessaloniciens ; 1et2Corinthiens ; Galates ; Philippiens ; Philémon ; Romains) qui peuvent être réparties en 4 groupes marquant autant d’étapes de sa pensées.
ü 1 et 2 Thessaloniciens (en 51)
Paul reprend les grands thèmes de la première annonce ; il vit dans l’espérance de la venue prochaine du Christ.
ü 1 et 2 Corinthiens. Galates. Philippiens. Romains (en 56-58)
La question de la justification et du salut est au centre. On est justifié par la foi au Christ. Paul voit surtout le rôle du Christ dans son Eglise.
ü Colossiens. Ephésiens. Philémon (en 61-63)
On les appelle souvent les lettres de la captivité parce que Paul les écrit de sa prison à Rome. Paul découvre la place du Christ dans l’histoire et l’univers.
ü Tite. 1 et 2 Timothée (avant 67)
Ces lettres pastorales répondent à un souci : organiser les Eglises et garder pur le dépôt de la foi.
Romain Séménou, diacre
[1] Nous adoptons le canevas d’Etienne Charpentier, nous l’avouons, qui n’a pas manqué de nous séduire par sa clarté et sa méthode. Cependant nous nous sommes octroyé le droit d’en modifier l’ordre par souci de fidélité à notre démarche.