Eglise catholique au Togo : blog d'un prêtre de Lomé !

Dialogue interreligieux : vision catholique

DIALOGUE INTERRELIGIEUX

 

1- Introduction générale

1ère Partie

I-                       Partage d’expériences de relations  avec les personnes adeptes d’autres religions

Sur un effectif de 42 étudiants en 2éme année de théologie des sept diocèses du pays, après un partages d’expériences de relations faites avec les personnes adeptes d’autres religions, il nous a été donné de répertorier 28 confessions ou dénominations religieuses suivantes :

Catholique, R.T.A. (Religion Traditionnelle Africaine), Islam, Evangéliste, Baptiste, Presbytérien, Pentecôtiste, Assemblée de Dieu, Adventiste du 7ème jour, Christianisme Celeste, Brother Wood, Deeper life, New Age (Philadelphie), Mission chrétienne, Jésus est vivant (Yésu le agbe), Jésus est le chemin (Yésu enye mola), Témoin de Jehova, M.I.R.J. (Ministère d’Intervention Rapide de Jésus), C.M.C.I. (Commission Missionnaire Chrétienne Internationale), End Fire, EL Shadai, Foi Baha’i, Krishna, Bargas, Soka Gakai, Brahnam, Eckankar, Rose Croix.

Nous notons que pour ce qui est des types de rapports entre catholiques et adeptes des autres confessions sus citées, en général ils sont bons, toutefois il existe des tensions qui ne sont pas à négliger. 

-Rapport de nature bonne

Il est à observer un changement progressif de la part des autres confessions envers les catholiques. Ceci se remarque avec les relations de fraternité, d’amitié et de collaboration qui sont entretenues dans nos familles où se côtoient quotidiennement des membres de diverses religions. Nombre de non –catholiques et de non-chrétiens recommandent pour l’éducation de leur progénitures les écoles catholiques et par conséquent apprécient l’esprit d’ouverture catholique, acceptent le culte de la vierge Marie et des Saints, en un mot tolèrent la pratique du catholicisme. Un aspect fondamental à considérer est que le plus souvent dans nos familles se vit une forme de dialogue interreligieux typiquement à l’image des caractéristiques de ce qu’on appelle « l’œcuménisme naturel ».  C'est-à-dire que les membres bien qu’appartenant à diverses confessions religieuses sont prêts à se mettre d’accord pour la cause de la famille par l’entraide mutuelle, la vie de fraternité. Un autre aspect est que de nombreux mariages mixtes  ou avec disparité de culte se scellent entre catholiques, non-catholiques et non-chrétiens.

-Les tensions

La vraie source de tension remarquée serait issue des rapports entre catholiques et adeptes de la RTA. En effet les protagonistes ont souvent du mal à s’entendre lorsqu’il  est question de la  gestion des biens de familles (terrains, maisons…) ; cette gestion du patrimoine familial a souvent des retombés graves sur l’appartenance religieuse. Des problèmes comme ceux de la sorcellerie, la magie, les cérémonies et rites traditionnels affectent beaucoup les rapports interpersonnels. Un autre problème est celui que soulèvent la plupart des adeptes des Nouveaux Mouvements Religieux par leurs critiques à l’encontre  des catholiques.
Ils reprochent aux catholiques de les marginaliser et de les traiter de sectes. Le cas a été  relevé  surtout avec la confession religieuse  Deeper Life (vie profonde). Les témoins de Jéhovah pour leur part ont une aversion très prononcée contre les catholiques à qui ils reprochent d’être trop proche des adeptes de la RTA comme quoi cette proximité friserait le syncrétisme, ils soulèvent aussi d’autres raisons d’ordre doctrinal. L’influence parentale en matière de religion envenime parfois les rapports des membres de la même famille aussi bien que ceux interfamiliaux. Le phénomène est grave quand les parents  ne sont pas chrétiens car ils obligent très souvent  les autres membres s’ils sont catholiques au prosélytisme. Le refus de ces derniers peut effilocher les relations et il est souvent observer l’intolérance, l’indifférentisme, la culture des préjugés des uns envers les autres.

-Le phénomène du syncrétisme

Ce phénomène très récurrent semble à cheval entre les rapports bons et mauvais c'est-à-dire qu’il peut déterminer la nature des rapports en bien ou en mal dans une famille où vivent chrétiens et non-chrétiens. On remarque des catholiques dans nos familles qui par peur de représailles  ou pour raisons de manque d’enracinement dans leur foi chrétienne, faire recours à la pratique du culte ancestral. D’autres y participent par leur contribution financière ou matérielle et se voient ainsi acceptée par la famille. Cependant la pratique syncrétiste des catholiques (pratique malheureusement qui ne les honore pas) n’est pas toujours tolérée par les adeptes de la RTA. En effet ces derniers leurs réclament une conversion totale c'est-à-dire un retour intégral à la pratique de la religion de leur pères. C’est dans ce débat que surgit le problème des idolotytes que certains catholiques acceptent manger au désarroi des adeptes de la RTA.

 

2ème Partie

Introduction

Eu égard au partage des expériences de relations faites avec les personnes adeptes d’autres religions, il se dégage que notre monde est un monde pluraliste aux religions de plus en plus plurielles. L’homme essentiellement religieux de par sa nature se voit en vertu de cette nature un être social. N’est ce pas cet aspect qui expliquerait les interactions et les rapports entre adeptes de différentes confessions religieuses ? En quoi consisterait la pluralité religieuse et quelles en sont les grandes religions ? Pourquoi donc la nécessité et l’urgence aujourd’hui du dialogue interreligieux ?

Une série de questions devant faire l’objet de notre grande introduction, introduction que nous ne saurons clore sans avoir défini pour nous permettre de mieux nous situer les termes de religion, de dialogue et de dialogue interreligieux.

    1.2- La pluralité religieuse dans un monde pluraliste

Depuis des siècles, réfléchir sur les mystères de la vie était l’apanage de l’homme. Sous un nombre considérable de formes à travers l’histoire, l’expérience religieuse et même à travers l’existence profane, il découvre le sacré, qui transcende le monde et qui l’invite à poser certaines questions. Qui sommes-nous ? Où allons-nous ? Qu’est-ce le péché ? Qu’est-ce que le bien ? Quelles sont les origines du monde et de la souffrance ? Qui a créé le monde et pourquoi ? En effet, la soif du bonheur et le désir de l’Absolu est inscrit dans le cœur de l’homme. Les religions permettent à l’homme d’entrer en contact avec la source du sacré, c’est-à-dire le sacré en tant que réalité transcendante et mystérieuse, présence divine invisible qui est le réel absolu, vivant et source de vie qui répond à ses questions lancinantes mentionnées plus haut. Dans presque toutes les cultures des peuples, l’homme est toujours avide d’une spiritualité et d’une foi dans l’au-delà associée à la foi en cette vie. « Depuis l’âge de la pierre jusqu’à l’ère atomique, subissant d’étonnants changements et de multiples métamorphoses, la religion vit indissolublement unie à l’esprit humain, à la culture mondiale. Elle coule à pleins bords, désormais, la rivière de la religion. » (Alexandre MEN dans « les sources de la religion. »)

Donc, l’’aspiration au bonheur est au cœur de l’histoire de chaque peuple ou culture, comme de chaque existence personnelle jusqu’aujourd’hui.

Dès lors, le monde des religions est un terrain de rencontre pour une  redéfinition des concepts : homme, Dieu, l’univers…Raison pour laquelle nous pouvons observer une pluralité religieuse dans un monde pluraliste. Quelles sont ces religions ?

A part le christianisme qui est répandu dans le monde entier, on peut citer l’Islam qui gagne presque tous les continents ; la religion traditionnelle africaine, le Bouddhisme ; l’Hindouisme ; le Jaïnisme ; le Judaïsme et les nouveaux mouvements religieux qui sont fondés à partir des doctrines philosophiques ou théologiques.

Cependant, l’Eglise Catholique ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions. Elle considère avec un respect sincère ces manières d’agir et de vivre, ces règles et ces doctrines qu’elle-même tient et propose, apportant souvent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes .Par contre l’Eglise est en lien œcuménique avec l’Eglise orthodoxe, l’Eglise vieille catholique. Les Eglises de la communion anglicane, les Eglises réformées et luthériennes. Explicitement, l’Eglise réprouve donc, en tant que contraire à l’Esprit du Christ, toute discrimination ou vexation opérée envers des hommes en raison de leur race, de leur couleur, de leur classe ou de leur religion.

1.3- Influence et interaction entre les religions.

Nous venons de voir dans le point précédent qu’il y a une multiplicité de religions qui cohabitent dans un monde pluraliste. Cela va sans dire qu’en vertu même de cette cohabitation, aucune religion ne peut échapper à l’influence et à l’interaction avec les autres. Nous pouvons citer en exemple les rapports d’influence mutuelle que l’Islam et le Christianisme vivent.

En effet lorsque l’on considère les religions les plus connues, historiquement, on remarque parfois de profonds changements. Ces changements sont pour la plupart dus à l’influence des autres religions. Les religions s’influencent mutuellement sur leur plan doctrinal et surtout pratique.

On peut observer cette influence à deux niveaux : niveau personnel et celui des communautés religieuses. Au niveau personnel, l’homme est essentiellement religieux et avide de nouveauté. Il n’est donc pas étonnant de voir une personne changer de comportement religieux au contact d’une autre religion. Quand une personne reçoit une nouvelle religion,
il lui est difficile, voir impossible de renier complètement sa religion première.
Ceci explique malheureusement le phénomène de syncrétisme mais ce processus évoqué plus haut n’est pas seulement que négatif il comporte aussi des éléments positifs.  C’est dans ce sens que le Christianisme préconise que l’on considère les valeurs de nos traditions religieuses pour les mettre au service de la foi chrétienne.

Au niveau des communautés religieuses, on peut dire que les religions obéissent à une loi naturelle de la cohabitation. Deux religions pratiquées dans un même milieu s’influencent nécessairement. Ainsi l’interaction permet à chaque religion de  réviser sa doctrine et ses pratiques – consciemment ou non – en faveur de l’épanouissement de l’homme. En ce sens on peut remarquer que, dans la Religion Traditionnelle Africaine par exemple certaines pratiques qui avilissent l’homme commencent à s’effriter. Cette influence favorise aussi la culture de la paix, de l’unité et de la paix dans le monde. Négativement, cela peut entrainer aussi la perte de l’originalité des religions.

En définitive, nous pouvons dire que l’influence et l’interaction entre les religions sont une évidence indéniable  dont la preuve est l’évolution des traditions religieuses. Surtout dans notre monde caractérisé par la rapidité des communications, la mobilité des peuples, les religions ne se contentent pas tout simplement d’exister ou même de survivre elles évoluent et même dans certain cas, elles manifestent un réel renouveau.

1.4- Nécessité  et urgence du dialogue interreligieux.

 A l’heure où les fanatismes  risquent de tronquer les véritables visages et missions des religions, il est plus que nécessaire que les croyants cherchent à se comprendre. En effet, la méconnaissance des autres religions et le manque d’ouverture engendre entre les religions des conflits. Ainsi les religions qui au fait ont pour but de promouvoir l’unité entre les hommes créent des divisions issues de leur incompréhension sur les doctrines. Voilà pourquoi dans un monde qui prône avec raison, le mélange et  la diversité des langues, des cultures et des convictions, l’Eglise cherche à pouvoir promouvoir la rencontre de l’autre, sur le terrain plus précis de la foi, afin que toutes les religions, malgré leurs différences puissent concourir à vivre-ensemble de meilleure qualité, entre croyants, bien sûr, mais également  au profit de l’ensemble de la société.

L’Eglise reconnaît donc la part de vérité inhérente à toute grande religion : «  L’Eglise ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions »[1]. On note Aujourd’hui un changement d’attitude de l’Eglise à l’égard de l’Islam. La déclaration du concile Vatican II en est un exemple : «  d’autres parts, l’Eglise regarde plus loin au-delà des horizons du christianisme. Elle se tourne vers d’autres religions qui préservent  la signification de Dieu en tant qu’Un, vivant et subsistant, miséricordieux et tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, qui a parlé aux hommes ».[2] 

Indépendamment de la façon dont les adhérents des autres religions vivent leur foi dans leur vie quotidienne, les valeurs communément acceptées telles que l’amour, le respect, la tolérance, le pardon, la pitié, les droits de l’homme, la paix la fraternité et la liberté sont toutes exaltées par les religions. La plupart de ces valeurs gagnent la plus grande priorité dans les messages de Bouddha, de Jésus, de Zarathoustra, de la RTA….

Pour l’Eglise  catholique, il y a une fraternité fondamentale de toute l’humanité et une volonté de salut de Dieu pour toute l’humanité. Ce salut est donné dans le Christ mais le mystère du Christ ne se limite pas à l’Eglise : il est aussi présent mystérieusement dans nombre de réalités humaines et traditions religieuses.

En somme, le dialogue interreligieux fait partie intégrante de la mission évangélisatrice de l’Eglise. Dans le dialogue, il ne s’agit pas de renoncer à l’annonce, mais de répondre à un appel divin afin que l’échange et le partage conduisent à un témoignage réciproque de la propre vision religieuse, à une connaissance approfondie des conditions respectives et à une entente sur certaines valeurs fondamentales. 

1.5. La définition des termes : religion, dialogue, dialogue interreligieux

1.5.1- La religion

La religion est un système de croyances et de pratiques fondé sur la relation à un Etre Suprême, à un ou plusieurs dieux, à des choses. Ou encore ensemble des croyances et des pratiques ayant pour objet les rapports de l’homme avec la divinité ou le sacré.[3] Bien que l’homme soit un être naturellement religieux, la notion de religion de façon pratique est apparue lorsque, à la préhistoire, les hommes de Neandertal  (200000 av. C à 30000 av. J. C) ont commencé à enterrer leurs morts, témoignage de leur croyance en un au-delà après la mort.[4]

L’étymologie du terme religion reste incertaine ; elle est controversée depuis. En effet, à la suite de Lactance, de Tertullien, les auteurs chrétiens se plaisent à expliquer le latin religio par les verbes ligare, religare qui signifient respectivement lier, relier. La religion serait donc un lien de piété, elle aurait pour objet les relations qu’on entretient avec la divinité, elle profiterait même des nuances et des variations de sens que nous obtenons, en français, comme en latin, lorsque nous changeons  un rattachement  en attachement, un effectif en lien affectif.[5]

Une autre origine est plus probable, signalée par Cicéron, appuyée de son autorité. Religio se tire de legere, qui veut dire cueillir, ramasser, ou de religere qui signifie recueillir, recollecter. Toutefois ce dernier verbe, attesté seulement par un participe, est une restitution. D’après Emile Benveniste, il voudrait dire : revenir sur ce qu’on fait, ressaisir par la pensée ou la réflexion, redoubler d’attention et d’application. En conséquence, religion est synonyme de scrupule, de soin méticuleux, de ferveur inquiète. Dans ce sens, le mot convient éminemment à l’exercice du culte et à l’observance rituelle  qui exigent que la pratique soit littérale, le zèle soucieux et vigilant. Si la religion équivaut à la délicatesse de conscience, au recueillement intense, à la circonspection craintive et minutieuse, on comprend que le terme se soit fixé rapidement, presque exclusivement, sur l’expérience ou la manipulation du sacré.[6]

C’est donc ce qui explique le fait que soit la religion est une matière à discussion chez les penseurs et les philosophes du point de vue de sa définition.[7]

On note en son sein des religions traditionnelles ou polythéistes qui sont des religions à croyance en plusieurs dieux ou divinités et puis des religions monothéistes (le judaïsme, le christianisme et le bouddhisme) qui  sont la croyance en un Dieu unique.

Le but visé dans et par les religions est le salut, garantie sur cette terre et la bonne relation avec Dieu ou les divinités.

1.5.2- Le dialogue

Le mot dialogue vient du grec "Dialogos" composé de deux mots : dia qui signifie deux ; logos qui veut dire parole, voix.[8]

Alors dialogos  signifie littéralement  deux  paroles ou entretien entre des personnes.

Le  dialogue est  donc de par sa définition une communication et discussion, un échange de vues entre des personnes ou des groupes visant à trouver un accord, en vue d’une communion interpersonnelle.[9]

Selon les mots du Pape PAUL VI,  dans Ecclesiam suam, le dialogue présente quatre (4) caractères : la clarté, la douceur, la confiance  et la prudence.

La clarté dans le dialogue suppose et exige la compréhension mutuelle. Cette exigence demande de revoir toute les formes de notre langage en usant de précision et de délicatesse.  

Le dialogue doux signifie que le dialogue est pacifique et patient ; ce qui signifie  qu’il n’est pas orgueilleux, piquant ni offensant. Son autorité lui vient de la vérité qu’il expose, de la charité qu’il répand, de l’exemple qu’il propose ; il n’est pas commandement et ne procède pas de façon impérieuse. Il est généreux.

Quand le dialogue est confiant c’est-à-dire capable d’accueillir, d’accepter l’autre, il provoque les confidences et l’amitié. Il lie ainsi les esprits dans une mutuelle adhésion à un bien qui exclut toute fin égoïste.

 Quant à la prudence, il s’agit de bien tenir compte des conditions psychologiques et morale de l’auditeur selon qu’il s’agit d’un enfant, d’un homme sans culture ou hostile ; la prudence cherche à connaître la sensibilité de l’autre, à se modifier raisonnablement soi-même et à modifier sa présentation pour ne pas lui être déplaisant et incompréhensible.

1.5.3- Le dialogue interreligieux

Le concept dialogue interreligieux est composé de trois mots à savoir : dialogue, inter et religieux. Le mot inter qui est une préposition est d’origine latine et signifie entre, au sein, au milieu. Alors, la composition du mot interreligions veut dire entre les religions.[10]

Le dialogue interreligieux est donc une attitude de respect et d’amitié qui imprègne toutes les activités qui jalonnent la mission évangélisatrice de l’Eglise ; Dans un contexte de pluralisme religieux, le dialogue interreligieux signifie « l’ensemble des rapports interreligieux, positifs et constructifs, avec des personnes et des communautés de diverses croyances afin d’apprendre à se connaître et à s’enrichir les uns des autres » (DM 3), tout en obéissant à la vérité et en respectant la liberté de chacun. Il implique à la fois le témoignage et l’approfondissement des convictions religieuses respectives. Une juste  appréciation des autres traditions religieuses présuppose normalement un contact étroit avec celles-ci. Cela implique, à côté des connaissances théologiques, une expérience réelle du dialogue interreligieux avec les adeptes de ces mêmes traditions. Cependant, il est aussi vrai qu’une évaluation théologique correcte de ces traditions au moins en termes généraux, demeure un présupposé nécessaire pour le dialogue interreligieux. Ces traditions doivent être approchées avec grand respect, à cause des valeurs spirituelles et humaines qu’elles contiennent. Car elles ont porté, à travers des siècles, témoignage des efforts déployés pour trouver des réponses «  aux énigmes cachées de la condition humaine »[11] et elles ont été le lieu d’expression religieuse et des plus profondes aspirations de millions de leurs membres. Elles continuent à le faire et à l’être aujourd’hui. Dans Gaudium et Spes, le Concile Vatican II enseigne que le Christ, nouvel Adam, par le mystère de son Incarnation, de sa mort et de sa résurrection, agit en chaque personne humaine pour l’amener à un renouveau tout intérieur.
« Et cela ne vaut pas seulement pour ceux qui croient au Christ, mais bien pour tous les hommes de bonne volonté, dans les cœurs desquels, invisiblement, agit la grâce »[12] Nostra  Aetate parle de la présence dans ces traditions d’un « rayon de cette Vérité qui illumine tous les hommes. »[13] Ad Gentes du même Concile reconnaît la présence de  « semences du Verbe » et signale « les richesses que, par sa magnificence, Dieu a dispersées aux nations »[14] Lumen Gentium fait référence au bien «  semé » non seulement « dans l’esprit et le cœur des hommes » mais aussi « dans les rites et les coutumes des peuples »[15]

Partant de là, on peut donc considérer que ces éléments, en tant que préparation pour l’Evangile, ont joué et jouent toujours un rôle providentiel dans l’économie divine du salut. A reconnaître tout cela, l’Eglise se sent poussée à entrer « en dialogue et en collaboration ».[16]

Cependant, bien que le dialogue interreligieux a un vibrant éventail de richesses inouïes, il n’est pas à minimiser les obstacles auxquels il est  confronté, entre autres les niveaux d’instruction très différents une connaissance superficielle ou insuffisance  de sa propre religion et de celles des autres, les facteurs sociopolitiques, le manque d’ouverture, un fanatisme à outrance, l’enracinement insuffisant en sa propre foi, etc.

Beaucoup de ces obstacles proviennent d’un manque de compréhension de la vraie nature et du but du dialogue interreligieux. Ceux-ci doivent donc être sans cesse expliqués. Beaucoup de patience est ici requise. Par ailleurs il est à noter qu’aucun obstacle ne demeure insurmontable, il suffit d’une détermination des hommes.

Conclusion

Au terme nous retiendrons qu’il existe une pluralité de personnes, d’ethnies, de cultures en ce monde où foisonnent plusieurs religions ou confessions religieuses aux doctrines diverses. Cette caractéristique pluraliste du monde et des religions bien que par déviations humaines, elle soit souvent objet de conflits constituerait par nature une richesse pour toute l’humanité. Pour un mieux être et un vivre ensemble harmonieux tant sur les plans religieux, socioculturel que politico-économique, l’homme devra se plier aux exigences de la paix, l’amour, la justice tels annoncés par le vrai modèle du dialogue en la personne du Christ à travers l’Evangile.  Une paix qui pour sa réalisation effective passe indubitablement par le dialogue interreligieux fruit du dialogue de salut dans lequel Dieu prend toujours l’initiative.

 

2. La nature et les formes du dialogue interreligieux

Introduction

« En défendant la capacité de la raison humaine de connaître Dieu, l’Eglise exprime sa confiance en la possibilité de parler de Dieu à tous les hommes et avec tous les hommes. Cette conviction est le point de départ de son dialogue avec les autres religions, avec la philosophie et les sciences, et aussi avec les incroyants et les athées ».[17] A cet effet, conçu comme instrument d’ouverture et d’échange en vue d’un futur constructeur, le dialogue, au plan religieux s’avère l’une des plus puissantes armes dans la recherche de la vérité à travers une diversité dans l’unité ; laquelle unité reste le vœu cher au Christ : « Qu’ils soient un » (Jn 17 ,21). Ce dialogue ouvert à tout groupe de personnes ou confessions, toute proportion gardée, a sa nature, sa signification, des caractéristiques et revêt plusieurs formes.

2.1. La description de la signification du dialogue interreligieux

Le dialogue, d’une manière générale, est une conversation, un échange de vue entre deux ou plusieurs personnes, c’est une discussion visant à trouver un terrain d’entente.

Ainsi, dans un pluralisme religieux, le terme dialogue signifie « l’ensemble des rapports interreligieux positifs et constructifs, avec des personnes et des communautés de diverses croyances, afin d’apprendre à se connaître et à s’enrichir les uns les autres »[18], tout en obéissant à la vérité et en respectant la liberté de chacun.

Ce dialogue peut signifier une communication réciproque en vue d’un but commun ou d’une communion interpersonnelle. Il signifie une attitude de respect et d’amitié qui imprègne ou devrait imprégner toutes les activités qui constituent la mission évangélisatrice de l’Eglise, qu’on peut appeler « l’esprit du dialogue »[19].

Le dialogue interreligieux signifie aussi un échange entre les chrétiens et les membres des autres traditions religieuses. Dans ce dialogue, les chrétiens sont appelés à les inciter à réfléchir au contenu de leur croyance. Mais les chrétiens eux-mêmes doivent accepter à leur tour d’être remis en question. En effet, malgré la plénitude de la révélation de Dieu en Jésus Christ, la manière suivant laquelle ils comprennent parfois leur religion et la vivent peut avoir besoin de purification. Il signifie également une connaissance des personnes dans leur histoire et dans leurs valeurs et de les confronter avec l’Evangile. C’est aussi le partage, la confrontation, l’enrichissement des expériences spirituelles et les formes de prière comme voie de rencontre avec Dieu tout en restant cohérent avec sa foi.

Avec le dialogue interreligieux, on apprend à pardonner du moment que toutes les communautés religieuses peuvent déplorer d’éventuels dommages subis au long des siècles. Le dialogue c’est chercher à comprendre le cœur des autres[20].C’est  un cheminement de mort / résurrection en Christ avec les autres.

Dans le dialogue interreligieux nous pouvons noter trois phases :

a)      Phase d’apprivoisement

Le dialogue commence toujours par une étape de mise en confiance. Cela ne va pas de soi. On avance à petit pas, avec prudence justement car le terrain est incertain : on ne sait pas ce que l’autre pense. Il faut parfois « vaincre » la résistance de l’autre et la sienne. Cela demande du temps et de la patience. Ici il faut donc un certain charisme, celui de l’accueil de l’autre qui envoie des « ondes positives ».

Cette phase valorise ce que l’on a en commun. On fait des efforts pour aller vers l’autre, on travaille sur ce qui ne fâche pas a priori, avec une certaine abstention des arêtes de notre identité confessionnelle qui pourraient blesser l’autre.

b)     Phase du dialogue clarifiant

Dans cette phase, l’on passe d’une simple conversation au dialogue proprement dit, c’est-à-dire la confrontation théologique.

Il ne s’agit plus de s’abstenir de ce qui fâche, mais au contraire de confronter ce qui fait le cœur de l’identité religieuse et théologique de chaque religion. Comment y arriver ?

Dans le dialogue, il y a les logiques théologiques, les réflexes culturels, les langages qui diffèrent. Parfois même l’on construit des cultures et des théologies en miroir c’est-à-dire déformant, ce qui constitue une impasse pour le dialogue. Pour sortir de cette situation paralysante, il faut donc d’abord s’expliquer longuement, sortir des préjugés théologiques et des fausses interprétations, relire ensemble les textes, les histoires, les Ecritures elles-mêmes, apprendre à reformuler la théologie de l’autre dans nos propres catégories, dégager la Tradition apostolique des traditions confessionnelles, créer un langage commun, une culture commune. Il s’agit donc de dégager :

1 -Ce que nous pouvons dire ensemble

2- Ce qui est propre à chacun mais qui ne porte pas atteinte à notre communion

3- Ce qui nous divise encore.

Dans cette phase, plus question de s’appuyer sur des enthousiasmes ou des affinités personnelles même si l’amitié joue un grand rôle.

c)      Phase du consensus différencié  

 Avoir assez cheminé dans la compréhension de l’autre et de sa tradition, avoir dégagé chacun chez soi ce qui relève de la démarcation contre l’autre, avoir constaté ce qui a bougé par rapport aux temps de la rupture, avoir compris que sur tel point jusqu’ici séparateur, nous pouvons trouver un consensus de fond malgré les formulations différentes, s’appuyer enfin sur ce consensus est assez solide pour supporter les divergences devenues nos séparatrices.

 

2.2. Ce que le dialogue interreligieux n’est pas (ex : œcuménisme, prosélytisme, syncrétisme, relativisme).

Il s’agit de distinguer le Dialogue Interreligieux de l’œcuménisme, du prosélytisme, du syncrétisme et du relativisme.

  • Le Dialogue Interreligieux n’est pas l’œcuménisme car il est question dans l’œcuménisme de la recherche d’unité des chrétiens, l’unité de foi des Eglises chrétiennes lesquelles ont historiquement un point de départ unique et une large base commune. De fait, l’Eglise catholique ne fait œcuménisme qu’avec  les religions qui croient à la Trinité et au Verbe incarné.
  • Le Dialogue Interreligieux n’est pas un prosélytisme car dans ce Dialogue, il ne s’agit pas de faire des prosélytes c'est-à-dire des nouveaux convertis à une foi religieuse. Le dialogue, c’est avec d’autres religions ne partageant pas totalement la même foi que les Catholiques. Ce dialogue ne se fait pas dans l’intention de convertir l’autre : on ne part pas en dialogue dans l’intention de convertir l’autre. Tant mieux si par le contact, l’autre se convertit.
  • Le Dialogue Interreligieux n’est pas un syncrétisme. C’est un dialogue qui ne se réduit pas à une fusion de plusieurs systèmes religieux, de pratiques religieuses appartenant à plusieurs cultures c'est-à-dire unification de toutes les religions qui adorent Dieu à partir de leurs doctrines.
  • Le  Dialogue Interreligieux n’est pas un relativisme, lequel consiste à penser qu’une religion en vaut une autre. Cette mentalité ralentit et diminue la recherche de vérité que prône le Dialogue interreligieux.

En effet, la recherche de vie en commun avec des personnes d’autres religions fait naître chez les chrétiens un devoir spécial : témoigner de l’unicité et de l’universalité du mystère salvifique de Jésus Christ, avec la nécessité qui en découle pour l’Eglise d’être instrument de salut pour l’humanité entière. Cette vérité de foi n’enlève rien à la considération respectueuse et sincère de l’Eglise pour les religions du monde, mais en même temps elle exclut radicalement la mentalité indifférentiste imprégnée d’un relativisme religieux qui porte à considérer que toutes les religions se valent[21].                                                               

Au terme, le prosélytisme, le relativisme et le syncrétisme ne sont que des dangers et des obstacles du Dialogue Interreligieux.

Selon le pape Jean-Paul II, le « Dialogue Interreligieux signifie une communication réciproque, une amitié et un respect mutuels, aussi bien qu’un effort commun pour des objectifs partagés, le tout au service d’une recherche commune de la vérité[22]

 

2.3. Les formes du dialogue interreligieux

L’expérience des dernières années  a clairement montré les diverses manières dont se fait le dialogue. Les principales formes-modèles, qui suivent sont vécues soit séparément, soit ensemble.

2.3.1. Le dialogue de vie

Le dialogue est avant tout un style d’action, une attitude et un esprit qui inspirent le comportement. Il a besoin d’attention, de respect et d’accueil de l’autre, à son identité, à son expression propre et à ses valeurs. Un tel dialogue est la norme et le style indispensable de toute mission chrétienne et de chacune de ses formes, qu’il s’agisse de la simple présence et du témoignage ou du service ou d’annonce directe. Une mission qui ne serait pas imprégnée de l’esprit du dialogue serait contraire aux exigences de la nature humaine et aux enseignements de l’Evangile.

Tout disciple du Christ en vertu de sa vocation humaine et chrétienne, est appelé à vivre le dialogue dans sa vie quotidienne, qu’il soit en situation de majorité ou minorité. Il doit répandre le parfum de l’Evangile dans le milieu où il travaille: famille, société, éducation, arts, économie, politique, etc. Ainsi le dialogue est-il inséré dans le dynamisme global de la mission de l’Eglise.

Exemple d’un témoignage de dialogue de vie

Le professeur Eliseo Mercado, (prêtre catholique des Oblats de Marie Immaculée, OMI), est connu comme un homme de dialogue. Il a séjourné de longues années dans la province de Maguindanao au sud des Philippines, où il est devenu "l’ami" des musulmans, y compris des deux fronts de libération Moro. A cause de cette amitié et de son expertise en Islam, il est un protagoniste officiel et écouté dans le processus de paix engagé dans cette région. De 1992 à 2002, il occupa les fonctions de recteur de l’université Notre Dame à Mindanoa à forte majorité musulmane. Dans un article intitulé "Musulmans et Chrétiens vivant ensemble," voici ce qu’il retient de son pèlerinage au cœur de l’Islam dans la ville d’Indanan sur l’île de Jolo, Sulu où une famille musulmane l’hébergea au grand ébahissement terrifiant de ses frères chrétiens : «Nous vivons à une époque dangereuse certes, mais captivante. La guerre dite anti-terroriste et la paranoïa croissante envers tout ce qui apparaît "différent" nous ont conduits à regarder le monde environnant et toute autre personne avec crainte et suspicion. En bien des endroits, religion et appartenance ethnique alimentent guerres et conflits. Les problèmes et contentieux qui s’y rapportent continuent de tuer et de diviser de façon simpliste l’humanité en deux catégories: les «bons» et les «mauvais». Le triste état de nos divisions et de nos peurs mène au danger où la tentation est de réduire les relations christiano-musulmanes à un antagonisme, à un conflit de civilisation. Pourtant, la vérité en la matière est qu’il existe un grand nombre d’expériences variées de bon voisinage et de coexistence pacifique entre chrétiens et musulmans, non seulement entre responsables religieux, mais aussi  entre simples fidèles des deux traditions religieuses. Il est intéressant de noter que tant les violents que les pacifiques utilisent des images religieuses et des passages des saintes Ecritures ou des livres saints pour justifier leurs actions qui sont sources de conflits et encouragent la violence, ou bien dans l’autre cas, construisent la paix ».

A la fin de son article, il conclut en disant: «En  dépit des difficultés et, parfois de l’inutilité apparente de nos efforts… il est de notre responsabilité commune de transformer le langage de l’exclusion et de la guerre en un langage d’accueil et d’amour… Certes, cela résonne un peu comme une nouvelle utopie… Mais il est urgent de planter, de cultiver et faire grandir une nouvelle et rafraichissante attitude d’ouverture d’esprit et de cœur, une disposition essentielle à la compréhension et à la vie entre musulmans et chrétiens au Mindanao. Le mot Tadabbor désigne une telle réalité. Il s’agit d’une nouvelle attitude. Oui, un nouveau passage: passé de la culture de division et de conflit à celle de la fraternité et de la paix.

2 .3.2  Dialogue d’action

Un autre niveau est le dialogue d’action et de la collaboration visant les objectifs de caractère humanitaire, social, économique et politique qui favorisent la libération et le développement de l’homme. Ce dialogue est fréquent au sein des organisations locales, nationales et internationales, dans lesquelles chrétiens et croyants des autres religions se penchent ensemble sur les problèmes mondiaux.

Le champ de la collaboration peut être très vaste. Parlant en particulier des Musulmans, le Concile Vatican II exhorte à «oublier le passé» à «protéger et promouvoir ensemble, pour tous les hommes, la justice sociale, les valeurs morales, la paix et la liberté»[23]. Le Pape Paul VI d’une manière spéciale dans «Ecclésiam Suam» et le Pape Jean Paul II, au cours de ses nombreuses rencontres avec les chefs et les représentants de diverses religions, se sont prononcés dans le même sens. Les grands problèmes qui affligent l’humanité stimulent les chrétiens à une collaboration avec les autres croyants, à cause de leur foi respective.

2.3.3  Le dialogue de l’échange théologique                                             

Tous les membres de l’Eglise sont appelés au dialogue, mais pas tous de la même manière. Car certains dialogues sont d’un intérêt particulier. C’est l’exemple de l’échange théologique qui est réservé aux spécialistes des religions. Ceux-là qui seront capables de comparer, d’approfondir et d’enrichir les patrimoines religieux des uns et des autres, afin de résoudre les problèmes qui se posent aux hommes à travers l’histoire.

Dans cet échange, les interlocuteurs apprennent à connaître et à apprécier leurs valeurs spirituelles et leurs catégories cultuelles réciproques, ouvrant la voie à la communion et à la fraternité entre les hommes.

Ce dialogue se réalise surtout dans les sociétés pluralistes, au sein desquelles cohabitent et parfois se combattent les traditions et les idéologies différentes. Le dialogue de l’échange théologique ouvre les voies pour promouvoir ensemble les valeurs humaines et spirituelles. Il conduit au dialogue de l’expérience religieuse en éclairant et en encourageant les expériences des unes des autres.

2.3.4  Dialogue de l’échange de l’expérience religieuse

Le dialogue de l’échange de l’expérience religieuse est une coopération féconde où l’on rentre en contact avec les autres religions pour partager les expériences vivantes sur le plan spirituel et religieux.

Bien qu’enrichissant, l’échange de l’expérience religieuse doit se faire par des croyants enracinés dans leur tradition religieuse respective, expérimentés, capables de partager leurs expériences de prières et leur engagement dans la voie de la recherche de l’absolu.

Cette confrontation d’échange interpersonnel des dons respectifs religieux, fait évoluer les esprits. Elle crée un climat de communion interreligieuse pour un accueil des valeurs parfois méconnues ou négligées des autres religions comme la forte pratique religieuse d’un juif, la transcendance de Dieu rappelé par la prière d’un musulman, l’acte de contrition adressé aux dieux par un hindou pour demander le pardon de ses fautes, et la sagesse du bouddhisme en ce qui concerne la vie fraternelle en communauté sont autant d’événements qui viennent nous interroger, sur notre propre manière de vivre notre foi.

C’est dans cette perspective que les moniales de l’Abbaye bénédictine Sainte Marie de Maumont en France et les moines Bouddhistes du Japon ont effectué des séjours d’expérience dans l’un et l’autre des deux monastères. Et il ressort à la fin de leur échange qu’une expérience religieuse aide à approfondir les pratiques spirituelles de sa propre tradition d’abord et celle de l’autre en plus[24]. Car il faut redécouvrir les richesses insoupçonnées de leur charisme et nous entrainer à la découverte des autres expériences. Enfin, l’échange de l’expérience religieuse préserve l’espace vital pour chacun parce qu’il engendre la compréhension, la confiance, la communion fraternelle et fait agir ensemble pour faire grandir la civilisation de l’amour.

2.3.5. Les autres formes du dialogue interreligieux

Conformément à la recommandation du Concile Vatican II qui reconnaît que le Salut en Jésus est offert à tous par des voies mystérieuses[25], le réseau en matière de dialogue interreligieux s’étend à toutes les confessions religieuses.

  • Dialogue Judéo-chrétien 

Liés de part leur souche commune et à leur situation «d’ainés», le judaïsme et le christianisme restent les deux grandes religions de premier plan.

Leurs relations n’ont jamais été tendres.  Le Judaïsme réclame sa descendance d’aînesse et se dit la religion la plus vraie et la plus authentique. Leur rencontre au niveau du dialogue se limite à réfléchir et à œuvrer en vue de l’éradication de la violence et de la détention dans des situations cruelles comme à Auschwitz.

  • Le dialogue Islamo-Chrétien 

Grâce à l’aggiornamento entrepris par l’Eglise catholique ces dernières décades, le plan de ce dialogue fut réajusté. Il s’agit d’abord d’aboutir à une reconnaissance et à une estime mutuelle. Sur ces bases, des rencontres permirent la mise à jour et l’existence de bonnes volontés et des points sensibles (concurrence des missions, les attitudes à adopter de part et d’autre et à l’égard de leurs "Ecrits").

 

 

  • Le dialogue avec les Bouddhistes 

«Quand l’Eglise Catholique […] entre en dialogue avec les croyants d’autres religions, elle le fait pour témoigner de son amour pour tous les hommes de tous les temps. C’est dans cet esprit que l’Eglise catholique cherche à promouvoir une communauté de vues plus profondes entre tous les peuples et les religions »[26] . C’est dire que l’Eglise promeut ce dialogue à cause des idéaux d’amour dont elle s’est fixés, à l’égard de tout homme.

  • Dialogue hindou-chrétien :

Initié par Jules Monchanin et Dom Henri le Saux côté chrétien, grâce à la brèche du Concile Vatican II[27], qui cite l’hindouisme comme l’une des religions qui s’efforce à répondre aux énigmes de la condition humaine et de Râm Mohan Roy et Keshab Chandra, pionniers du Brahmo-Samàj, côté hindou. Ce dialogue fut rendu possible après de multiple expériences et études qui finirent par établir une attitude de dialogue. Ce dialogue, dit de compréhension mutuelle a du chemin à faire en vue d’une connaissance mutuelle plus profonde.

  • Dialogue avec les Religions Traditionnelles Africaines

Il est initié comme un moyen adapté pour établir et développer la compréhension mutuelle, l’estime et l’amour des valeurs spirituelles et morales de ces confessions après purification pour une éventuelle inculturation et aussi pour des raisons de valeurs sociales et culturelles propres à ces confessions[28].  L’unité chère à Jésus y est visée.

  • Dialogue avec les non-croyants 

Il est une invitation à la conversion avec l’annonce. Issu de la recommandation du Seigneur « Allez de toutes les nations, faites mes disciples » (Mt 28, 19) qui entend étendre le Salut à tous, il paraît le plus dynamique.

  • Dialogue avec les Nouveaux Mouvements Religieux 

Il est initié dans la même optique de l’"Unité des chrétiens" et se présente très mouvementé voire rejeté par ces nouveaux mouvements religieux. Pour  l’Eglise, deux objectifs y sont visés:

-          Obéir à la recommandation du Seigneur au sujet de l’unité.

-          Etudier et connaître ces mouvements.

 L’Eglise veut vivre l’amour avec tous sans exception aucune suivant la recommandation de Notre Seigneur Jésus Christ au sujet de l’amour: «Tu aimeras ton prochain comme toi-même» (Mt 22,39).

Conclusion

La recherche de l’unité passe par le dialogue qui, si franc soit-il instaure un climat de confiance mutuelle et permet une ample ouverture de soi à l’autre. En vue d’éviter l’uniformisme, le Dialogue Interreligieux  respecte des normes. Il a des caractéristiques, une nature, une signification et des formes. Par lui, l’Eglise Catholique vit quoi qu’imparfaite dans l’ensemble cette noble recommandation de son Seigneur «qu’ils soient un ».

3- Les fondements du dialogue interreligieux

Introduction

Le dialogue interreligieux est un thème toujours actuel et incessant défi à relever. Pour ce faire, une parfaite maîtrise de cette notion sur tous ses angles s’avère indispensable en vue d’en asseoir des bases solides encrées dans une conviction que rien ne pourra ébranler. Et pour justifier le fait que l’avenir de l’humanité et des religions réside dans le rapprochement des uns aux autres avec pour principe le dialogue dont Albert Camus parle en ces termes : « je n’essayerai pas de modifier rien de ce que je pense ni rien de ce que vous pensez (pour autant que je puisse en juger) afin d’obtenir une conciliation qui nous serait agréable à tous. Au contraire, ce que j’ai envie de vous dire aujourd’hui, c’est que le monde a besoin de vrai dialogue, que le contraire du dialogue est aussi bien le mensonge que le silence, et qu’il n’y a donc de dialogue possible contre des gens qui restent ce qu’ils sont et qui parlent vrai ». Nous voulons donc soulever ce qui justifie ce dialogue au niveau de la réflexion philosophique et théologique, puis au niveau socio-culturel pour déboucher sur quelques exemples bibliques.

 

3.1- Les fondements philosophiques

 

3.1.1- L’unité du genre humain

L’unité du genre humain est l’un des éléments qui appellent à un dialogue sincère et équilibré entre les religion du fait que même que la religiosité leur est un caractère commun et que ‘toute relation établie avec un être transcendant mérite le nom de religion » comme l’affirme le Révérend Sevami Amarananda, hindouiste, professeur d’hindouisme au centre vedantique de Genève. Comment se vérifie alors concrètement l’unité du genre humain comme préalable au dialogue interreligieux.

L’étude de l’évolution de l’homme qui se fonde sur les fossiles (Paléontologie humaine) et l’archéologie, ainsi que sur la paléoécologie, la primatologie et la biologie moléculaire montre que l’espèce humaine aurait une même source et les mêmes caractéristiques dont les notes sonores seront la sociabilité et la religiosité. L’appartenance à une espèce ne s’arrête pas à une simple ressemblance physiologique ou morphologique, elle s’étend aux caractères psychologiques et sociaux. Selon les thèses de Freud, le mal psychologique de l’absence du père a engendré l’idée de Dieu d’où la religion et le caractère serait le propre de tout homme. Le pape Jean-Paul II de vénéré mémoire dira que la religion est un phénomène universel qui fait partie de l’histoire humaine depuis son commencement. L’unité de l’espèce humaine est une évidence et la diversité des races (noir, blanc, jaune) et des cultures et croyance ne la contredisent en rien. Blancs ou Noirs appartiennent à la même espèce humaine. De même, la diversité des religions ne nie pas l’unité du concept de la religion.

A ce titre, Hegel, dans la phénoménologie de l’esprit, eut l’idée que chaque religion contenait à sa façon tous les ingrédients propres à la religion en général. La diversité des religions serait en quelque sorte celle des diverses images d’un kaléidoscope qui distribue à chaque fois qu’on l’agite, les morceaux de verres colorés qu’il contient. Cela ne veut certes pas dire que toutes les religions singulières soient identiques, cela signifie que les différences entre les religions singulières ne sont pas des différences de nature, mais des différences d’accent et de lucidité spirituelle. Ceci étant, disons que l’unité du genre humain appelle à un dialogue entre les diverses religions qui caractérisent les différentes couches sociales qui composent la population mondiale.

3.1.2- La quête de la vérité

Comme le déclarait Malebranche : « Tâchons que rien ne nous empêche de consulter l’un et l’autre notre maître commun, la raison universelle ; car c’est la vérité intérieure qui doit présider à nos entretiens ». En d’autre terme, la recherche de la vérité est un facteur d’unité, de conciliation. On dira également du bon sens qu’elle est la chose la mieux partager. Et par- delà tout, Dieu est considéré comme la source de la vérité. Bossuet affirme que « Dieu est la vérité, d’elle-même, toujours présente à tous les esprits, et la vraie source de l’intelligence
(in connaissance de Dieu et soi-même). Si la raison est le propre de tout homme alors la recherche de la vérité qui est également une soif se rencontrent et se confrontent les uns aux autres. La quête de la vérité nous rassemble forcément du fait qu’elle appelle chacun à sortir de soi pour aller vers l’autre. Malebranche, dans son ouvrage « De la recherche de la vérité », ajoutera : « Les idées qui nous éclairent, la justice qui nous conduit, sont en Dieu, qui se confond avec la raison universelle ; elles ne sont pas en moi, ni dans autrui ». Le fait de savoir que nul ne possède la Totale vérité de La religion pourrait conduire à une certaine tolérance et compréhension des religions autre que La nôtre. Notre rattachement nécessaire à la raison universelle fait que refuser la vérité c’est se renier soi-même car en effet « Il n’y a personne qui ne convienne que tous les hommes sont capables de connaître la vérité, et les philosophes même les moins éclairés, demeurent d’accord que l’homme participe à une certaine raison qu’ils ne détiennent pas. C’est pourquoi ils le définissent comme animal Rationis particeps ; car il n’y a personne qui ne sache du moins confusément, que la différence essentielle de l’homme consiste dans l’union nécessaire qu’il a avec la raison universelle. Fort de tout cela, la quête de la vérité est sans nul doute une voix vers l’ouverture aux autres, vers la contemplation des autres "champs lumineux " selon les termes de Charles Baudelaire.    

 

3-2- Les fondements théologiques du Dialogue Interreligieux         

3-2-1- Un même Dieu, Créateur et Père de tous

La Bible nous enseigne que Dieu est créateur et Père de tous et que nous avons tous un même Dieu. Ceci se vérifie dans Genèse 1-11 qui traite des débuts de l’univers créé par Dieu. En effet, le livre de Genèse nous relate bien le récit des origines du monde et de l’humanité. Tout vient à l’existence sur l’ordre de Dieu et tout est créé selon un ordre croissant de dignité. Dieu est antérieur à la création et tous les êtres ont reçu de lui le don de l’existence ou de la vie. Aussi, Dieu n’a pas créé l’homme solitaire ; dès l’origine « il les créa homme et femme »
(Gn 1, 27). Cette société de l’homme et de la femme était l’expression première des personnes. Car l’homme, de par sa nature profonde, est un être social, et, sans relation avec autrui, il ne peut ni épanouir ses qualités.[29] Ainsi, selon Gaudium et Spes « les hommes constituent une seule famille et un seul peuple de Dieu ». En outre, dans l’Ancien Testament déjà, évoquant ce qui était alors la situation du peuple de Dieu, le prophète Ezékiel recourait au symbolisme de deux morceaux de bois d’abord distincts, ensuite rapprochés l’un de l’autre, pour exprimer la volonté divine de « rassembler de tous côté » les membres de son peuple déchiré ;
« Ils seront mon peuple et je serai leur Dieu. Et les nations sauront que je suis le Seigneur qui sanctifie Israël » (Ez 37, 16-28)[30][31]. Tous les peuples forment, en effet, une seule communauté ; ils ont une seule origine, puisque Dieu a fait habiter toute la race humaine sur la face de la terre (Ac 17, 26).[32] Donc, la relation de l’homme à Dieu le Père et la relation de l’homme à ses frères humains sont tellement liées que l’écriture dit ; « Vous n’avez qu’un seul Père » (Mt 23, 9), ce Père, Abba, invoqué par le Christ lui-même, Lui qui est le Fils Unique, de la même substance. Et aussi : « Vous n’avez qu’un seul maître, et tous vous êtes des frères » (Mt 23, 8).

 3-2-2-Jésus Christ, sauveur de tous

Le dessein universel de Dieu pour le salut du genre humain est réalisée en Jésus Christ son Fils unique. En effet, Jésus Christ est le Rédempteur de l’homme, le Rédempteur du monde. Le document conciliaire Ad Gentes parlant de la mission du Fils, dit en ces termes : « Pour affermir la communion avec lui, et pour établir la fraternité entre les hommes, les hommes qui sont pécheurs, il décida d’entrer dans l’histoire humaine d’une façon nouvelle et définitive, en envoyant son Fils dans notre chair, afin d’arracher par lui les hommes à l’empire des ténèbres et de Satan (col 1, 13 ; Ac 10, 38), et de se réconcilier en lui le monde (2 Co 8, 6 ; Col 1, 16), il a établi héritier de toutes choses, afin de tout restaurer en lui (Ep 1, 10).[33] Car le Christ fut envoyé dans ce monde comme le véritable médiateur entre Dieu et les hommes. Aussi par les voies d’une Incarnation véritable, le Fils de Dieu est-il venu pour faire participer les hommes à la nature divine (2 Co 8, 9). Jésus Christ est donc le Rédempteur admirable la vérité fondamentale du salut de tout homme et tout l’homme sans distinction de race langue, peuple et nation. C’est ainsi qu’à la fin du deuxième millénaire, Jean-Paul II disait ceci : « Le Rédempteur de l’homme, Jésus Christ, est le centre du cosmos et de l’humanité »[34]. Saint Jean a exprimé cette conscience de la vérité centrale de la foi au début de son Evangile : « Le Verbe s’est fait chair et il a demeuré parmi nous » (Jn 1, 14). Le Verbe s’est fait ainsi proche de nous en prenant notre condition humaine excepté le péché. Devant la situation du peuple de Dieu en son temps, Saint Jean voit dans la mort de Jésus la raison de l’unité des fils de Dieu : « Jésus allait mourir pour la nation et non pour la nation seulement, mais encore afin de rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés » (Jn 11, 51-52). L’unité de toute l’humanité déchirée est voulue par Dieu. C’est pourquoi il a envoyé son Fils, afin que mourant et ressuscitant pour nous, il nous donne son Esprit d’amour. A la veille du sacrifice de la croix, Jésus lui-même demande au Père pour ses disciples, et pour tous ceux qui croiront en lui, qu’ils soient un, une communauté vivante. Par sa mort sur la croix, Jésus a rassemblé dans l’unité tous les enfants de Dieu en lui pour toujours et il n’y a plus de barrière qui sépare. C’est pour cela que Saint Paul dit : « là, il n’y a plus Grec et Juif, circoncis et incirconcis, barbare, scythe, esclave, homme libre, mais Christ : il est tout en tous » (Col 3, 11).

3-2-3-L’Esprit Saint, à l’œuvre en tous

L’Esprit Saint c’est l’Esprit qui procède du Père et du Fils. Cet Esprit est à l’œuvre avant le commencement du monde. Et spécialement le jour de la Pentecôte, l’Esprit Saint est descendu sur les Apôtres. Par l’effusion dans l’Esprit, « chacun les entendait parler sa propre langue » (Ac, 2, 6). Ceci montre que l’Esprit Saint fait l’unité de tout le genre humain dans la différence. C’est la preuve que l’Esprit Saint est à l’œuvre dans le monde, non pas seulement dans les fidèles chrétiens, mais aussi dans les hommes sans distinction de race, langue, peuple et nation. Donc, tous les hommes ont eu part à la grâce du Saint-Esprit envoyé par Jésus Christ sur les Apôtres et répandu dans le monde entier et il est à l’œuvre dans tous les hommes. En outre, le jour de la Pentecôte, il descendu sur les disciples pour demeurer avec eux à jamais (Jn 14, 16) ; l’Eglise se manifesta publiquement devant la multitude, la diffusion de l’Evangile commença avec la prédication ; enfin fut préfigurée l’union des peuples dans la catholicité de la foi ; par l’Eglise de Nouvelle Alliance, qui parle toutes les langues, comprend et embrasse dans la charité toutes les langues et triomphe ainsi de la dispersion de Babel ».[35] En plus, nous lisons ceci : « Esprit qui distribuez vos dons à chacun selon votre volonté ». Cet extrait de la litanie du Saint-Esprit témoigne fort que l’Esprit-Saint est à l’œuvre en tous car c’est lui, l’Esprit de vie, la source d’eau jaillissante pour la vie éternelle (Jn 4, 14 ; 7, 38-39). Mais l’Esprit Saint est à l’œuvre dans l’Eglise et en dehors de l’Eglise du fait que selon saint Jean l’Esprit de Dieu souffle là où il veut (Jn 3, 8). Ceci nous montre donc clairement que L4Edprit Saint, « principe du rassemblement et de l’unité » [36]est à l’œuvre en tous et aucune limite géographique ne s’impose à son action dans tous les hommes du monde entier sans distinction de race langue, peuple et nation. L’Esprit Saint donné à l’Eglise de Jérusalem est ainsi communiqué aux Samaritains baptisés, tandis que la mission de Philippe reçoit de Pierre et de Jean, envoyés des Apôtres, son caractère pleinement apostolique (Ac 8, 5-25).

3-2.4-Un seul destin.

Théologiquement, le destin est ce plan d’amour que Dieu a pour tout homme. C’est aussi le dessein bienveillant de Dieu sur l’homme. Ce destin veut faire de tout homme un être libre, maître de la création, en l’appelant à découvrir l’amour de Dieu dont il est l’objet et à y répondre librement. Le vouloir de Dieu, c’est que l’homme en usant de sa liberté parvienne au salut, salut que lui offre gratuitement son créateur et il suffit que l’homme accepte et adhère à ce plan de Dieu, à cette volonté de Dieu qui lui fait appel à sortir des ténèbres pour venir à son admirable lumière. L’homme est libre d’accéder à son salut. Personne n’a le droit de refuser que la volonté de Dieu se réalise en accordant le salut à quiconque il veut, puisque c’est Dieu qui décide. Dieu est et demeure auteur du salut. Il a fixé le destin de tout homme et personne ne peut s’opposer à cette décision libre mais puissante de Dieu. Le monde aujourd’hui apparaît comme un chantier remis aux mains des hommes, une construction à réussir par eux.

Dans la perspective chrétienne, le destin de l’homme est de découvrir la liberté en participant à la création du monde et d’offrir librement ce monde à Dieu. C’est ce à quoi Dieu l’appelle, lui donnant force et esprit pour y parvenir.

En coopérant avec Dieu dans la bonne gestion de la création, l’homme garantit en même temps son bonheur sur terre et dans l’au-delà.

Pour les chrétiens, le destin renvoie à la providence divine et à la l’immortelle destinée de l’homme. Selon St Augustin, c’est Dieu Créateur qui connaît dans son éternelle prescience, et fixe l’universel avenir : celui des hommes créés et appelés ou destinés à le chercher, à trouver en lui leur achèvement et leur bonheur. Boèce se sert du mot destin pour signifier l’exécution temporelle du plan providentiel éternel de Dieu, d’où il ressort que tout ce qui est soumis au destin est soumis également à la providence ; par suite, c’est à la providence qu’est soumis le destin. Pour St Thomas, la notion de destin est fixée. La théologie catholique l’admettra comme la réalisation temporelle et fidèle du plan immuable conçu dans la prédestination divine.       

3-2.5-Partager une seule terre.

La terre est l’une des réalisations accomplies par Dieu dans l’œuvre ou dans le processus de la création. En Genèse 1,1, l’auteur l’a bien signifié en ces termes : « Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre ». Dans le psaume 115,16, le psalmiste rend grâce à Dieu de ce qu’il a confié la terre à tous les hommes (Noirs, Blancs et Jaunes). En créant l’homme et la femme, Dieu leur a donné la terre et leur a demandé de se multiplier, de la peupler et de la gérer tout en mettant à leur disposition tout ce qu’il y a à la surface de cette terre. « Dieu a destiné la terre et tout ce qu’elle renferme à l’usage de tous les hommes et de tous les peuples ».[37] On comprend par là que la terre et ses ressources font partie de l’héritage commun de toute l’humanité. Cette idée partagée met en relief l’interdépendance de la responsabilité collective, souligne aussi l’importance du principe de la solidarité globale, d’où les impératifs moraux de la justice sociale, de la coopération internationale et de la volonté de promouvoir le bien-être spirituel et matériel des générations présentes et futures. La terre est faite pour tous et les hommes doivent composer ensemble. C’est pourquoi, Nostra Aetate n°1 affirme que « tous les peuples forment, en effet une seule communauté ; ils ont une seule origine, puisque Dieu a fait habiter toute la race humaine sur la face de la terre ». Nous formons sur terre une seule communauté et la vie communautaire est indispensable. La terre est unique et il n’y a plus une autre terre à part celle-ci où quelqu’un d’autre irait vivre seul. Pour ces raisons, tous les hommes sont appelés à faire preuve de maturité pour en prendre soin et veiller à sa bonne gestion. Personne, en principe, n’a le droit de confisquer les biens terrestres. Nous devons nous accepter mutuellement quelles que soient les différences religieuses, ethniques ou culturelles qui ne constituent que d’ailleurs une richesse. Tous les hommes sont appelés à conjuguer leurs efforts pour établir un monde de paix, de partage équitable des biens et d’amour fraternel et mutuel.

3-2-6. Le dialogue interreligieux comme partie intégrante de la mission de l’Eglise.

En considérant tous les points précédents développés un peu vers le haut, il se dégage clairement qu’il y a urgence pour l’Eglise de considérer le dialogue comme faisant partie intégrante de la mission de l’Eglise. L’Eglise s’engage donc à promouvoir ce dialogue dans tous les domaines et avec toutes les couches sociales sans oublier les traditions religieuses.

 Le Christ est venu pour faire la Paix, réconcilier le juif et le païen, l’homme libre et
l’esclave en leur annonçant la bonne nouvelle du salut. L’Eglise a reçu du Christ, son Seigneur la mission d’annoncer l’Evangile à toutes les nations (Mt 28,19-20).
Elle a donc la vocation de rassembler l’humanité dans l’unité (Jn. 11,52). Ainsi, le peuple de Dieu doit s’étendre à tous les hommes et par toute la terre en raison du fait que le Christ qui est la lumière des peuples a apporté le salut pour tous les hommes sans distinction de race, de culture et de langue. Donc, c’est tout le genre humain que le Christ veut sauver selon le dessein bienveillant de Dieu son Père. C’est pourquoi, d‘après Lumen Gentium n°1, « Il faut que tous les hommes, désormais plus étroitement réunis entre eux par les liens sociaux, techniques, culturels, réalisent également leur pleine unité dans le Christ ». Il convient de comprendre que cette cohabitation dans l’unité ne cherche pas à convertir, mais vise le rapprochement des religions et le développement de tout homme et de tout l’homme. L’Eglise ne cesse pas de lancer un constant appel au dialogue entre tous les croyants des religions du monde, afin qu’ils sachent chercher ensemble les formes les plus opportunes de collaboration : Les religions ont un rôle important à jouer dans la réalisation de la paix, qui dépend de l’engagement commun pour le développement intégral de l’homme. Dans l’esprit des rencontres de prières qui sont tenues à Assise, L’Eglise continue d’inviter les croyants des autres religions au dialogue et à la promotion, en tout lieu, d’un témoignage efficace des valeurs communes à toute la famille humaine ».[38]Ce dialogue naît avec toutes ses exigences et ses formes, de ce respect pour les personnes et même de la conviction que le Christ les aime au point de donner sa vie pour elles et de la conviction que l’Esprit Saint agit en elles. L’Eglise s’adresse à l’homme dans l’entier respect de sa liberté. L’Eglise propose, elle n’impose rien ; elle respecte les personnes et les cultures. Les autres religions et les traditions doivent être approchées avec grand respect, à cause des valeurs spirituelles et humaines qu’elles contiennent. Le Concile Vatican II va plus loin. Ainsi, Nostra Aetate parle de la présence dans ces traditions d’un « rayon de cette Vérité qui illumine tous les hommes »[39]. Ad Gentes reconnaît la présence de « semences du Verbe » et signale « les richesses que, par sa munificence, Dieu a dispensées aux nations »[40]. Lumen Gentium fait référence au bien « semé » non seulement « dans l’esprit et le cœur des hommes » mais aussi « dans les rites et les coutumes des peuples »[41]. Ces quelques éléments de références montrent que le concile a reconnu ouvertement la présence des valeurs positives dans les traditions religieuses. La mission de l’Eglise est de mener à leur perfection dans le Christ ces éléments trouvés dans d’autres religions. C’est pourquoi, l’annonce du Christ et l’évangélisation sont des moyens importants parmi tant d’autres pour nouer avec les autres religions et les autres tous les peuples et les autres couches sociales le dialogue interreligieux. Le but de l’Eglise est de promouvoir entre religions la paix.

3.3. Les fondements sociaux et culturels du dialogue interreligieux       

        3.3.1. Les relations de parenté dans les cultures africaines

En Afrique, nous notons une forme de dépendance mutuelle entre les hommes d’une société qui fait que les uns ne peuvent être heureux et se développer que si les autres le peuvent
aussi. L’Africain est pleinement homme dans la mesure où il vit avec les autres et pour les autres. Il ne peut se définir sans faire référence à la relation qui le lie aux autres.
Aussi l’Africain est-il conçu comme « relation ». La vie individuelle n’est concevable qu’en référence à la source d’où elle jaillit. Détaché de la communauté, l’Africain est comme une branche arrachée du tronc, condamné à dépérir. Dans les traditions africaines, la relation de parenté se manifeste par différentes formes d’entraides et de vécu de la fraternité. Elle appelle un grand sens de responsabilité partagée, une assistance mutuelle dans les travaux champêtres surtout dans le deuil, la maladie et les sinistres. Il s’agit en fait d’une fusion « des mêmes » (des frères) pour former l’unité, et consolider leur force. En Afrique, le sens de la famille est une réalité vaste indissociable de l’individu. L’Africain est ce qu’il est par la famille et surtout par la famille. Celle-ci va au-delà de la famille nucléaire et regroupe une gamme hétéroclite de personnes : parents géniteurs, proches parents, frères er sieurs, tantes, oncles de tous les côtés. Lorsqu’un membre de la famille possède quelque chose, il y va dans l’avantage de toute la famille. C’est dans la famille que réside la plus importante des forces capables d’accroître l’énergie vitale de l’Africain. En somme, les relations de parenté dans les cultures africaines, fondées sur la vertu de la solidarité, constituent un terrain fertile pour le dialogue interreligieux. Qu’en est-il des interactions politiques et économiques ?

3.3.2. Les interactions politiques et économiques

Aujourd’hui, les faibles résultats de l’interventionnisme public face à la crise, mais également les lacunes du modèle libéral notamment en matière sociale nourrissent une réflexion sur les contraintes auxquelles sont soumises les économies contemporaines. Avec l’intégration croissante des économies nationales au sein de l’économie mondiale et la mobilité de plus en plus importante des capitaux, il semble que la latitude des politiques économiques de chaque pays ne cesse de se réduire. Il apparaît ainsi donc que, pour enregistrer des résultats significatifs, les politiques des différents Etats doivent faire l’objet d’une véritable coordination ce qui explique l’accent mis sur la concertation entre responsables économiques au sein d’organismes internationaux tels que l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), l’Union Européenne, l’Organisation de Coopération et de développement économique ou le Fond Monétaire International (FMI). En Afrique, particulièrement rien n’y semble en fait stabilisé : ni les frontières, ni les cadres politiques, ni les économies. En effet, l’Afrique met tout son espoir dans le panafricanisme fondé sur l’unité et la solidarité des Etats africains. Ce mouvement politique s’est exprimé à plusieurs reprises à travers notamment des Alliances telles que :

  • L’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) devenue l’Union Africaine (UA) lors du sommet de Durban (Afrique du Sud) en juillet 2001. L’ambition de l’UA est d’accélérer l’intégration économique et politique entre les pays africains, dans le nouveau cadre de la mondialisation, et de promouvoir les principes et les institutions démocratiques ainsi que le respect des droits de l’homme. Le Nouveau partenariat pour le développement de l'’Afrique (NEPAD), adopté par seize chefs d’État lors du sommet de l’OUA d’Abuja (Nigeria), en octobre 2001, participe aussi de cette volonté ;

 

  • La communauté économique africaine (CEA) vise la création d’un marché commun africain et d’une union économique et monétaire panafricaine ;

 

  • La communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) vise non seulement à développer l’intégrité de ses pays membres, mais aussi à s’affirmer comme une instance de médiation dans les conflits locaux ;

 

  • Le conseil de l’Entente qui s’efforce de coordonner les actions de ses pays membres dans le domaine de la politique extérieure, et essaie de mettre au point une politique de développement régional ;

Interreligieux : à ces instances, sont présentes

  • L’Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA) et la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BECEAO) préparent l’harmonisation de la législation en matière de chèques, de banques et de crédits.

 

Bref, les principes fondateurs des Organismes internationaux ainsi que des alliances régionales au sein du continent africain constituent des fondements pour le dialogue les diverses tendances religieuses.

 

  4. Les exemples bibliques

Quand on parle du dialogue interreligieux, l’on comprend cet esprit d’ouverture, d’écoute, de respect et de rapport entre deux ou plusieurs religions. Or lorsqu’on parle de religion, nous faisons en même temps le lien avec les cultures. C’est pourquoi le rapport entre culture et religion est inséparable de l’Evangile que nous a apporté Dieu fait homme en Jésus Christ. Et dans ce domaine de dialogue, Jésus reste un premier exemple biblique. Il demeure le modèle le plus visible surtout dans sa rencontre avec la Samaritaine. A sa suite beaucoup d’autres témoins, mais nous parlerons uniquement de saint Paul, apôtre des gentils ; de St Pierre ; des prophètes Jérémie et Balaam dans l’Ancien Testament.

 4.1-Jésus

Très souvent, la recherche de l’unité, de la vérité, de la paix, de la justice, de la réconciliation et du salut, sont les mobiles du dialogue. Ce dialogue passe nécessairement par l’amour de soi-même et du prochain avec conscience que Dieu est Père de toute la famille humaine, source et signe visible de l’unité. Alors nous ne pouvons pas parler de cela sans faire recourt à Jésus.

En effet la vie de Jésus renferme en elle-même tous les éléments du dialogue. Toute sa vie a été amour et annonce de la paix, de la vérité et du salut, en vue de rassembler toute la famille humaine : « Qu’ils soient un, comme Toi Père et Moi sommes un… » (Jn 17, 21). C’était donc sa mission dans le monde car dit-il « Je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité » (Jn 18, 37). C’est pourquoi, il se montre comme le Bon Berger (cf. Jn 10) qui ramène toutes les brebis perdues au bercail. C’est lui qui conduit le troupeau avec patience et miséricorde. Et le prophète dit de lui « la brebis perdue je la chercherai, celle qui est blessée, je la soignerai » (Ez 34, 16). Il est venu réconcilier le monde d’avec Dieu par sa vie, sa passion, sa mort et sa résurrection.

Jésus a mission de service de l’humanité entière, sans faire exception de peuple,
races et cultures. Il a appris à cet effet à écouter, à dialoguer et à pardonner.
D’ailleurs il en est la source. Car, dans l’Evangile, on voit Jésus garder le silence pour écouter (Jn 8, 4-6), prier (Jn17 ; Mt 26, 36- ss), prêcher (Lc 16,17 ; 7, 21) et agir (Lc 35 ss ; Mc 4, 35-41, Mc 5, 1-ss) et puis tenir des discussions avec les Juifs et les Pharisiens pour leur faire découvrir la vérité (Jn8, 1-ss ; Jn9).

En réalité, son message est indissociable de son action. Il annonce Dieu et son Royaume aussi bien en paroles qu’en actes. Il va plus loin. Il accepte les contradictions, l’échec et la mort. Sa victoire passe par le don de sa vie sur la croix. C’est une véritable expression de son amour, et un moyen de révélation du salut. C’est le cas de sa rencontre avec la Samaritaine

4-1-1-Jésus et la Samaritaine

Les Juifs et les Samaritains avaient chacun, une vision sur la venue du Messie. Ils avaient différentes cultures et conceptions religieuses pourtant ayant même souche au départ. Il fut un temps, leur antagonisme les a séparés totalement. Même ils ne se parlaient plus. De cette situation désunie, Jésus rencontre, parle avec la Samaritaine. Ensuite il annonce l’unité et fait découvrir la vérité qui illumine la Samaritaine (Jn 4, 1-42).

Avec la Samaritaine, Jésus montre ce qu’il est, et sa mission. Il proclame l’universalité du salut. Le salut, à travers cet épisode de Jean, n’est pas réservé uniquement aux Juifs, mais à tous les hommes de la terre.

Cela prouve que, Jésus est venu pour le salut du monde et non seulement pour une catégorie de peuple, de race et de culture. Il appelle tous donc à l’unité et au dialogue pour la paix et l’amour mutuel.

Aux questions doctrinales qui opposaient les Juifs et les Samaritains, Jésus apporte une réponse claire. La question est de savoir où faut-il adorer Dieu ? Sur la montagne de Samarie ou à Jérusalem ? Inquiétude de la Samaritaine et conception idéologique de son peuple. La réponse est la suivante : « Crois-moi, femme dit Jésus : l’heure vient où ce n’est ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père. Mais l’heure vient et c‘est maintenant où les véritables adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité » (Jn 4, 21.23). Avec cette réponse de Jésus, l’inquiétude est tombée. La vérité s’annonce chez la femme. Et par là, toutes les vaines discussions doctrinales. Car désormais l’unité se trouve en Jésus, le messie retrouvé par la femme. Puisque Jésus s’est dévoilé comme le « Messie » en Jn 4, 26.

Avec cette rencontre, Jésus a détruit le mur de différences qui existait entre Juifs et Samaritains. Au-delà des incompréhensions, il faut s’unir en Jésus pour aboutir au Père ; véritable source de toute l’humanité. C’est un véritable exemple dans le dialogue interreligieux de notre temps, que la Bible nous a révélé et nous propose encore aujourd’hui. Connaissant bien le cœur de l’homme, il brave les rancœurs et ouvre une issue pour le dialogue. Car la femme s’écria, venez voir celui qui m’a dit tout ce que je faisais, n’est-il pas le messie ? Elle commença aussitôt à témoigner de toutes ses forces. A sa suite nous avons st Paul et autres…

4.2- Saint Paul, Apôtre des gentils

Autrement appelé apôtre des nations, c’est lui qui a émigré l’Evangile au-delà des frontières juives. Saint Paul a cherché l’homme, et non le peuple. Car pour lui le salut concerne tout homme. Ses voyages et ses lettres ont largement contribué à cette mission. Car dit-il : « En Jésus Christ, il n’y a plus d’étrangers ni d’esclaves ni d’homme libre. Tous nous sommes sauvés par le Christ » (Col 3, 11). Il s’est efforcé donc de ne pas cherché son propre intérêt, mais celui du plus grand nombre afin qu’ils soient sauvés (1Co 10, 32). Voilà pourquoi il dit dans sa lettre aux Colossiens chapitre 1, 29 : « C’est bien pour cette cause que je me fatigue à lutter avec son énergie qui agit en moi avec puissance. » Paul se met au service des païens par la foi et pour leur faire découvrir le salut promis à tous.

En terme de dialogue interreligieux, Saint Paul a bien compris que le Christ ne l’a pas envoyé baptiser, mais annoncer l’Evangile (1 Co 1, 17). Par cette phrase St Paul n’entend pas faire de tous ces peuples païens, des chrétiens catholiques, mais il s’agit de témoigner par sa vie et ses actes, la vie du christ, parmi eux. C’est ce qu’il a fait aussi par toutes ses lettres et par ses voyages : il a sillonné les mers du Proche-Orient, l’Europe, jusqu’à atteindre Rome où il a prêché le Christ par sa parole et sa vie. Sa vie et sa prédication furent totalement dédiées à faire connaître et aimer Jésus, car en lui tous les peuples sont appelés à devenir un seul peuple. Il partit d’Antioche où l’Evangile fut annoncé à des populations n’appartenant pas au Judaïsme et où les disciples furent appelés pour la première fois « chrétiens » (Ac 11, 20-26).

Cet amour du Christ a poussé l’apôtre des gentils à faire un avec ceux qui sont différents de lui : Juifs avec les Juifs et païens avec les païens. Beaucoup de témoins de notre temps ont fait son éloge.

A propos de St Paul, le Pape Benoît XVI disait en ces termes : « L’apôtre Paul se prodigua sans réserve, afin que l’Evangile qui est ‘’ une force de Dieu ‘’ pour le salut de tout homme qui croit, du Juif d’abord, puis du Grec (Rm 1, 16), fut annoncé à tous sans distinction de nationalité et de culture. C’est pourquoi, plus que jamais aujourd’hui, le message du salut doit être proposé avec la même attitude que l’Apôtre des nations, en tenant compte des différentes situations sociales et culturelles… »[42]. Pour lui encore, St Paul doit être une voie et une indication pour le continent Africain avec ses différentes langues, cultures et l’émergence des nouveaux mouvements religieux multiformes.

Le père Hervé GIRAUD, vicaire à la Paroisse saint Eustache à Paris en France disait aussi de saint Paul ceci : « Entre sa ville natale Tarse, de culture gréco-romaine, et sa ville d’études de Jérusalem, de culture juive, Paul a consacré sa vie, éclatante synthèse de la recherche de l’unité grecque et de la filiation juive tout à la fois…La diversité n’est donc pas un problème pour l’unité à laquelle le Christ nous fait tendre. L’origine plurielle de l’Eglise est clairement attestée par ses grands témoins ».[43]

Beaucoup de congrégations à caractère local, original ou autochtone l’ont pris comme Saint patron grâce à son esprit migrateur des cultures.

Autres exemples

1-L’apôtre saint Pierre a été un pilier du dialogue interreligieux, dans le milieu juif surtout ; en proclamant l’universalité du salut apporté en Jésus Christ, car dit-il « Le Dieu de nos pères à ressuscité ce Jésus que vous avez fait mourir…afin d’accorder par lui à Israël la repentance et la rémission des péchés » Ac 30, 31. Il a été acteur principal de l’annonce de l’Evangile et porte- parole des Apôtres. Il est allé jusqu’à mourir martyr pour cette cause. Ainsi nous découvrons l’influence de saint Pierre dans le but de ramener tous les hommes vers le salut dans les actes des Apôtres et dans ses épîtres.

2-Le prophète Jérémie est une des figures du Christ dans l’Ancien Testament. Sa vie n’a pas été du tout aisée. Car dans sa vie de prophète, il a rencontré les oppositions, les contrastes, les persécutions, les brimades pour l’annonce de la Parole de Dieu qui est source de salut, de l’unité et de paix. Il a tenu tête aux pouvoirs établis de son temps, pour provoquer et encourager à la conversion du cœur, au changement de vie et de mentalité. En (Jr 1, 10), il se montre comme envoyé « pour arracher et renverser, pour exterminer et démolir ». Comme pour ramener tout le peuple à Dieu, en dévoilant surtout les rapports intimes que l’âme doit avoir avec Dieu. Toute sa vie a été une lutte pour réconcilier le peuple de son temps avec Dieu (cela n’a pas été facile en termes d’ouverture et de respect). C’est un véritable exemple de dialogue interreligieux à la suite de Jésus que nous avons présenté ci-haut.

2-Dans Nombre 22

Nous voyons l’effet des oracles de Balaam, ce prophète païen qui prophétisa contre le peuple de Moab explique un indice de dialogue. Car l’Esprit Saint souffle partout et au-delà des limites reconnues du peuple de Dieu. L’Esprit ici invite plutôt à l’unité que la destruction. Il prophétise contre son peuple au lieu de maudire le peuple d’Israël sur recommandation de son roi ; même indépendamment de sa volonté.

 

Conclusion

Aujourd’hui plus que jamais, l’Eglise catholique promeut le dialogue interreligieux avec un ton renouvelé et pacifié qui est un signe d’ouverture au prochain qui qu’il soit et indifféremment de ses croyances. L’heure n’est plus au débat houleux incriminant l’un ou l’autre, mais plutôt à la main tendue et pour cause, il y a des raisons fondamentales qui poussent à l’unité tout au niveau anthropologique, philosophique que religieux. De fait, il y a une vérité objective qui requiert le consentement universel. Cependant, par-dessus tout, c’est de la volonté même de Dieu que tous soient un parce que tous créés à son unique et même image, les hommes disposent de surcroît des mêmes aptitudes spirituelles liées à leur nature propre, pour parvenir à la vision béatifique qui est leur destinée à tous.

 

5- Les principaux documents du magistère sur le dialogue interreligieux

Introduction

Le dialogue est une marque caractéristique de la nature humaine. Dans le cadre du dialogue interreligieux, le dialogue  est une rencontre de personnes  visant à connaître à comprendre leur traditions religieuses respectives afin trouver des terrains de collaboration pour la promotion de l’unité, de la  paix dans un monde de plus en plus pluraliste.

Pour l’Eglise, il apparaît comme une marque essentielle de son identité lorsqu’elle se définit comme sacrement, c’est-à-dire comme signe et instrument de l’union intime avec Dieu et de tout le genre humain (LG1, 9)

Dans notre exposé, il s’agira de présenter ce thème sur  la base des principaux documents du  Magistère, d’en donner  quelques enseignements  et faire voir quelques implications pratiques dans la vie de nos Eglises locales.

5.1- Les documents conciliaires

De  tous les Conciles qu’a connus l’Eglise, le Concile Vatican II est le seul à mettre ouvertement en exergue la question de dialogue interreligieux. En effet, cinq documents conciliaires à savoir : Lumen Gentium, Nostra Aetate, Dignitatis Humanae, Ad Gentes et Gaudium et Spes nous illustreront davantage sur la position de l’Eglise vis-à-vis des autres religions.

LUMEN GENTIUM :

C’est précisément le numéro 16 qui s’est appesanti sur la question du dialogue.

a-Relation avec les peuples de tradition religieuse différente et les chrétiens

-Pour ceux qui n’ont pas encore reçu l’Evangile, sous des formes diverses, eux aussi sont ordonnés au peuple de Dieu. C’est le cas des Juifs : Ils sont les plus proches car ils sont le peuple qui « reçut les Alliances et les promesses et dont le Christ est né selon la chair »

-Les Musulmans : le destin de salut enveloppe également ceux que reconnaissent le Créateur, en tout premier  lieu les musulmans qui professent  avoir la foi d’Abraham, adorent avec nous le Dieu unique miséricordieux, futur juge des hommes au dernier jour.

-Enfin, même ceux des autres, qui cherchent encore dans les ombres sous des images un Dieu qu’ils ignorent, de ceux-là même, Dieu n’est pas loin, puisque c’est lui qui donne à tous vie, souffle et toutes les choses (Actes 17,25), et puisqu’il veut, comme Sauveur amener tous les hommes au salut (1Tm2, 4).

b- Le salut des non Chrétiens

Le salut de Dieu s’étend à :

-Ceux qui, sans qu’il y ait de leur faute, ignorent l’Evangile du Christ et son Eglise, mais cherchent pourtant Dieu d’un cœur sincère et s’efforce, sous l’influence de sa grâce, d’agir de façon à accomplir sa volonté telle que leur conscience la leur révèle et la leur dicte.

-Ceux –là même qui, sans faute de leur part, ne sont pas encore parvenus à une connaissance expresse de Dieu, mais travaillent, non sans la grâce divine, à avoir une vie droite.

NOSTRA AETATE

Aujourd’hui, l’Eglise examine ce qu’ont en commun les différents peuples, dont l’origine et la fin dernière sont les mêmes pour tous. Elle est particulièrement aux religions à travers lesquelles ces peuples cherchent des réponses aux énigmes de l’existence  humaine. L’Eglise reconnait ce qui est vrai et saint dans ces religions et exhorte ses fidèles à entrer en dialogue ceux qui y appartiennent tout en témoignant de leur propre foi chrétienne. En effet, chacune de ces religions (les religions traditionnelles, l’hindouisme, le Bouddhisme, l’islam et le judaïsme), attire, à sa manière, l’attention sur l’un ou l’autre aspect de la quête spirituelle de l’homme, du Mystère insondable qui habite tout être ou encore de l’histoire du salut qui englobe toute l’humanité.

 

DIGNITATIS  HUMANAE

Le Concile déclare que tout homme a droit à la liberté religieuse. A cet effet :

-Tous les êtres humains doivent jouir de l’immunité à l’égard de toute contrainte extérieure.

-Aussi tous les hommes sont-ils libres et responsables. Ceci dit, le soin de veiller au droit, à la liberté religieuse incombe tant aux citoyens qu’aux groupes sociaux, aux pouvoirs civils, à l’Eglise et aux autres communautés religieuses, de la manière propre à chacun, en fonction ses devoirs et envers le bien c commun. (n°6)

-Enfin, éviter surtout le prosélytisme qui est indigne de la dignité humaine en ce sens que dans la proposition de la foi et de l’introduction des pratiques religieuses, on doit toujours s’abstenir de toute forme d’agissement ayant un relent de coercition, de persuasion malhonnête ou simplement loyaux, surtout s’il s’agit des gens sans culture ou sans ressources (n°4).

 

AD GENTES

-Le dessein universel de Dieu (pour le salut) est que « tous les hommes soient sauvés et parviennent la connaissance de la vérité »1tm2, 4 : « Bien que Dieu puisse par des voies connues de lui, amener à la foi sans laquelle il est impossible de plaire à Dieu (He 11,6) des hommes qui, sans faute de leur part, ignorent l’Evangile, la nécessité incombe, cependant  à l’Eglise et en même temps elle en a le droit sacré d’évangéliser, et par conséquent son activité missionnaire garde dans leur intégrité, aujourd’hui comme toujours, sa force et sa nécessité.(n° 7)

-Témoigner le Christ : « l’Eglise, enfin de pouvoir présenter à tous le mystère du salut et la vie apportée par Dieu, doit s’insérer dans tous ces groupes humains du même mouvement dont le Christ, lui-même, par son Incarnation, s’est lié aux conditions sociales et cultures déterminées  des hommes avec lesquels il a vécu.(n° 10)

GAUDIUM ET SPES

L’Eglise, envoyée à tous les peuples de tous les temps et de tous les lieux, n’est liée d’une manière exclusive et indissoluble à aucune race ou nation, à aucun genre de vie particulier aucune coutume ancienne ou récente (n° 53 paragraphe3).

-Il appartient à l’Eglise de fonder et d’élever tout ce qui se trouve vrai de bon, de beau dans la communauté humaine, renforce la paix entre les hommes pour la gloire de Dieu (n° 76 paragraphe6).

 

5.2- Les documents pontificaux

La liste des documents pontificaux portant sur le dialogue interreligieux est assez longue. Bien de papes ont abordé ce sujet, certains d’une manière propre et explicite, tandis qu’il faudrait chez d’autres, un regard averti pour déceler les allusions à ce propos. Nous allons ici, dans un premier temps, énumérer la plupart de ces documents en respectant la chronologie; puis dans un second mouvement,  nous présenterons succinctement les plus importants.

 

5.2.1- Liste chronologique des documents

  • Léon XIII, let. apost. Proeclara gratulationis, 20 juin 1894
  •  Léon XIII, encyc. Satis cognitum, 29 juin 1896
  • Léon XIII, encyc. Caritatis studium, 25 juillet 1898
  • Grégoire VII, Lettres III, 21 à Anazir (Al-Nasir) roi de Mauritanie, 1920 [sur le dialogue avec les musulmans]
  • Pie XI, encyc. Ecclesiam Dei, 12 novembre 1924,
  • Pie XI, encyc. Rerum orientalium, 8 septembre 1928
  • Pie XII, message radiophonique Nell’abba, 24 décembre 1941
  • Pie XII, encyc.Orientalis ecclesiae, 9 avril 1944
  • Pie XII, encyc. Fulgens corona, 8 septembre 1953
  • Paul VI, encyc. Ecclesiam suam, 6 août 1964
  • Paul VI, const. Regimi ecclesiae, 15 août 1967
  • Paul VI, exhort. apost. Evangelii nuntiandi, 8 décembre 1975
  • Jean Paul II, encyc. Redemptor hominis, 4 mars 1979
  • Jean Paul II, exhort. apost. post syn. Christifideles laici,

30 décembre 1988

  • Jean Paul II, encyc. Redemptoris missio, 7 décembre 1990
  • Jean Paul II, exhhort. apost. Ecclesia in Africa, 14 septembre 1995
  • Benoît XVI, discours aux représentants des Eglises et Communautés Chrétiennes, et aux autres traditions religieuses, 25 avril 2005

 

5.2.2- Présentation des documents importants

 

  • ECCLESIAM SUAM

Paul VI, encyc. Ecclesiam suam, 6 août 1964

L’encyclique Ecclesiam suam est considérée comme le document fondateur du dialogue interreligieux : la « Magna Charta ».

Par l’Ecclesiam suam, le pape Paul VI fait  entrer l’Eglise en dialogue avec les diverses croyances et incroyances.

Voulant engager le dialogue avec les diverses croyances et incroyances y compris le marxisme, Paul VI les imagine comme une série de cercles autour de lui pris comme centre, et formule plusieurs propositions de conversations. (…)

Les adorateurs du vrai Dieu, fils, dignes de notre affectueux respect, du peuple hébreu, fidèles à la religion que nous nommons de l'Ancien Testament. Ensuite, les adorateurs de Dieu selon la conception de la religion monothéiste - musulmane en particulier - qui méritent admiration pour ce qu'il y a de vrai et de bon dans leur culte de Dieu ; et puis encore... les fidèles des grandes religions afro-asiatiques. Envers ces peuples, le Pape adopte des principes de conduite fort clairs, mais tout aussi nouveaux. Il reconnaît avec respect ce qu'elles ont de vrai et de bon, il accepte de contracter avec ces multitudes une sorte d'entente pour promouvoir et défendre les idéaux que nous pouvons avoir en commun, dans le domaine de la liberté religieuse, de la fraternité humaine, de la saine culture, de la bienfaisance sociale et de l'ordre civil... Voilà donc bien l'offre d'une coopération positive à buts humanitaires et celle d'un dialogue, plus lointain, sur la vérité religieuse...

Dans ses numéros 58-91 et 107-108, l’encyclique définit certaines caractéristiques du dialogue :

­          respect de la liberté et de la dignité de l’homme

­          clarté d’expression et de langage

­          humilité dans les prises de positions

­          vérité et prudence

­          bon pour l’amitié et, particulièrement, pour le service

 

  • EVANGELII NUNTIANDI

Paul VI, exhort. apost. Evangelii nuntiandi, 8 décembre 1975

L’Evangile est à annoncer à tous les hommes de partout et de toute culture, et l’Eglise porte cette responsabilité : voilà ce qu’exprime le pape Paul VI.  Aussi l’Evangile doit-il allé à la rencontre des autres religions : annoncer l’Evangile, c’est dialoguer avec nos frères d’autres croyances ! Le lien que le pape met entre dialogue interreligieux et Evangile est assez explicite dans le numéro 53 de l’encyclique :

53. Elle [la première annonce] s’adresse aussi à d’immenses portions d’humanité qui pratiquent des religions non chrétiennes que l’Eglise respecte et estime, car elles sont l’expression vivante de l’âme de vastes groupes humains. Elles portent en elles l’écho de millénaires de recherche de Dieu, recherche incomplète mais réalisée souvent avec sincérité et droiture de cœur. Elles possèdent un patrimoine impressionnant de textes profondément religieux. Elles ont appris à des générations de personnes à prier. Elles sont toutes parsemées d’innombrables “ semences du Verbe ” et peuvent constituer une authentique “ préparation évangélique ”, pour reprendre un mot heureux du Concile Vatican II emprunté à Eusèbe de Césarée.

Une telle situation suscite, certes, des questions complexes et délicates, qu’il convient d’étudier à la lumière de la Tradition chrétienne et du Magistère de l’Eglise pour offrir aux missionnaires d’aujourd’hui et de demain de nouveaux horizons dans leurs contacts avec les religions non chrétiennes. Nous voulons relever surtout aujourd’hui que ni le respect et l’estime envers ces religions, ni la complexité des questions soulevées ne sont pour l’Eglise une invitation à taire devant les non chrétiens l’annonce de Jésus-Christ. Au contraire, elle pense que ces multitudes ont le droit de connaître la richesse du mystère du Christ dans laquelle nous croyons que toute l’humanité peut trouver, dans une plénitude insoupçonnable, tout ce qu’elle cherche à tâtons au sujet de Dieu, de l’homme et de son destin, de la vie et de la mort, de la vérité. Même devant les expressions religieuses naturelles les plus dignes d’estime, l’Eglise s’appuie donc sur le fait que la religion de Jésus, qu’elle annonce à travers l’évangélisation, met objectivement l’homme en rapport avec le plan de Dieu, avec sa présence vivante, avec son action ; elle fait rencontrer ainsi le mystère de la Paternité divine qui se penche vers l’humanité ; en d’autres termes, notre religion instaure effectivement avec Dieu un rapport authentique et vivant que les autres religions ne réussissent pas à établir, bien qu’elles tiennent pour ainsi dire leurs bras tendus vers le ciel.

C’est pourquoi l’Eglise garde vivant son élan missionnaire, et même elle veut l’intensifier dans le moment historique qui est le nôtre. Elle se sent responsable devant des peuples entiers. Elle n’a pas de repos tant qu’elle n’a pas fait de son mieux pour proclamer la Bonne Nouvelle de Jésus Sauveur. Elle prépare toujours de nouvelles générations d’apôtres. Constatons-le avec joie au moment où ne manquent pas ceux qui pensent et même disent que l’ardeur et l’élan apostolique se sont épuisés, et que l’heure de l’envoi missionnaire est désormais passée. Le Synode vient de répondre que l’annonce missionnaire ne tarit pas et que l’Eglise sera toujours tendue vers l’accomplissement de celle-ci.

 

  • REDEMPTORIS MISSIO

 

Jean Paul II, encyc. Redemptoris missio, 7 décembre 1990

Dans cette encyclique, le pape présente le dialogue avec les frères d’autres religions comme une des voies de la mission, notamment au n° 55 à 57, dont nous reportons ici des extraits.

N° 55 Le dialogue interreligieux fait partie de la mission évangélisatrice de l'Eglise. Entendu comme méthode et comme moyen en vue d'une connaissance et d'un enrichissement réciproques, il ne s'oppose pas à la mission ad gentes, au contraire il lui est spécialement lié et il en est une expression. (…) Dieu appelle à lui toutes les nations dans le Christ, il veut leur communiquer la plénitude de sa révélation et de son amour, il ne manque pas non plus de manifester sa présence de beaucoup de manières, non seulement aux individus mais encore aux peuples, par leurs richesses spirituelles dont les religions sont une expression principale et essentielle, bien qu'elles comportent "des lacunes, des insuffisances et des erreurs". (…)

J'ai écrit récemment aux évêques d'Asie: "Bien que l'Eglise reconnaisse volontiers tout ce qui est vrai et saint dans les traditions religieuses du bouddhisme, de l'hindouisme et de l'islam, comme un reflet de la vérité qui éclaire tous les hommes, cela ne diminue pas son devoir et sa détermination de proclamer sans hésitation Jésus Christ qui est "la Voie, la Vérité et la Vie" (...). Le fait que les adeptes d'autres religions puissent recevoir la grâce de Dieu et être sauvés par le Christ en dehors des moyens ordinaires qu'il a institués n'annule donc pas l'appel à la foi et au baptême que Dieu veut pour tous les peuples".( …)  

N° 56 Le dialogue n'est pas la conséquence d'une stratégie ou d'un intérêt, mais c'est une activité qui a ses motivations, ses exigences et sa dignité propres: il est demandé par le profond respect qu'on doit avoir envers tout ce que l'Esprit, qui "souffle ou il veut", a opéré en l'homme. (…) Les autres religions constituent un défi positif pour l'Eglise d'aujourd'hui; en effet, elles l'incitent à découvrir et à reconnaître les signes de la présence du Christ et de l'action de l'Esprit, et aussi à approfondir son identité et à témoigner de l'intégrité de la Révélation dont elle est dépositaire pour le bien de tous.

N° 57

(…)Tous les fidèles et toutes les communautés chrétiennes sont appelés à pratiquer le dialogue, même si ce n'est pas au même niveau et sous des modalités identiques.
Pour ce dialogue, la contribution des laïcs est indispensable: "Par l'exemple de leur vie et par leur action, les fidèles laïcs peuvent améliorer les rapports entre les adeptes des différentes religions", et, de plus, certains d'entre eux seront en mesure de contribuer à la recherche et à l'étude. (…)

 

  • CHRISTIFIDELES LAICI

 

Jean Paul II, exhort. apost. post syn. Christifideles laici,

 30 décembre 1988

 

L’exhortation apostolique post synodale Christifideles laici est surtout un rendez-vous avec les laïcs, que le Souverain Pontife invite incessamment à l’ouverture, à l’acceptation et au respect des adeptes des différentes religions.

N° 35  Par l'exemple de leur vie et par leur action, les fidèles laïcs peuvent améliorer les rapports entre les adeptes des différentes religions, comme l'ont noté fort à propos les Pères du Synode: "Aujourd'hui l'Eglise vit partout au milieu d'hommes pratiquant des religions différentes ... Tous les fidèles, spécialement les laïcs qui vivent au milieu de peuples d'autres religions, que ce soit leur pays d'origine ou un pays où ils ont émigré, ces laïcs devront être pour les habitants de ces pays un signe du Seigneur et de son Eglise, d'une façon adaptée aux circonstances de vie de chaque pays. Le dialogue entre les religions est de toute première importance parce qu'il conduit à l'amour et au respect réciproque; il efface ou tout au moins atténue les préjugés entre les adeptes des diverses religions et promeut l'unité et l'amitié entre les peuples".

 

  • ECCLESIA IN AFRICA

Jean Paul II, exhhort. apost. Ecclesia in Africa, 14 septembre 1995

C’est le résultat-projet sorti du premier synode des évêques pour l’Afrique. Jean Paul II, à la suite des constats et propositions des pères synodaux, revient sur le dialogue interreligieux pris et analysé dans une perspective contextuellement africaine. Le dialogue entre le catholicisme et notamment la Religion Traditionnelle Africaine, se révèle nécessaire pour le processus d’inculturation. Quelques numéros d’Ecclesia in Africa sur le dialogue:

 65. " L'attitude de dialogue est le mode d'être du chrétien à l'intérieur de sa communauté comme avec les autres croyants, et les hommes et les femmes de bonne volonté ". Le dialogue se pratiquera d’abord au sein même de l'Église Famille, (…)

" Unis au Christ dans leur témoignage en Afrique, les catholiques sont invités à développer un dialogue œcuménique avec tous les frères baptisés des autres confessions chrétiennes, (…)

66. " Cet effort de dialogue se doit d'embrasser également les musulmans de bonne volonté. Les chrétiens ne sauraient oublier que beaucoup de musulmans entendent imiter la foi d'Abraham et vivre les exigences du Décalogue ".(…) On veillera donc particulièrement à ce que le dialogue islamo-chrétien respecte de part et d'autre l'exercice de la liberté religieuse avec tout ce qu'elle comporte, notamment les manifestations extérieures et publiques de la foi. Chrétiens et musulmans sont appelés à promouvoir un dialogue exempt de tous les dangers qu'entraînent un irénisme de mauvais aloi ou un fondamentalisme militant, et de s'élever contre des politiques et des pratiques déloyales, ainsi que contre tout manque de réciprocité en matière de liberté religieuse.

67. En ce qui concerne la religion traditionnelle africaine, un dialogue serein et prudent pourra, d'une part préserver d'influences négatives qui affectent la manière de vivre de nombreux catholiques, et, d'autre part, permettre l'assimilation de valeurs positives, telles que la croyance en un Être Suprême, Éternel, Créateur, Providence et juste Juge, qui s'harmonisent avec le contenu de la foi. Ces valeurs peuvent être considérées comme une préparation évangélique, car elles comprennent de précieuses semences du Verbe, qui sont susceptibles de conduire, comme elles l'ont déjà fait dans le passé, un grand nombre de personnes à " s'ouvrir à la plénitude de la Révélation en Jésus Christ à travers la proclamation de l'Évangile ".

 Aussi faut-il traiter avec beaucoup de respect et d'estime les adeptes de la religion traditionnelle, en évitant tout langage inadéquat et irrespectueux. À cet effet, les enseignements qui conviennent seront donnés dans les maisons de formation sacerdotales et religieuses sur la religion traditionnelle.

 

Bien de papes ont très tôt compris que les religions non chrétiennes portent en elles des valeurs incontestables, œuvres certaines de l’Esprit de vérité. Toutefois, rien ne peut égaler la vérité absolue de la révélation divine réalisée en Jésus Christ. C’est pourquoi il incombe à l’Eglise d’entrer en dialogue avec les autres croyances religieuses, pour partager avec elles la Bonne Nouvelle du Christ, dans une attitude de respect sans compromission et d’humilité sans laxisme ; pour s’enrichir de leurs expériences et richesses, et aussi pour œuvrer ensemble à la construction d’une humanité solidaire, heureuse et épanouie.

5.3. Les documents dictatoriaux sur le dialogue interreligieux

Le conseil pontifical pour le dialogue interreligieux est un dicastère de la curie romaine. Il a été érigé par le pape Paul VI le 19 mai 1964 en tant que secrétariat pour les non  chrétiens. Son président actuel est le cardinal Jean Louis TAURAN. Dans l’exercice de sa mission ce dicastère fait sortir des documents. Nous allons dans un premier temps donné la liste des documents de ce  dicastères que nous avons pu repérer et après nous procéderons à l’étude sommaire de certains d’entre ces documents.

5.3.1  Liste des documents dictatoriaux sur le dialogue interreligieux

*Attitude de l’Eglise Catholique devant les croyants des autres religions. Pentecôte 1984

* Dialogue et annonce réflexions et orientations concernant le dialogue interreligieux et annonce de l’évangile de Jésus Christ. Pentecôte 1991

*Signification du dialogue interreligieux une perspective catholique. Ouagadougou octobre    2005

*Dialogue interreligieux dans l’enseignement officiel de l’Eglise catholique (1963-1997) 1998

*Cheminer ensemble. L’Eglise Catholique en dialogue avec les traditions religieuses du monde. 1999

*Celebrare la pentecôte 2000

*Un guide d’enseignement de la religion tradition africaine ; de l’islam ; du dialogue interreligieux 2004

*Les messages du conseil pontifical pour le dialogue interreligieux aux musulmans, aux hindous et aux bouddhistes à l’occasion de leurs fêtes religieuses

5.3.2 Etude de quelques documents.                                                                 

Document 1 Attitude de l’Eglise catholique devant les croyants des autres religions. Pentecôte 1984.

Ce document déclare que la mission évangélisatrice de l’Eglise est une réalité unitaire mais complexe et articulée. Il en indique les éléments principaux : présence et témoignage ; engagement  pour la promotion sociale et libération de l’homme ; vie liturgique ; prière et contemplation ; dialogue interreligieux ; et finalement annonce et catéchèse.

Document 2  Dialogue et annonce réflexions et orientations concernant le dialogue interreligieux et annonce de l’évangile de Jésus Christ. Pentecôte 1991 présenté par son Eminence le cardinal ARINZE,  Président du conseil pontifical pour le dialogue interreligieux et son Eminence le cardinal TOMKO, Préfet de la congrégation pour l’Evangélisation des peuples.

Le document comporte trois parties. La première partie traite du dialogue interreligieux. Elle esquisse l’attitude de l’Eglise envers les autres religions. La deuxième partie rappelle combien l’Eglise est consciente de la nécessité d’annoncer Jésus Christ au monde. La troisième partie réfléchie sur la relation entre l’annonce et le dialogue. On voit qu’ils sont liés mais non interchangeables. La conclusion attire l’attention sur les limites du document.

Document 3 Signification du dialogue interreligieux une perspective catholique.

Ce document est présenté par Mgr Chidi Denis Isizoh pour le compte du conseil pontifical pour le dialogue interreligieux.  Avant de donner la signification générale du dialogue interreligieux et les raisons pour lesquelles l’Eglises Catholique le promeut, le document a montré que les relations entre les catholiques et les adeptes des autres religions ne sont pas nouvelles.  En suite le document précise les bases théologiques du dialogue interreligieux, ses formes, ses caractéristiques, les dangers et les obstacles. Pour finir le document donne comment l’Eglise voit les autres religions et les affirmations des derniers Papes à propos du dialogue interreligieux.

Document 4 Un guide d’enseignement de la Religion Traditionnelle Africaine, de l’islam et du dialogue interreligieux dans les grands séminaires catholique, des maisons de formation religieuses et les institues d’enseignement supérieur en Afrique subsaharienne.

Ce document donne les directives nécessaires pour les travaux de recherches sur le dialogue interreligieux, l’Islam et la Religion Traditionnelle Africaine.

Document 5  Message du Cardinal Francis ARINZE aux hindous.

A l’occasion de la fête hindoue de diwali, qui s’est déroulée le 27 octobre 2000, le cardinal Francis ARINZE, président du conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, a adressé un message aux hindous du monde entier. Il montre que cette fête constitue un temps particulier pour réfléchir sur le but le plus profond et ultime de notre vie. Il souligne qu’il est convaincu que l’Eglise catholique qui fête cette année le deux millième anniversaire de Jésus Christ notre sauveur, pourra ensemble avec l’hindou accomplir beaucoup de bien pour le monde. Les deux traditions religieuses, hindou et chrétienne chacune selon ses enseignements distincts, accorde la plus haute place dans la vie humaine au mystère de Dieu. Il souhaite que hindous et chrétiens puissent devenir des exemples concrets, et une preuve de l’harmonie et de la paix pour nombreuses autres personnes en inde et ailleurs. Il souligne qu’au cours des derniers  voyages en inde du Pape Jean Paul II, ce dernier nous a  rappelé une fois de plus que « l’Eglise catholique instaure de façon toujours plus intense le dialogue avec les religions du monde. Elle considère  que dialogue est acte d’amour qui puise ses racine dans Dieu  lui-même.

Document 6 Eduquer au dialogue, un devoir des chrétiens et musulmans : A l’occasion de la fête du ramadan « ID AL –FITR », le cardinal Francis Arinze a adressé un message  à tous  les musulmans le 15 décembre 2000.

Aux amis musulmans le cardinal présente ses meilleurs vœux pour  ID AL FITR.  Il montre qu’à travers des aspects et des modalités qui sont propres, leurs jeunes relèvent d’une pratique qui est commune au christianisme et d’autres religions. Ce mois est donc un temps propice pour nous rappeler, chrétiens et musulmans les «liens spirituels qui nous unissent », selon les paroles du pape Jean Paul.

Document 7 Bouddhistes et chrétiens développer ensemble une culture du dialogue. Message du cardinal Francis Arinze à l’occasion de la fête de Vesach 2001. 

Le cardinal présente ses vœux à tous les bouddhistes et souligne que l’année 2001 à été proclamé par les nations unis « année internationale du dialogue entre les civilisations », ce qui offre ajoute  t-il une occasion de réfléchir sur les fondements du dialogue, sur ses conséquences et sur les fruits que l’humanité peut récolter.

Document 8 Chrétiens et musulmans doivent œuvrer ensemble pour la paix. Message de Mgr MICHAEL L.F.président du conseil pontifical pour le dialogue interreligieux à la l’occasion de la fêté de Ramadan 2002.

Le président a rappelé  la recommandation du pape Jean Paul II le 24 janvier 2002 à Assise  au cours de la journée de prière pour la paix. Le pape avait souligné de ne pas laisser  s’éteindre la flamme de l’espérance. il précise qu’afin d’obtenir la paix et de la conserver, les religions ont à jouer un rôle important que, de nos jours et plus que jamais la société civile et les gouvernants des Etats leur reconnaissent.

Document 9 Chrétiens et hindous engagés en faveur d’un développement humain intégral. Message du cardinale Tauran Jean Louis président du conseil pontifical pour le dialogue interreligieux aux hindous à la l’occasion de la fête de Diwali 2009.

Le cardinal en souhaitant joyeux Diwali aux hindous à souligné que les fêtes religieuses nous contentent de vivifier à nouveau notre rapport avec Dieu mais aussi les uns avec les autres. Il évoque la nécessité d’œuvrer ensemble au développement humain intégrale.

D’une manière générale le conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, à travers ses divers documents que nous venons de présenter encourage le dialogue interreligieux, évoque ses raison et mentionne sa nécessité.   

5.4-Les documents épiscopaux

Le concile Vatican II a marqué une étape nouvelle dans les relations entre l’Eglise catholique et les croyants d’autres religions. Depuis la première encyclique de Paul VI, sus présentée Ecclesiam suam considérée comme la « magna charta » du dialogue dans ces différentes formes, l’Eglise ne cesse jusqu’aujourd’hui, par ses méthodes de présence dans le monde, d’asseoir et d’encourager le dialogue à tous les niveaux. Le parcours des documents des évêques dans le monde nous en dit davantage.

A/ les documents de l’épiscopat africain

Nul n’ignore aujourd’hui l’impérieuse nécessité du dialogue aujourd’hui. Dans la collaboration à cette mission d’Eglise, nous ne pourrons nier le rôle des évêques africains. Cette contribution se situe non seulement au niveau des initiatives pastorales, mais surtout au niveau des documents de réflexion dans ce domaine.

1 : Les évêques d’Afrique parlent 1967-1992 Ed Centurion, France 1992, 445 pages

a)      Situation

Le document est présenté par trois auteurs :

-RP Maurice CHEZA, professeur à la faculté de théologie de l’universalité catholique de Louvain-la –Neuve, longtemps professeur au Grand Séminaire Interdiocésain de Lubumbashi (Zaïre)

-Henri DERROITTE, assistant à la faculté de théologie de Louvain-la-Neuve

-René LUNEAU, dominicain, enseignant à l’institut catholique de Paris, membre du groupe de sociologie des religions.

Il compte 5 chapitres, avec une annexe. C’est le troisième chapitre qui parle du dialogue interreligieux en Afrique (PP 205-250).

Ce document expose d’une manière condensée les réflexions des évêques africains sue le dialogue interreligieux  entre 1969-992.

b)     Contenu

Le contenu est divisé en 2parties. La réflexion théologique en première partie et la pratique ou terrain du dialogue en deuxième partie.

      Enjeu du dialogue interreligieux :

Cette réflexion théologique est concentrée sur quatre grands axes.

  • Depuis ‘’Nostra  aetate’’, l’Eglise se propose avoir une attitude positive envers les croyants d’autres traditions religieuses et spirituelles. En effet, l’engagement pour un dialogue authentique avec les croyants des autres religions est devenu un témoignage  et un des aspects centraux de la foi chrétienne : l’amour de Dieu pour tous les hommes. Nous reconnaissons alors le rôle du Saint Esprit qui souffle où il veut, poussant l’homme vers la pleine conscience de son devenir et de son salut.
  • L’engagement dans le dialogue est pour l’Eglise africaine une invitation sur son identité propre. Pour un vrai dialogue, chacun doit être fidèle à soi même. Cela signifie par le christianisme africain, en particulier poussé plus et avant tous ses recherches sur l’inculturation. L’inculturation est donc une condition nécessaire au dialogue car c’est sur le seul terrain de rencontre que l’Eglise peut affirmer sa foi sans complexe et en  pleine harmonie avec sa personnalité.
  • L’engagement africain au dialogue est une invitation à une double conclusion. D’abord, pour libérer les interlocuteurs des préjugés des uns à l’égard des autres, et ensuite pour mieux approfondir la richesse de son acte de foi. Chaque interlocuteur est donc renvoyé à sa propre tradition et à sa source de vie spirituelle.
  • L’engagement au dialogue est une invitation à la mission. Dans la recherche identitaire, l’Eglise en Afrique doit se laisser interpeler. Car, s’engager au dialogue, c’est s’engager avec les adhérents d’autres religions, à être attentifs aux problèmes actuels des populations, unies à tous les hommes de bonne volonté. Ainsi, tous apporteront leur contribution et leur originalité dans la construction d’un monde plus fraternel.

      Les occasions du dialogue en Afrique :

  • Dialogue avec la religion traditionnelle africaine :

Les évêques soutiennent désormais que l’Eglise doit renter en dialogue avec la R.T.A. Les chrétiens doivent pour cela libérer de nombreux préjugés sur le fétichisme, l’animisme et le culte des ancêtres. Qu’ils abordent la R.TA comme une réalité aux multiples facettes, mais à l’actualité vive. Ce dialogue invite la pastorale à présenter le message du salut d’une façon plus expressive.

  • Dialogue avec l’Islam

Les situations entre chrétiens et musulmans sont très contrastés selon les pays. Généralement, la coexistence ne va pas de soi. Sur le terrain de dialogue, on ne doit pas imposer une unité de façade. On ne doit ni imposer sa volonté ni s’interposer aux décisions communes. Pour que le dialogue ne devienne pas une juxtaposition de monologue, tout doit commencer par une prise de conscience véritable sur soi et un respect des différences et de l’autre.

  • Dialogue et les Nouveaux Mouvements Religieux

L’efflorescence des Nouveaux Mouvements Religieux (NMR) en Afrique, est une invitation à l’Eglise de discerner les appels contenus dans ces signes des temps et s’interroger sur les raisons de leur succès, surtout des mouvements religieux afro-chrétiens (Mahikari, Christianisme céleste, Eglises africaines indépendantes, Kimbanguisme) qui sont une interpellation directe à la pastorale. Il s’agit de :

ü  De promouvoir l’inculturation et approfondir la connaissance sur des richesses de la tradition culturelle africaine

ü  Voir comment la foi chrétienne peut être réponse aux questions fondamentales que posent les africains (vie, souffrance, mort…)

ü  Mettre en relief l’aspect concret de la foi chrétienne qui concerne l’homme entier, avec toutes ses dimensions

ü  Développer entre chrétiens les valeurs de justice, de paix, de fraternité, de solidarité et d’hospitalité

ü  Annoncer en paroles et en actes l’Evangile et prêter une attention privilégiée aux pauvres et aux exclus.

 

2)      Le premier synode des évêques d’Afrique 1990-2008

a-      Situation

Sur la question du dialogue, le premier synode des évêques d’Afrique, qui a abouti à l’exhortation Post-synodale du Pape Jean-Paul II ‘’Ecclesia in Africa’’ du 14 Septembre 1995, est dans la continuité du document : Les évêques d’Afrique vous parlent. Ce synode s’est déroulé au Cameroun du 08 Avril au 08 Mai 1994. Il a porté sur la mission de l’Eglise en Afrique et les perspectives d’avenir sur la mission évangélique contemporaine en Afrique (vers l’an 2000). Le travail de fond a été présenté  quatre ans plutôt dans les n°23 à 62  des linéamenta donnés à Lomé le 25 Juillet 1990. Les propositions à l’exception de 2 conférences en guerre (Rwanda et Burundi) sont recueillies dans l’instrumentum  Laboris  en 1993.

b-     Contenu

Le document présente l’attitude du dialogue comme le monde d’être des chrétiens à l’intérieur de sa communauté, envers les autres et les hommes de bonne volonté.

  • Dialogue avec les musulmans

Le dialogue embrassera tous les musulmans de bonne volonté. Les musulmans, en effet, entendent imiter la foi abrahamique et vivre les exigences du décalogue. A ce propos  le synode des évêques souligne que le Dieu vivant, créateur du ciel et de la terre et maître de l’histoire est le Père de la grande famille que nous formons. Et Dieu veut que nous témoignions de Lui en respectant les valeurs et les traditions religieuses propres à chacun. Chrétiens et musulmans doivent ensemble travailler pour la promotion humaine, le développement à tous les niveaux, le respect de la vie, de la justice et de la paix en Afrique.

  • Dialogue avec la Religion Traditionnelle Africaine

Les valeurs positives que comportent la RTA sont une préparation évangélique car comprenant les précieuses semences du verbe. Il faut alors un dialogue serein et prudent, traitant avec respect et estime les adeptes de la RTA. Il faut surtout éviter tout langage inadéquat et irrespectueux à leur endroit. A cet effet, les enseignements qui conviennent seront donnés dans les maisons de formation sacerdotale et religieuse sur la Religion Traditionnelle et Africaine.

3)      L’instrumentum Laboris (mars 2009) et le 2ème  Synode des évêques d’Afrique (du 04 au 25 Octobre à Rome)

 

a)      Situation

Quinze ans après ‘’Ecclesia in Africa’’ les évêques d’Afrique ce sont encore penchés sur la question du dialogue interreligieux. Le travail a commencé par la rédaction des linéamenta portant sur l’argument synodal le 27 Juin 2006. Ensuite de l’instrumentum Laboris parvenus des propositions des trente six conférences épiscopales et de deux églises orientales catholiques. Le thème du document est : l’Eglise en Afrique au service de la réconciliation, la justice et la paix ; « vous êtes le sel de la terre et la lumière du monde » (Mt 5,13).
On entend impatiemment l’exhortation post synodale incluant les nouvelles propositions des évêques et experts participants.

b)     Contenu

Le dialogue existe entre déjà en Afrique et se maintient. Il mérite d’être stimulé.

  • Dialogue avec la Religion Traditionnelle Africaine(RTA)

Le dialogue doit commencer par une étude systématique et sympathique de cette religion et de la culture qui en constitue la matrice. Cela permettra d’identifier les éléments bons et nobles que le christianisme peut adopter en purifiant, si possible, ceux qu’il juge incompatibles avec l’Evangile. La RTA constitue pour l’Eglise en Afrique un authentique patrimoine d’inculturation. Elle  est à distinguer des chauvinistes qui la défendent comme patrimoine national et  en font l’objet d’une fierté nationale alors que souvent, ils ne la pratiquent pas.

  • Dialogue avec l’Islam

Avec nos frères et sœurs musulmans, parfois la cohabitation est saine et bonne. Par contre en certains endroits la méfiance empêche un dialogue serein. Les difficultés sont par exemple le conflit de mariage mixte, l’intolérance de certains groupes islamiques qui engendrent les hostilités et entretient les préjugés. A ceci vient s’ajouter la tendance de politiser des appartenances religieuses dans certains pays. Toutefois, des efforts sont à louer. Parfois, les musulmans accueillent favorablement les documents des conférences épiscopales. Les structures de l’Eglise servent de cadre à des communautés musulmanes pour certaines de leurs activités. Il y a la coexistence pacifique, organisation des rencontres réflexion sur les problèmes de société dans certains milieux. Des facteurs de solidarité sont aussi à noter et à encourager parfois. A cela on peut ajouter aussi le respect de l’identité religieuse des enfants musulmans dans les écoles chrétiennes. Sur le terrain du dialogue islamo-chrétien en Afrique, nous devons mettre l’accent sur les valeurs positives pour  corriger les erreurs du passé et donner un nouveau souffle à l’avenir. 

4)      La conférence épiscopale du Togo (C.E.T.)

Des dix sept lettres pastorales des évêques du Togo depuis le 09 Avril 1967, aucune n’a abordé ouvertement la question du dialogue interreligieux. L’objectif général des lettres était d’interpeler tous les Togolais et tous les hommes et femmes de bonne volonté sur les  problèmes sociopolitiques du pays. Toutefois, on peut déceler  certaines formes ou traces de dialogue dans ces documents épiscopaux.

  • Les lettres sont ouvertes à tout le monde sans distinction ethnique, culturelle ou religieuse. Elles sont adressées à toutes les personnes de bonne volonté. C’est à  dire qu’elles ont un retentissement extra-chrétien.
  • D’autres confessions religieuses ce sont aussi jointes à la CET pour adresser des messages. On peut citer trois messages :

ü  Message des autorités religieuses du Togo sur la situation sociopolitique actuelle du pays, 11 Février 2005, 7 Avril et 25 Avril 2005, Lomé

ü  Message des autorités religieuses du Togo à la veille de la campagne pour l’élection présidentielle, 07 Avril 2005, Lomé

ü  Message après les élections du 25 Avril 2005, Lomé

Sur les questions politiques, il y a parfois des différences d’opinons entre catholiques et musulmans. Cependant, ils se trouvent souvent ensemble pour prier pour la paix au Togo. En ces derniers moments, les adeptes de Vaudou aussi intègrent peu à peu dans cette initiative commune. Nous avons encore en mémoire la journée de réflexion et de prière pour la situation sociopolitique du Togo du 13 Janvier 2010.

Au sein de la CET, c’est l’épiscopat de Sokodé (Mgr Ambroise Kotamba DJOLIBA, président de la Conférence), qui est chargé  du dialogue islamo- chrétien.

NB : Voir aussi Résumé des documents publiés par la conférence épiscopale du Togo, 1967-2005, présenté par l’Abbé  Alexandre ANIBRI, dans le journal le Gong n° 18,  L’engagement de l’Eglise au cœur du monde, PP 25 à 30.

 

5)      Autres textes : SCEAM et autre textes de l’épiscopat africain

Entre autres documents, nous présentons seulement

            Le défi du dialogue :   message de la 8ème assemblée plénière du SCEAM, à Lagos du 12 au 19 Juillet 1987.

Le document expose une réflexion sur l’avenir de la mission chrétienne sur le continent africain. Dans ce contexte, les évêques d’Afrique et du Madagascar voient dans le dialogue avec les autres un défi pour notre temps. Puisque nous croyons fermement à la liberté de tous en matière religieuse, nous acceptons le défi de chercher, d’établir et de maintenir de bonnes relations avec les adhérents d’autres religions, notamment l’Islam et la R.T.A. A cette recherche constante de dialogue fructueux de foi, de vie dans l’amour, dans la vérité et dans le respect mutuel, il est important qu’il y ait une réciprocité à ces gestes d’ouverture et de collaboration de la part des autres religions. Car malgré les différences, il y a beaucoup de choses à faire ensemble pour le progrès humain des peuples, pour la « santé physique et spirituelle de notre société » (cf. 1Cor 5,13).

Tout compte fait, le dialogue interreligieux est très vif sur le continent africain surtout à partit de l’an 2000. Selon les vœux du synode des évêques en 1994, il est intégré comme cours dans l’enseignement de la plupart des grands séminaires et des instituts religieux du continent avec les cours d’islamologie et de la Religion Traditionnelle Africaine (R.T.A) en supplément au cours de l’œcuménisme.

Sur le terrain de dialogue, l’Afrique a besoin de soutien. Parfois, les rivalités et les affrontements entre religions montrent qu’il y a encore du chemin à faire. La dernière en date est l’affrontement entre chrétien et musulmans à Jos au Nigéria. Ceci est un coup dur à l’avancé du dialogue interreligieux sur le continent. Le dialogue en Afrique n’aura d’avenir que dans l’acceptation et le respect des différences et des autres, dans la libération des préjugés hérités de la christianisation et de l’islamisation, dans la connaissance, la compréhension et l’acceptation de l’autre dans sa foi. 

 

B Les documents de l’épiscopat français et dans le monde

1) Le temps de la foi, temps d’espérance Ed. Centurion Paris 1979 (pp. 108 113)

a)      Situation

Ce document est présenté par P. Duprey, membre du secrétariat romain  pour l’unité des chrétiens à Lourdes en 1978 à l’assemblée plénière  de l’épiscopat  français. Le document comporte 191 pages. Le thème est : A propos du dialogue entre églises et religions

b)     Contenu

Dans le document le terme du dialogue est utilisé  dans son assertion globale. Le dialogue est toute démarche de l’Eglise d’aller à la rencontre de l’autre. Ainsi il ya  le dialogue œcuménique qui concerne les autres religions chrétiennes et le dialogue avec les non- chrétiens qui concerne le dialogue interreligieux.

L’engagement du dialogue tel exprimé solennellement par le concile Vatican II est irréversible. « il est nécessaire d’aller vers l’avant » disait le Pape Jean Paul II au début de son pontificat. Le Pape recevant les délégations  des autres religions venues à l’inauguration de son pontificat le 22 Octobre 1978 réitère cet engagement conciliaire irréversible de L’Eglise pour le dialogue interreligieux. En effet le Concile Vatican II est le  principe sur lequel se fonde tout l’engagement de L’Eglise pour le dialogue. Cette disponibilité de l’Eglise inclue donc un cheminement d’ensemble et de toute l’Eglise. C’est un dialogue à la fois intellectuel et spirituel qui nous engage à surmonter les difficultés héritées du passé, les polémiques et les malentendus inutiles qui nous écartent de l’essentiel. Il faut avoir une expérience du dialogue pour pouvoir juger et apprécier les fruits du dialogue. C’est un itinéraire courageux d’avenir ; un cheminement de toute l’Eglise catholique en communion avec les croyants des  autres religions. Cette question doit être la préoccupation première et primordiale des évêques et des responsables d’Eglises locales. Tout le monde doit s’y engager ardemment. On ne doit pas s’arrêter aux fruits d’une discussion entre responsables de religions. Le dialogue doit conduire tous et chacun à une évolution de mentalité. C’est à ce seul prix que nous pourrons aller vers l’avant comme le souhaite le Pape. Enfin dans ce domaine il faut de la prudence et de la sagesse. En plus et surtout il faut faire confiance à l’action du Saint Esprit qui souffle là où Il veut.

2) Documents des épiscopats dans le monde

Sans prétention de rentrer dans les détails des documents des évêques et des conférences épiscopales de part le monde entier, nous proposons seulement la documentation globale sur le condensé des travaux des évêques selon les continents

      Synode des évêques pour l’Amérique, 1997

      Synode des évêques pour l’Asie, 1998,

      Synode des évêques pour l’Océanie, 1998

 

DOCUMENTATION GENERALE ANNEXE POUR LES EVEQUES D’AFRIQUE CONCERNANT LE DIALOGUE

 

1)      Les fruits du Saint Esprit chez les peuples qui ne connaissent pas le Christ, Cardinal DUVAL, archevêque d’Alger, 1974.

2)      Conversion et dialogue avec les non-chrétiens. Mgr Yago Bernard, archevêque d’Abidjan, 1974.

3)      L’esprit qui doit présider au dialogue interreligieux. P. Sagnet J.M. Sidibé à la commission de la CREAO pour les religions africaines et syncrétistes, Yopougon, Novembre 1978.

4)      Pour un dialogue dans le respect et la liberté. Lettre de la conférence épiscopale régionale de l’Afrique du Nord, 04 Mai 1979

5)      Conversation et conversion, Mgr Sanon, 1985

6)      Pour une attention pastorale plus grande pour la religion traditionnelle, lettre du secrétariat pour les non-chrétiens, Rome, Avril 1998

7)      Le dialogue est-il possible avec la religion africaine traditionnelle ? Mgr Sarpong, 1988

8)      S’informer sur l’Islam, Déclaration du SCEAM, Nairobi, 29 Juillet 1978

9)      Identité chrétienne et rencontre de l’autre. Mgr Tessier, archevêque d’Alger au synode des évêques, 1985

10)  Islam et christianisme sont nés hors d’Afrique. Mgr Zubeir Wako, archevêque de Karthoum, 1988

11)  La rencontre des chrétiens et des musulmans au Maghreb, Conférence des évêques d’Afrique du Nord, 1989

12)  Les défis de l’Islam au christianisme. Mgr Teissier, archevêque d’Alger, 1989

13)  Dialogue islamo-chrétien. Appel des évêques du Sénégal, 23 Mai 1991

14)  Evolution de la pensée récente de l’Eglise catholique sur la rencontre des autres religions. Episcopat français, présente par Christophe RICOU, Janvier 1994

15)  La présence catholique en Libye. Mgr TESSIER ; archevêque d’Alger, Juin 1989

16)  Face aux épreuves, sectes et christianisme, lettre des évêques de la Côté d’Ivoire, 1980

17)  L’efflorescence des sectes et responsabilité des chrétiens, lettre pastorale des évêques du Congo, Avril 1986

18)  La catéchèse inculturée, meilleur arme contre les sectes. Cardinal Malula, archevêque de Kinshasa, Avril 1988

19)  Progression de l’athéisme, Mgr Sangu, évêque de Mbeya lors du synode des évêques, 1974.

20)  Résumé des documents publiés par la conférence épiscopale du Togo, 1967-2005, présenté par l’Abbé  Alexandre ANIBRI, dans le journal le Gong n° 18,  L’engagement de l’Eglise au cœur du monde,  Janvier-Juin 2006  (PP 25 à 30).

5-5 –Les autres documents importants

5-5-1-HAU Jean M ; MERLE M. ; En dialogue pour la paix,

       Ed PAX Christi, 1964, P144.

Ce livre s’adresse à tous les chrétiens conscients de leur responsabilité a l’égard de la paix et soucieux de contribuer à l’édification de la société de demain. Nous avons à apprendre patiemment, méthodiquement à dialoguer et à coopérer : entre nous d’abord, ce qui n’est pas toujours le cas ; avec nos frères croyants des autres confessions chrétiennes et des autres religions, ensuite ; avec nos frères incroyants enfin. Nous devons apprendre à dialoguer avec eux, en se refusant à tout repliement sur soi profondément contraire à l’attitude chrétienne.
Le message du dialogue se veut un message de paix et d’amour dont nous devons être les témoins malgré nos faiblesses et nos insuffisances. Cette noble invitation au dialogue nous révèle qu’au cœur de l’homme, dans sa nature même il existe le principe d’ouverture aux dialogues. Nous devons réussir ce dialogue, non pour y triompher, certes, mais pour contribuer, en servant de lien et de ciment, à l’édification de la cité des hommes.

 

5-5-2- J.Kerkhofs et A.-M.Henry, Dialogue d’aujourd’hui mission de demain,

           Ed Mae, Le Cerf, 1966, P325.

Cet ouvrage est le fruit d’un colloque organisé en1965 à Louvain par le centre international d’information Pro mundi  vita (pour la vie du monde).

La première partie montre, en de multiples exemples tout autour du monde, comment, de nos jours, l’évangélisation se fonde moins sur la recherche de conquête que sur la rencontre. Ces multiples exemples nous renseignent sur le dialogue avec les autres chrétiens, les musulmans, bouddhistes en Thaïlande, la Religion Traditionnelle, avec les athées en Scandinavie, dialogue entre chrétiens et communistes en Pologne. Et pour que ce dialogue d’aujourd’hui , mission de demain se réalise dans le concret, il faut que ce nouveau comportement exige des hommes nouveaux, recrutés et formés en fonction de l’œuvre à accomplir.

 La seconde partie étudie les contours de cette formation. A ce effet, la formation humaine du futur missionnaire, des prêtres, des religieux et religieuses s’avèrent nécessaire. La raison est tout à fait simple: il faut que le missionnaire soit suffisamment  outillé pour affronter les différents problèmes liés à la réussite du dialogue. Cette formation porte sur les cours de langues, d’anthropologie culturelle, d’histoire des missions.il va de soi que les futurs missionnaires devront recevoir une introduction substantielle à la situation socio-culturelle de leurs prochains champs d’activité ainsi qu’une initiation solide aux grandes religions qu’ils y rencontreront.

5-5-3-Claude GEFFRE, Le des religions, Défi pour un monde divisé, Ed Paris,

          Cerf, 1986, dans revue Le Supplément pp 103-122.

Claude GEFFRE, est un dominicain, et  professeur de théologie à l’institut Catholique de Paris. Dans son exposé, Claude GEFFRE présente avec clarté l’urgence du dialogue interreligieux. Il faut que les religions commencent par balayer devant leurs portes, c'est-à-dire fassent l’apprentissage de la tolérance et du dialogue.il salue comme un signe d’espérance la réalité nouvelle que constitue le dialogue entres les grandes religions du monde : le Judaïsme, le Christianisme, l’islam, La religion traditionnelle, les grandes religions orientales comme l’indouisme et le bouddhisme. Apres des siècle de polémique, de fanatisme et d’intolérance, il est permis  aujourd’hui de parler d’un dialogue sur un plan d’égalité entre les grandes religion du monde. Les religions monothéistes comme le Judaïsme, le Christianisme et l’Islam risquent toujours d’être intolérantes puisqu’elle se réclame, d’une vérité qui est la Parole même de DIEU consigné dans un livre. Il faut donc prendre très au sérieux cette nouveauté du dialogue interreligieux qui est la notre. C’est une situation inédite et on ne peut plus dire que la division des religions ne fait que renforcer la division de l’humanité. Il est donc grand temps de reconnaître des semences de vérités et de sainteté qui peuvent se trouver dans les autres traditions religieuses. Chaque religion est appelée a renoncer a son intérêt propre. Ceci ne veut pas dire que le dialogue doit conduire à une perte d’identité. Il n’y a de vrai dialogue que si chacun reste lui-même. Le dialogue d’une religion avec une autre peut nous conduire à une meilleure compréhension de l’autre et à une réinterprétation vivante de son propre message, mais a condition de rester fidèle à ce qui fait l’originalité de sa propre tradition. Oui, chaque religion doit donc demeurer fidèle à son génie religieux propre. Devant l’urgence de la situation mondiale qui met en question l’avenir même de l’humanité, toutes les religions ont une responsabilité spéciale pour construire un nouvel ordre mondial. Les religions doivent dépasser leurs divisions pour se mettre au service de l’homme. Elles doivent éveiller la mauvaise conscience des hommes d’Etat et de tous les décideurs dans l’ordre politique ou économique. C’est la  vocation même des religions qui se réclament du Dieu libérateur ou d’une Réalité mystérieuse de se faire les porte-parole de tous les  peuples opprimés et d’être la voix de ceux qui sont sans voix. C’est une noble et grande cause de lutter pour permettre à des millions d’hommes d’accéder à une vie vraiment humaine. Les religions doivent travailler le plus efficacement possible pour l’avenir de l’homme.

5-5-4- Maurice BORRMANS, Ou va le dialogue islamo-chrétien ?, Ed Paris 2009,
            pp209-220.

Cet article de Maurice BORRMANS porte essentiellement sur la Conférence de Ratisbonne animée par le pape Benoit XVI.C’étais le 12 Septembre 2009 le pape Benoit XVI donnait à l’Université de Ratisbonne, dans sa Bavière natale, sa conférence de théologie sur les rapports entre « Foi et Raison ». Celle-ci devait susciter de nombreuses réactions défavorables dans les pays musulmans, suite à la citation malencontreuse d’une phrase de l’Empereur byzantin Manuel II, Paléologue qui prenait à partie , « d’une manière étonnamment abrupte », l’œuvre religieuse du Prophète de l’Islam, alors qu’il suffisait d’en rappeler l’affirmation essentielle : « Dieu ne prend pas plaisir au sang, et ne pas agir selon la raison est contraire à la nature de Dieu ». Oubliant que la conférence était adressée à un occident post-chrétien devenu positiviste et agnostique , sinon athée , les opinions publiques islamiques ont voulu y voir un discours polémique et se sont déchainées en invectives injurieuses et en manifestations indécentes contre le pape , blessant profondément la sensibilité des communautés catholiques un peu partout dans le monde ,tandis que nombre de musulmans de toutes tendances religieuses s’estimaient offenses par la citation malheureuse de la conférence de Ratisbonne.

Benoit XVI, profondément attristé d’avoir ainsi été mal compris, s’en est expliqué aussitôt à l’Angélus du dimanche 17 Septembre, après que le porte –parole du Saint Siège, le Père Lombardi, à préciser que  Benoit XVI n’avait pas voulu donner une interprétation de l’islam « dans un sens violent ».Il n’avait pas eu l’intention de se livrer à une étude approfondie du djihâd et de la pensée musulmane, encore moins d’offenser la sensibilité des croyants musulmans.

Un fait inattendu est aussi à signaler : il s’agit de la récente initiative du roi Abdallah d’Arabie Saoudite. Celui-ci n’avait-il pas osé une visite au pape, à Rome, le 6 Novembre 2007 ? En fait, il était animé du souci d’intervenir en faveur de la paix mondiale et de la sauvegarde de la famille. Il a donc invité les autorités religieuses à exprimer leur avis sur la question en vue de commences à organiser avec des frères qui appartiennent aux religieux monothéistes,
les croyants qui adhèrent au Coran, à l’Evangile et à la Torah. Il s’en était entretenu avec le pape lui- même. En suite de quoi, sous son patronage, la Ligue du monde Islamique a organisé un « grand congrès de préparation au dialogue avec les autres » à la Mecque, du 4 au 6 Juin, auquel ont participé des centaines de responsables musulmans d’Asie, d’Afrique, d’Europe et d’Amérique.

La Conférence de Ratisbonne, l’initiative du roi Abdallah et les engagements renouvelés du Conseil Pontifical du Dialogue Interreligieux(CPDI) peuvent apparaitre comme autant de « signes d’espoir «  sur la « longue route » du dialogue entre chrétiens et musulmans.    

 

Quelques implications pratiques  

Depuis le renouveau apporté le Concile Vatican II  avec la publication de l’Encyclique Ecclésiam Suam  de Paul VI, considéré comme la charte de l’engagement  de toute l’Eglise à entrer en dialogue avec les autres religions, un chemin a été  fait et des pas décisifs franchis surtout sous l’impulsion des principaux documents du Magistère.

Nous mesurons aujourd’hui les retentissements et les impacts positifs que ces documents publiés ont eu sur la vie sur de l’Eglise en général et sur celle de nos Eglises locales en particulier. En  répertoriant quelques conséquences pratiques que ces documents ont induits dans nos particulières, nous notons sur le continent africain  surtout à partir de l’an 2000, les cours d’islamologie, sur la RTA, sont introduites dans les grands séminaires, les instituts religieux. Le profile de la formation des clercs, des responsables religieux et de certains laïcs intègrent désormais  la compréhension et la connaissance des autres religions. L’ensemble des fidèles sont de plus en plus informés et formés dans ce nouvel esprit.

Sur le terrain pastoral, dans Eglises locales au  Togo, dans le cadre de notre situation socio politique, nous notons  que les catholiques, les musulmans, les adeptes de la RTA souvent  se retrouvent  ensemble pour prier pour la paix. Dans les écoles, on voit des enfants musulmans, de toutes confessions confondues cohabiter pacifiquement et recevoir des cours de l’enseignement catholiques

Dans la réalité des jours, les relations entre catholiques, musulmans, les chrétiens d’autres confessions, les adeptes de la RTA sont empreintes de fraternité et de convivialité. Au delà de petites questions de divergence, ils se retrouvent  autour des problèmes d’intérêts sociaux et humains comme par exemple le deuil, les funérailles, mariage etc., pour une solidarité universelle 

Conclusion

Aujourd’hui le dialogue est une nécessité pratique de la vie, car il vise à orienter toute l’humanité vers un objectif commun qui est celui de la recherche de l’unité entre les peuples, races, langues et nations au-delà des différences. L’Eglise  s’y est engagée  résolument  et solennellement depuis le renouveau  qu’en a apporté le Concile Vatican II.

Avant d’être une mission essentielle pour l’Eglise, le dialogue révèle d’abord la rencontre de Dieu avec toute l’humanité et son projet bienveillant de rassembler tous les hommes en un seul peuple dans son Fils Jésus Christ .Aujourd’hui, l’Eglise y travaille  de toutes ses forces pour que disparaisse entre les hommes les fractions les divisions qui les éloignent de leurs principes et fin. Avec les principaux documents du Magistères et leurs enseignements, c’est l’ensemble de l’Eglise est introduit dans la nouvelle compréhension, signification et nécessité pratique de sa relation avec les religions non chrétiennes.              

 

6- Quelques approches du dialogue interreligieux au cours de l’histoire de l’Eglise

Introduction

Le dialogue  interreligieux vise  une connaissance plus approfondie des religions en présence, de leurs croyances, de leur démarche particulière, de leur sensibilité propre, en vue d’une coopération des croyants pour un monde solidaire. Son climat, c’est  la prière. Son horizon, c’est l’unité de la famille (Cf Nostra aetate du Concile Vatican II). La diversité étant une volonté divine, l’enrichissement ne serait plus que bénéfique.

Dans  cette étude, nous nous consacrerons à évoquer quelques approches du dialogue interreligieux au cours de l’histoire de l’Eglise. Pour cela nous commencerons avec la période  patristique puis la période médiévale. Ensuite nous tenterons de faire voir l’Eglise et les organisations interreligieuses contemporaines. Enfin nous ferons cas des initiatives catholiques actuelles.

6.1. La période patristique

Les Pères du II et du IIIème siècle comme Justin, Irénée et Clément d’Alexandrie parlent des « semences » de la Parole de Dieu  parmi les nations. Dieu s’est manifesté.

Ces Pères des premiers siècles présentent ce qu’on pourrait appeler une théologie de l’histoire du salut dans la mesure où Dieu se manifeste progressivement pour atteindre son apogée dans l’incarnation du Verbe de Dieu.

Ce courant patristique trouve son point culminant chez St Augustin. Celui-ci a souligné la présence et l’influence du mystère du Christ avant l’Incarnation. Ce qui sous-entend que le christianisme existait au commencement de la race humaine.

a)St Justin

St  Justin parle des « semences » jetées par le Logos dans les traditions religieuses. Mais ce n’est que par l’Incarnation que la manifestation du Logos devient complète.

b) St Irénée

Le Fils, manifestation  visible du  Père s’est révélé aux hommes « dès le commencement » et pourtant l’Incarnation apporte quelque chose d’essentiellement neuf.

c)St Clément d’Alexandrie

La philosophie  fut donnée aux Grecs  par  Dieu  comme une pierre d’attente à la philosophie selon le Christ  un « pédagogue » qui conduirait à l’esprit grec.

6.2. La période médiévale

Il s’agit d’une approche soufie du dialogue interreligieux. Le soufisme est une doctrine ésotérique de l’Islam, mystique et ascétique.

Des échanges fructueux ont été réalisés entre les « trois monothéismes » (Judaïsme, Christianisme et Islam).C’est principalement sur le terrain de la spiritualité et du mysticisme que le  dialogue prend un  sens tout à fait intéressent.

Le  soufisme est extrêmement tolérant et participatif à ce genre de perspective car de grands soufis comme Ibn Arabie et  Mevlana Jalaluddin  Runni ont  été en excellents termes avec les différentes religions de leur temps.

6.3. La période moderne de l’expansion  missionnaire

Le temps moderne où le christianisme se répand sur tous les continents est d’une importance décisive. Elle se fait sur la lancée des marins et marchands qui au tournant des XV et XVI ème siècles, abordent de nouveaux rivages. La mission de l’Eglise est une mission d’amour dont le Christ est la source, le terme et le modèle. Sous l’action des pontifes Romains Pie et Sixte V l’Eglise de la contre réforme crée la congrégation du saint-office et de la propagation de la foi. Ces institutions par lesquelles Rome dit la vérité catholique et la fait proclamer jusqu’aux extrémités du monde. Il est évidant qu’au début de l’évangélisation, les protestants ont pris de l’avance sur les catholiques. Le premier mode d’implantation du christianisme est une nécessité de rayonner sa foi. L’élément décisif fut la découverte de l’Amérique par Christophe Colombe en 1492 ce qui changea  tous les donnés. Depuis le 07 juin 1494, date  de la bulle universalis ecclesiae du pape Alexandre VI, les grandes missions furent celles portugaises et espagnoles. En plus de ces deux nations ibériques, plusieurs congrégations et ordres religieux missionnaires ont vu le jour. Les franciscains  implantent le christianisme aux nouveau Mexique puis  au Texas. Du nouveau Mexique, les Philippines sont évangélisés. Les Dominicains fondent l’Eglise au Pérou. GOA sur la cote ouest de l’Inde est occupé en 1510, en 1534, elle devient un évêché. En Amérique, le modèle missionnaire obtint des résultats les plus remarquables. La première messe est célébrée à Haïti. Très vite le Mexique devient la base du christianisme. Il est à noter que la présence missionnaire fait partie intégrante de la conquête du monde. Aller au devant des autres religions, culture et peuple étaient un devoir de charité pour l’Eglise inhérente à sa nature missionnaire. Les jésuites après 1568 s’installent un peu partout jusqu’en Asie. Ils sont suivis par les hospitaliers, les carmélites théatins et les oratoriens. En 1659, la propagande donne des instructions fermes pour le respect des cultures locales.  «Ne mettez aucun zèle, n’avancez aucun argument pour convaincre ces peuples de changer leurs rites, leurs coutumes et leurs mœurs, en moins qu’ils ne soient évidemment contraire à la religion et à la morale. Quoi de plus absurde de transporter chez les chinois la France, l’Espagne, l’Italie ou quelque autre pays d’Europe ? N’introduisez pas chez eux nos pays mais la foi… ». Le bilan de cette vaste entreprise peut être dressé. Mais les succès sont inégaux. Si l’Amérique se christianise, l’Asie se ferme et l’Afrique demeure inconnue. Par-dessus tout, l’expansion reste en bien des cas fragile, superficielle à l’excès importé. Le dynamisme n’exclut donc pas les faiblesses. Mais en dernier ressort, la grandeur de cette histoire riche de contraste douloureux, ne saurait être minimisée.

 

6.4- L’Eglise et les organisations interreligieuses contemporaines

6.4.1- La conférence mondiale des religions pour la paix (WCRP).

Crée en 1970 à l’assemblée mondiale de Kyoto au Japon, la conférence mondiale des religions pour la paix est la plus importante coalition internationale de représentants des grandes religions du monde au service de la paix. Elle est consacrée à la coopération entre les religions du monde pour la paix, tout en maintenant le respect des différences religieuses.
La Conférence mondiale des religions pour la paix est accréditée auprès de l’ONU et son siège se trouve à New-York. La Conférence mondiale agit à travers les conseils interreligieux qui lui sont affiliés dans plus de 70 pays du monde.

Elle a pour rôle de :

  • Promouvoir la tolérance religieuse, la liberté et le dialogue
  • Aider à la résolution des conflits et le suivi de la paix
  • Travailler pour le désarmement et la démilitarisation
  • Encourager un développement équitable et durable
  • Promouvoir les Droits de l’homme, l’égalité des sexes et l’harmonie raciale
  • Maintenir les droits des refugiés et autres personnes déplacées
  • Œuvrer pour la justice sociale et économique pour les pauvres
  • Assurer la justice environnementale et sensibilisation.

 

6.4.2- Le bureau des relations interreligieuses du Conseil mondial des Eglises à Genève

Le bureau des relations interreligieuses du conseil mondial des Eglises est la plus haute représentation de coordination de toutes les religions du monde. Son siège se trouve à Genève en Suisse. Il ne faut pas  confondre ce conseil avec le conseil œcuménique des Eglises dont le siège se trouve également à Genève. Le bureau des relations interreligieuses du conseil mondial des Eglises joue le rôle de  pont  entre les traditions religieuses du monde entier, entre les personnes avec d’autres croyances. Ce qui implique inter action de présence réciproque pour témoigner des engagements, des valeurs et des rites des autres. Ce bureau œuvre à la rencontre de personnes de religions différentes dans une atmosphère de liberté et d’ouverture, afin d’être à l’écoute de l’autre, d’essayer de comprendre la religion des personnes et, avec un peu de chance, trouver des terrains de collaboration. Il favorise la communication réciproque et rappelle l’attitude de respect et d’amitié et tous les rapports positifs et constructifs avec les personnes et les communautés de diverses croyances afin d’apprendre à se connaitre et à s’enrichir les uns les autres tout en obéissant à la vérité et en respectant la liberté de chacun. Tout cela en vue d’un témoignage et l’approfondissement des convictions religieuses respectives. Il est bien évident que l’ignorance est à la base de toutes les violences, de toutes les guerres de religions qu’a connues et que connait encore malheureusement notre monde. Les exemples sont légions. Le bureau lutte contre l’extrémisme religieux et l’intolérance religieuse dans un respect et l’estime au service d’une recherche commune de la vérité et de la paix.

 

6.4.3 La Conférence du Parlement des Religions du Monde

Pour mémoire, c’est en 1893 à Chicago que fut ainsi appelé à se réunir pour la première fois la Conférence du Parlement des Religions du Monde, en parallèle de l’Exposition universelle, à l’initiative d’un avocat, Charles C. Bonney. En 1993, il fut décidé de commémorer le centenaire de ce rassemblement, également à Chicago. Depuis lors, il a lieu tous les cinq ans : en 1999, le Parlement se réunit à Cap Town, en 2004 à Barcelone, à la fin de l’an passé, à Melbourne. Le nombre de participants et de pays représentés n’a cessé de croître pour atteindre aujourd’hui dix mille personnes.

Cette Conférence réunit en son sein différents courants du Christianisme, du Bouddhisme, de l’Islam, de l’Hindouisme, du Sikhisme, du Zoroastrisme, ainsi que des chefs et des représentants spirituels de nombreuses autres traditions religieuses. L’objectif global de cette Conférence est assez vague, la paix mondiale. En effet, affrontées aux grands défis de la technologie, des conflits ethniques, de la pauvreté et de la violation des droits humains, « les religions doivent trouver en elles-mêmes la force spirituelle qui leur permettra d’aider l’humanité aujourd’hui et de la conduire vers la solidarité et la paix ».Chacune des religions, animée par sa propre foi religieuse, est engagée dans cet effort audacieux. Pour arriver à construire un monde de paix, les grandes religions du monde ont basé leurs divers actions sur l’amour du prochain comme le remarque, Eric Fromm, un grand psychologue de notre temps, « Notre civilisation cherche très rarement à apprendre l’art d’aimer ; en dépit d’une recherche désespérée d’amour, tout le reste est considéré comme plus important : succès, prestige, argent, puissance. Nous usons presque toute notre énergie à poursuivre ces objectifs et très peu à apprendre l’art d’aimer »[44].De plus, lorsque deux ou plus de personnes sont disposées à faire le premier pas vers l’autre, l’amour devient mutuel, et cela constitue le fondement le plus solide pour la paix et l’unité dans le monde. Cela peut donner vie à la famille humaine universelle qui surpasse la notion limitée d’une communauté internationale, une famille humaine universelle dans laquelle des relations entre individus, groupes et nations détruisent toutes les divisions et les barrières qui peuvent exister. Il est clair qu’aujourd’hui quiconque veut ébranler les montagnes de haine et de violence qui existent est confronté à une tâche énorme, écrasante. Mais, et c’est important, ce qui excède les forces de millions d’individus séparés, isolés, commence à paraître possible lorsque les gens ont fait de l’amour réciproque, de la compréhension mutuelle, de l’unité, le moteur de leur vie. Il y a une raison, une clé, un nom à tout cela. Lorsque nous, qui appartenons à des religions différentes, nous entrons en dialogue, c’est-à-dire lorsque nous sommes ouverts et que notre dialogue est fondé sur la bonté, l’estime et le respect réciproques, nous nous ouvrons aussi à Dieu. Comme l’a dit Jean-Paul II, « nous laissons Dieu être présent au milieu de nous »[45]

L’amour mutuel et l’unité procurent une grande joie à ceux qui les pratiquent. Toutefois cela requiert aussi un engagement, un entraînement et un sacrifice quotidiens. Et c’est ici qu’un mot particulier du langage chrétien paraît frappant, lumineux. C’est un mot que le monde ne désire pas entendre, un mot qu’il considère comme fou, absurde, futile. C’est le mot « croix ». Rien de bon, rien d’utile, rien de fructueux pour le monde ne peut se réaliser sans rencontre et acceptation de peines et de souffrances, en un mot, sans la croix. Consacrer sa vie à la cause de la paix est un engagement qui ne peut être pris à la légère. Il y faut du courage, il faut savoir comment souffrir.

Et de fait, n’est-ce pas le souvenir des souffrances de la Seconde Guerre mondiale qui a
fait naître les Nations Unies ? N’est-ce pas le souvenir des souffrances absurdes que les peuples se sont infligées mutuellement et le désir de guérir tous les conflits au nom de la religion,
qui a donné vie à la Conférence  du Parlement des Religions  du Monde? Se faire ‘un’ avec les autres, cela veut dire faire siens les soucis, les pensées, les souffrances, les joies des
autres.
« Se faire ‘un’ » s’applique avant tout au dialogue interreligieux.
On a écrit que « pour connaître la religion de l’autre, il faut marcher avec ses chaussures, voir le monde comme il ou elle le voit, comprendre ce que cela signifie pour l’autre d’être bouddhiste, musulman, hindou, etc. »[46] « Vivre ce que vit l’autre », de plus, englobe tous les aspects de la vie et est l’expression la plus grande de l’amour, car, en vivant de la sorte, nous mourons à nous-mêmes, à notre ego et à tous nos attachements, nous pouvons atteindre le ‘néant du soi’ auquel aspirent de grandes spiritualités et nous pouvons nous vider de nous-mêmes par amour en accueillant l’autre, nous pouvons offrir un espace à l’autre qui trouvera toujours place en notre cœur, nous pourrons être en relation avec les autres en étant toujours disposés à apprendre d’eux, convaincus que nous avons vraiment quelque chose à apprendre.

De toute évidence, ceci n’est pas seulement gentillesse et compréhension, ce n’est pas seulement une méthode pour développer les relations interpersonnelles ou une stratégie pour atteindre un consensus ou réaliser son projet. L’amour n’a qu’un objectif : se donner complètement et sans rien garder.

La Conférence appelle les communautés religieuses du monde à s’unir afin de permettre une vie commune au cours du nouveau millénaire, à construire une culture globale de la paix. Alors que le millénaire représente une manière symbolique de marquer le temps partout dans le monde, il peut devenir un moment charnière, un moment de renouvellement, de réengagement. Par l’élaboration d’une culture de la paix, on peut affirmer et célébrer la diversité des cultures et des traditions, tout autant qu’on reconnaît, partage et célèbre des points communs. Tout en reconnaissant qu’il n’en a pas toujours été ainsi, les communautés religieuses ont une nouvelle occasion de présenter à un monde pluraliste, des modèles de paix et de réconciliation en accord avec leurs textes sacrés et leurs autorités. Dans pareil monde, la responsabilité des communautés religieuses ne se limite pas à développer le dialogue indispensable entre les civilisations ; elle requiert aussi des engagements en vue d’une action commune :

  • Une humanité commune

La Conférence  du Parlement des Religions  du Monde affirme l’existence d’une humanité commune dans laquelle hommes et femmes sont reconnus tout d’abord comme des êtres humains dotés de dignité et d’intégrité, de droits et de responsabilités, que ceux-ci soient conçus comme inaliénables, donnés par Dieu, un reflet d’une étincelle divine, d’un caractère sacré naturel, ou comme ne faisant qu’un avec l’univers. Nous basant sur l’affirmation de notre humanité commune, nous sommes alors capables d’affirmer nos autres formes d’identité, telles que la race, la religion, l’âge, le sexe, l’appartenance ethnique et l’état civil, comme faisant partie de la merveilleuse diversité de la vie humaine.

  • Une sécurité commune

La Conférence  du Parlement des Religions  du Monde La affirme que l’établissement d’une sécurité commune pour l’humanité et pour toutes les formes de vie requiert une compréhension holistique de la nature de la sécurité, ainsi qu’un engagement sérieux dans l’action.

  • Une interdépendance

La Conférence  du Parlement des Religions  du Monde reconnaît que tous les peuples du monde sont interdépendants, à l’intérieur d’un réseau de réalités économiques et environnementales rendu plus pressant par les dynamiques de la mondialisation avec ses impacts aussi bien positifs que négatifs.

  • Un futur commun

La Conférence  du Parlement des Religions  du Monde affirme que notre futur commun réside dans nos enfants. Les communautés civiles et religieuses ont la responsabilité d’assurer aux enfants leur droit d’atteindre une plénitude de vie. Nos enfants sont le signe le plus visible de ce qui nous lie ensemble au sein de la famille humaine. Leur bien-être et leur avenir exigent impérieusement que nous engagions nos ressources humaines et matérielles en leur faveur. La Conférence postule un nouveau paradigme pour les enfants : les faire passer de besoins à des droits, de la vulnérabilité à la force.

  • Une vie commune

La Conférence  du Parlement des Religions  du Monde croit qu’une vie en commun requiert non seulement une transformation des institutions culturelles, sociales, économiques, civiles, politiques et militaires, mais également celle des institutions religieuses. Pareille transformation doit aussi refléter la transformation des individus, la conversion du cœur et de l’esprit. Les institutions religieuses peuvent et même doivent être partie prenant dans un processus de renouvellement. Elles possèdent en effet les ressources sociales et morales qui leur confèrent la capacité d’être des forces œuvrant pour la paix et la prévention des conflits, pour la transformation et la solution de problèmes, en rendant possibles la communication directe et le dialogue, l’éducation et la formation.

  • Une éducation commune

La Conférence  du Parlement des Religions  du Monde se consacre à la promotion d’une éducation polyvalente à la paix dont l’objectif est de concrétiser les engagements énumérés ci-dessus dans des comportements qui favorisent la vie commune. La transmission de valeurs au troisième millénaire doit inclure une compréhension plus large et le respect des valeurs et des contributions des autres religions et cultures afin que l’humanité entière puisse bénéficier non seulement d’une seule tradition, mais du riche héritage de traditions diverses.

  • Espoir et engagement

La Conférence  du Parlement des Religions  du Monde partage l’espoir ardent d’une vie commune au vingt-et-unième siècle. Il y a espoir parce que nous entrevoyons la possibilité d’atteindre un monde juste et vivant en paix. Il y a espoir parce que nous connaissons les défis posés au monde et les solutions susceptibles de résoudre la plupart d’entre eux. Il y a espoir parce que les ressources pour répondre aux besoins fondamentaux de l’humanité existent pour peu que nous ayons la volonté de les utiliser de manière judicieuse. Il y a espoir parce que nos traditions religieuses demandent l’engagement en faveur de la paix e de la réalisation du bien commun. Cet espoir toutefois doit se traduire en action. C’est pourquoi la Conférence s’engage à travailler pour réaliser ces objectifs communs et ces façons de concevoir le nouveau millénaire. La Conférence appelle toutes les communautés religieuses à porter témoignage en faveur de la vie commune par le moyen de l’éducation, de la défense et de l’action.

6.4.4. Le service des relations Islamo –Chrétiennes en Afrique (SRICA)

Chrétiens et musulmans africains sont partis d’un constat douloureux. La violence fait partie de notre réalité quotidienne. Une culture de la violence s’est imposée dans tous les domaines de notre existence. Contre cette culture de la violence, ils se sentent appelés à bâtir une culture de paix par la non-violence active. Ils ont donc pensé à la création d’un service qui coordonnerait leurs activités. C’est cette circonstance qu’est né le service des Relations Islamo-Chrétiennes.

Le Service des Relations Islamo-Chrétiennes en Afrique dont le bureau est basé à Nairobi (KENYA) a donc mis sur pieds des programmes pour consolider la paix entre chrétiens et musulmans et dans la société humaine en général.

Ces programmes sont basés sur l’identité nationale des croyants, leur mission et leur façon de faire la politique. C’est sur la base de leur nationalité commune et de leur humanité commune que les croyants peuvent travailler ensemble pour éradiquer la violence dans leur contexte particulier. La mission chrétienne (évangélisation) et la mission musulmane (Dawa) ne doivent pas se faire l’une contre l’autre. Cette violence doit s’arrêter. Enfin toute politique doit viser le bien-être de tous les citoyens sans distinction de religion ou de groupe ethnique.

Pour atteindre ses objectifs, le Service des Relations Islamo-Chrétiennes en Afrique (SRICA) a mis sur pied un certain nombre de stratégies :

  • La contribution de l’éducation dans la lutte contre la violence
  • La lutte contre la violence d’après le Coran
  • La lutte contre la violence d’après la Bible
  • Témoignage des actions musulmanes en faveur de la lutte contre la violence
  • Témoignage des actions chrétiennes en faveur de la lutte contre la violence

La bible témoigne de l’amère réalité que la violence est partout. La violence présente dès les premières pages de la bible peut nous faire croire que Dieu est violent ou du moins favorable à la violence. Mais une lecture approfondie de la bible avec des yeux de foi nous révèle plutôt un Dieu d’amour qui est contre la violence et qui souffre de la violence des hommes.

La même réalité se remarque dans le coran. Allah semble approuver la violence. L’intégrisme et la guerre sainte, jihad, s’appuie en effet sur le coran. Mais Allah déclare la personne humaine sacrée. Allah veut le bonheur de la personne humaine. La violence n’est permise dans l’Islam que dans des conditions bien définies. Le principe ‘pas de contrainte en religion’ reste l’inspiration première du musulman.

Des actions non violentes des musulmans en faveur des chrétiens dans l’histoire des deux religions sont des exemples à suivre. Depuis le prophète Mohammed (La paix soit avec lui) les gens du livre (chrétiens et juifs) ont jouis d’un statut particulier de protégés. Ils ont été tolérés même si c’était avec des droits limités. Partout où l’Islam s’est imposé, il n’a pas exterminé le christianisme. À Istanbul, à Constantinople, à Alexandrie et dans bien d’autres villes et pays dits musulmans, de fortes communautés musulmanes coexistent avec des communautés chrétiennes. Au Rwanda par exemple, pendant la guerre, des musulmans ont protégé ceux qui se sont réfugiés chez eux sans distinction de religion.

Ce service travaille en étroite collaboration avec tous les acteurs qui œuvrent pour la paix et pour un développement durable en Afrique. L’exemple récent en date est l’intervention sans condition dudit service lors de l’affrontement sanglant qui a eu lieu entre musulmans et chrétiens au Nigéria en Février 2010.Le Service des Relations Islamo-Chrétiennes en Afrique avait vivement condamné cet état de fait en menant une série d’actions pour le rétablissement de la paix dans cette région du Nigéria tant auprès de l’Etat nigérian que chez les victimes et les familles éplorées.

Ce service qui régularise les relations entre chrétiens et musulmans a encore beaucoup à faire malgré les progrès sensibles qu’il fait au cours cette dernière décennie.

6.5.-Les initiatives catholiques actuelles

6.5.1 Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux

  • Présentation

Le conseil pontifical pour le dialogue interreligieux est un dicastère de la curie romaine. Il a été érigé par le pape Paul VI le 19 mai 1964 en tant que secrétariat pour les non-chrétiens. Il fut plus tard renommé par le pape Jean-Paul II le 28 juin 1988. Son président actuel est le cardinal Jean-Louis Tauran.

·         Missions

Le conseil a pour but de promouvoir le dialogue interreligieux, l'étude des religions et la formation des personnes, en accord avec les travaux du concile Vatican II, en particulier selon la déclaration Nostra Ætate. Il collabore avec la commission pour les relations avec les Juifs et le conseil pontifical pour la promotion de l'unité des chrétiens.

Les travaux du conseil ont été influencés par la carrière curiale de Francis Arinze, qui a reçu un prix du conseil international de chrétiens et juifs. Arinze a participé à de nombreuses réunions interreligieuses et fut créé cardinal à la suite de ses efforts.

Le conseil est engagé dans une quête pour un dialogue commun sur le plan éthique et moral. Il publie un bulletin d'activités interreligieuses ainsi qu'un répertoire d'organismes interreligieux.

6.5.2.-Le Conseil Pontifical pour la culture

  1. A.    Historique

L’origine du Conseil pontifical de la Culture, Pontificium Consilium de Cultura, est le Concile Vatican II qui souligne l’importance cruciale de la culture pour un développement intégral de l’homme, les multiples connexions entre la Bonne Nouvelle du Christ et la culture humaine, l’enrichissement mutuel de l’Eglise et des cultures par l’entrée en communion avec les diverses formes de culture (cf. G.S n°53-62). Le Pape Paul VI, à la suite du Synode des Evêques sur l’Evangélisation de 1974, écrit : « L’Evangile, et donc l’évangélisation, ne s’identifient certes pas avec la culture, et sont indépendants à l’égard de toutes les cultures. Et pourtant le Règne que l’Evangile annonce est vécu par des hommes profondément liés
à une culture, et la construction du Royaume ne peut pas ne pas emprunter des éléments de la culture et des cultures humaines. Indépendants à l’égard des cultures, Evangile et évangélisation ne sont pas nécessairement incompatibles avec elles, mais capables de
les imprégner toutes sans s’asservir à aucune » (Evangelium nuntiandi n°20).
Recueillant cette riche hérédité, le Pape Jean-Paul II a créé en 1982 le Conseil pontifical pour la Culture (Lettre autographe au Cardinal Secrétaire d’Etat du 20 mai 1982). Par le Motu proprio « Inde a Pontificatus » du 25 mars 1993, il unit le Conseil pontifical pour le Dialogue avec les non-croyants (fondé en 1965 par Paul VI) au Conseil pontifical de la Culture.

B-Finalité

            Le Conseil pontifical de la Culture est le Dicastère de la Curie Romaine qui aide le Souverain Pontife dans l’exercice de sa Charge suprême de Pasteur pour le bien et le service de l’Eglise universelle et des Eglises particulières, en ce qui concerne la rencontre entre le Message de salut de l’Evangile et les cultures, l’étude des graves phénomènes de la rupture entre Evangile et culture, de l’indifférence religieuse et de la non - croyance ; les relations entre l’Eglise et le monde de la culture, encourageant particulièrement le dialogue avec les diverses cultures de notre temps, afin que la civilisation de l’homme s’ouvre toujours davantage à l’Evangile, et que ceux qui pratiquent les sciences, les lettres et les arts se sentent reconnus par l’Eglise comme des personnes adonnées au service du vrai, du bon et du beau.

Le Conseil pontifical de la Culture, en outre, suit et coordonne l’activité des Académies Pontificales. Il maintient des contacts périodiques de collaboration mutuelle avec la Commission pontificale pour les biens culturels de l’Eglise.

C-Missions

Ce Conseil a pour mission de :

  • Promouvoir la rencontre entre le message salvifique de l’Evangile et les cultures de notre temps, souvent marquées par la non - croyance et l’indifférence religieuse, afin qu’elles s’ouvrent toujours davantage à la Foi chrétienne, créatrice de culture et source inspiratrice des sciences, des lettres et des arts (cf. Motu proprio « Inde a Pontificatus », art. 1).

 

  • Manifester la sollicitude pastorale de l’Eglise face aux graves phénomènes de rupture entre Evangile et cultures. Promouvoir donc l’étude du problème de la non - croyance et de l’indifférence religieuse présente sous des formes variées dans les divers milieux culturels. Il en recherche les causes et les conséquences en ce qui touche la Foi chrétienne, dans le but de fournir une aide adaptée à l’action pastorale de l’Eglise pour l’évangélisation des cultures et l’inculturation de l’Evangile (cf. ibid., art. 2)

 

  •  Favoriser les relations de l’Eglise et du Saint-Siège avec le monde de la culture. Le Conseil prend des initiatives appropriées concernant le dialogue entre la Foi et les cultures, et le dialogue interculturel. Il suit les initiatives promues par les diverses Institutions de l’Eglise et offre sa collaboration aux Organismes correspondants des Conférences Episcopales (art 3).

 

  •  Etablir le dialogue avec ceux qui ne croient pas en Dieu ou ne professent aucune religion, chaque fois que ces derniers sont ouverts à une sincère collaboration. Le Conseil organise et participe à des rencontres d’études en ce domaine, par l’intermédiaire de personnes expertes (art. 4).
  •  Suivre et coordonner l’activité des Académies pontificales (cf. ibid., II et Lettre autographe de fondation), restant sauve l’autonomie des programmes respectifs de recherche. Il promeut la recherche pluridisciplinaire et offre une plus ample diffusion de leurs travaux (Normes pour le renouvellement des Académies pontificales n°7).
  •  Participer aux préoccupations culturelles que les Dicastères du Saint-Siège entretiennent dans leur travail, de manière à faciliter la coordination de leurs tâches pour l’évangélisation des cultures, et à assurer la coopération des institutions culturelles du Saint-Siège
  •  Dialoguer avec les Conférences épiscopales afin aussi de faire bénéficier toute l’Eglise des recherches, initiatives, réalisations et créations qui permettent aux Eglises locales une présence agissante dans leur propre milieu culturel
  •  Collaborer avec les organisations internationales catholiques, universitaires, historiques, philosophiques, théologiques, scientifiques, artistiques, intellectuelles et promouvoir leur mutuelle coopération
  •  Suivre, selon la manière qui lui est propre et les compétences spécifiques des autres organismes de la Curie en la matière, l’action des organismes internationaux, à commencer par l’Unesco et le Conseil de coopération culturelle du Conseil de l’Europe, qui s’intéressent à la culture, à la philosophie des sciences, aux sciences de l’homme, et assurer la participation efficiente du Saint-Siège aux Congrès internationaux qui s’occupent de science, de la culture et d’éducation.
  •  Suivre la politique et l’action culturelle des divers gouvernements à travers le monde.
  •  Faciliter le dialogue Eglise-cultures au niveau des universités et des centres de recherches, des organisations d’artistes et de spécialistes, de chercheurs et de savants et promouvoir des rencontres signifiantes à ces univers culturels
  •  Accueillir à Rome les représentants de la culture intéressés à mieux connaître l’action de l’Eglise dans ce domaine et faire bénéficier le Saint-Siège de leur riche expérience en leur offrant à Rome un lieu de réunion et de dialogue

D- Activités du Conseil

Les activités du conseil sont centrées sur les points suivants :

  1. L’accueil des visiteurs, évêques en visite ad limina, groupes de Prêtres, de religieux, de directeurs de Centres culturels, représentants du monde de la culture.

 

  1. L’organisation de congrès, de journées d’étude, de réunions, et la participation aux rencontres organisées par d’autres Institutions, tant au niveau régional, national, qu’international.

 

  1. Le conseil maintient des contacts avec les autres Dicastères de la Curie Romaine, avec les Conférences épiscopales et les Eglises locales, avec les Ambassadeurs près le Saint-Siège et les Représentations du Saint-Siège auprès des Etats, avec l’Unesco et les autres organisations internationales non-gouvernementales.

    4-Il publie la revue trimestrielle Culture e Fede - Cultures et Foi - Cultures and Faith -   Culturas y Fe, avec des articles et des informations en anglais, espagnol, français et . De plus, des livres et des opuscules rendent compte de la rencontre entre l’Évangile et les cultures, ainsi que du dialogue interculturel. Le Conseil publie les Actes importants des Congrès qu’il organise.

 

  1. L’activité ordinaire comprend la correspondance avec l’Eglise universelle et le monde de la culture, la préparation d’observations sur les relations quinquennales diocésaines, les Instructions aux Nonces…etc.

6.5.3 Le Conseil Pontifical pour la justice et la Paix

  • Présentation

Le conseil pontifical « Justice et Paix » est un dicastère de la Curie romaine. Son rôle et son fonctionnement sont définis dans les articles 142 à 144 de la Constitution apostolique Pastor Bonus. Il « s'emploie à ce que, dans le monde, soient promues la justice et la paix selon l'Évangile et la doctrine sociale de l'Église » (Art. 142).

·         Historique

La commission pontificale Justice et Paix est créée par Paul VI le 6 janvier 1967, par le Motu Proprio Catholicam Christi Ecclesiam. Cette création répond au souhait du concile Vatican II exprimé dans la constitution pastorale Gaudium et Spes: « Considérant l'immense misère qui accable, aujourd'hui encore, la majeure partie du genre humain, pour favoriser partout la justice et en même temps pour allumer en tout lieu l'amour du Christ à l'endroit des pauvres, le Concile, pour sa part, estime très souhaitable la création d'un organisme de l'Église universelle, chargé d'inciter la communauté catholique à promouvoir l'essor des régions pauvres et la justice sociale entre les nations » (Art. 90-3).

Le 10 décembre 1976, Paul VI confirme la commission pontificale dans le Motu proprio Iustitiam et Pacem

En 1988, la constitution apostolique Pastor Bonus, publiée par Jean-Paul II réforme la curie et redéfinit le rôle et la composition des différents organes. Elle transforme en particulier la commission pontificale en conseil pontifical « Justice et Paix ».

·         Missions

Les missions du conseil sont définies à l'article 144 de Pastor Bonus.

Le conseil approfondit la doctrine sociale de l'Église en particulier en ce qui concerne les relations entre ouvriers et employeurs.

Il rassemble et évalue les informations et les résultats d'enquête sur la justice et la paix, le progrès des peuples et les violations des droits de l'homme. Il favorise les relations avec les Organisations internationales qui s'engagent sincèrement à instaurer les valeurs de justice et de paix dans le monde.

Il s'emploie à sensibiliser les peuples à la promotion de la paix.

Le Conseil pontifical Justice et Paix est notamment à l'origine du Compendium de la doctrine sociale de l’Église [5]

Le Conseil pontifical Justice et Paix s'intéresse également à la question du respect de la Création, de l'environnement et de l'écologie.

·         Organisation

Le Conseil Pontifical Justice et Paix a un Président, assisté d'un Secrétaire et d'un Sous-secrétaire, tous nommés par le Saint-Père pour une période de cinq ans. Des laïcs, religieuses et prêtres de diverses nationalités constituent une équipe permanente pour la réalisation des programmes du Conseil. Le Conseil Pontifical comprend une quarantaine de Membres et de consulteurs nommés à titre personnel par le Saint-Père pour une période de cinq ans. Provenant de tous les continents, ils se réunissent à Rome à intervalles réguliers pour une Assemblée Plénière. Ils contribuent à l'élaboration des grandes lignes d'activité du Conseil, selon leurs sensibilités et leurs engagements pastoraux ou professionnels. L'Assemblée, temps fort dans la vie du Conseil, discerne les "signes des temps". Les consulteurs, dont certains sont experts en Doctrine Sociale de l'Église, peuvent être convoqués pour des groupes d'étude sur des sujets déterminés.

.  La présidence de ce conseil  depuis sa création a été assurée par :

Depuis le 24 octobre 2009, le conseil est présidé par le cardinal Peter Kodwo Appiah Turkson

 

6.5.4 La commission pour les relations religieuses avec les Juifs du Conseil Pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens.

Au plan de l’Église universelle, outre une prise de conscience plus vive de l’existence du judaïsme dans le monde et de ses affinités et différences avec le christianisme au sein d’une coexistence étroite, il faut noter qu’à la suite de contacts divers entre des autorités de la Curie romaine et des représentants d’importantes organisations juives, il s’est tenue à Rome, du 20 au 23 décembre 1970, une réunion officielle au cours de laquelle a été décidée la constitution d’un «Comité international de liaison entre l’Église catholique et le Judaïsme». Du côté juif, les membres de ce Comité de liaison, ainsi que leurs suppléants, ont été désignés ou approuvés par l’«International Jewish Committe for Interreligious Consultations» où sont représentées les principales tendances du judaïsme contemporain de même que ses plus importants groupes géographiques. Du côté catholique, les membres du Comité ont été nommés par le Saint Père sur proposition du Cardinal Président du Secrétariat pour l’Unité des Chrétiens.

Le Comité international de liaison entre l’Église catholique et le Judaïsme mondial a déjà tenu trois sessions annuelles: Paris, 14-16 décembre 1971; Marseille, 18-20 décembre 1972; Anvers, 4-6 décembre 1973. C’est principalement de ce Comité qu’est venue la suggestion que soit créée au Vatican une «Commission pour les relations religieuses avec le Judaïsme».

Instituée comme un organisme distinct mais rattachée au Secrétariat pour l’Unité des Chrétiens, cette Commission a été créée par le Saint Père en vue de promouvoir et de stimuler les rapports religieux entre juifs et catholiques.

En plus de ses relations propres avec le judaïsme au plan mondial, cette Commission se tient, dans les limites de sa compétence, à la disposition de tous les organismes intéressés par les relations judéo-chrétiennes, pour les informer et être informée par eux, et pour les aider à poursuivre leurs tâches en conformité avec les directions du Saint-Siège.

La Commission doit tendre à développer ses activités pour la mise en œuvre effective et juste des orientations données par le Deuxième Concile du Vatican, en particulier dans la Section 4 de la Déclaration Nostra Aetate, du 28 octobre 1965.

 6.5.5 Les expériences d’Assise en 1986 et 2002

En 1986 : Lors de la journée mondiale pour la paix, à Assise le 27 Octobre 1986,  le Pape Jean-Paul II invite à la réflexion sur le dialogue. L’intention qui amena Jean-Paul II à rassembler à Assise les responsables (plus de deux cent venus de tous les continents) des plus grandes religions du monde fut de permettre à chacun, avec sa manière propre de prier, pour obtenir le don de la paix. Il déclara en substance que « malgré les nombreuses et importantes différences, il fallait   rechercher ce fond commun  à partir duquel travailler ensemble pour la solution de ce problème dramatique  de notre époque : paix véritable ou guerre dramatique ? » Il dira par la même occasion que «  les religions sont nombreuses et diverses et elles reflètent le désir des hommes et des femmes tout au long des âges d’entrer en relation avec l’Absolu ». Par ailleurs il déclara : « notre rencontre atteste que dans la grande bataille pour la paix, l’humanité avec sa diversité même doit puiser aux sources les plus profondes et vivifiantes où se forme la conscience sur laquelle se fonde l’agir morale des hommes. »

En 2002 : Déjà le 18 Novembre 2001, le Pape Jean-Paul II annonça son intention de vouloir inviter les représentants des grandes religions à Assise, pour prier pour arriver à surmonter les contradictions et pour parvenir à une paix authentique entre les hommes. Il indiqua la date du 24 Janvier 2002. En annonçant cette initiative, le pontife tint à préciser qu’il
s’agissait d’une rencontre ayant pour but d’enlever tout fondement théologique dans l’utilisation de la religion pour justifier la violence, la guerre, le terrorisme.
Nous rappelons que cette deuxième rencontre à Assise à l’initiative de Jean-Paul II se déroula après des événements tragiques de l’attaque contre les tours jumelles aux Etats Unis le 11 septembre 2001 et la guerre qui s’en suivit  en Afghanistan. Voici un des passages clef de son discours : « une fois encore, nous qui sommes ici réunis, nous affirmons ensemble que celui qui utilise la religion pour fomenter la violence en contredit l’inspiration la plus authentique et la plus profonde. Il faut donc que les personnes et les communautés religieuses manifestent le rejet le plus net et le plus radical de la violence, de toute violence à commencer par celle qui prétend se parer de la religiosité, allant jusqu’à faire appel au nom très saint de Dieu pour offenser l’homme. Offenser l’homme revient définitivement à offenser Dieu. »

6.5.6 Les autres initiatives

En Europe, le repli identitaire prôné par les intégristes islamiques semble avoir encouragé le dialogue entre chrétiens et musulmans, soucieux d’ouverture. Outre les traditionnelles instances officielles, de multiples associations et autres groupes de recherche ont instauré des lieux de rencontres multiconfessionnels.

En Afrique, les membres et les consolateurs du conseil pontifical pour le dialogue interreligieux de l’Afrique subsaharienne se sont réunis à Nairobi (Kenya) du 16 au 20 avril 2008. Les responsables du conseil épiscopal chargés du dialogue interreligieux se sont joints à eux. Ils ont traité du thème « Formation au dialogue interreligieux » à partir de trois réalités : la formation des prêtres et des religieux, la formation des laïcs et les activités des centres de rencontre pour le dialogue interreligieux et les différentes initiatives en Afrique. Au Burkina-Faso, les commissions chargées du dialogue interreligieux relèvent les forces et les faiblesses de ce dialogue entre chrétiens et musulmans et les espoirs pour l’avenir. Au Bénin, le mouvement chrétien pour changer le monde a organisé le 28 juin 2008 à Cotonou, au Chant d’oiseau dans les locaux de la justice et paix, une table ronde internationale sur le thème : « Dialogue interreligieux : en finir avec toutes les formes d’exclusion » en partenariat avec l’institut universitaire du Bénin. A cette table ronde a siégé aussi le Père Gustave SANVI du Togo. Les religions invitées sont : le Vaudun, le judaïsme, l’Eglise catholique, l’Islam, les Eglises protestantes méthodistes, le christianisme céleste, la fraternité universelle pour la paix dans le monde (Moon).

 

6.5.7 Les initiatives locales

Au Togo, le dialogue islamo-chrétien et le dialogue entre l’Eglise catholique et les autres religions avancent à petits pas. Des progrès ont été faits mais d’autres restent encore à faire. Par exemple, au nord du pays, dans le diocèse de Sokodé, en majorité musulmane, la cohabitation entre chrétiens et musulmans n’est pas empreinte d’heurts. Un prêtre, ancien responsable du dialogue islamo-chrétien de ce diocèse témoigne : « Nous avons de bons rapports avec les musulmans : nous nous rencontrons souvent dans des réunions de prières, organisées par les autorités de la place. En dehors de cela, lors des fêtes musulmanes (Tabaski ou Ramadan), je transmets à l’imam de la ville un message du Pape qui est destiné à tous les responsables musulmans dans les régions à majorité musulmane. En plus, les musulmans vouent un grand respect pour les catholiques à cause des réalisations sociales dans la ville ».

Dans l’archidiocèse de Lomé, une table ronde a réuni  La Religion Traditionnelle Africaine (RTA), les musulmans, les presbytériens et les catholiques sous l’égide du RP Christian AGBELEKPO, ancien Curé de la paroisse de sainte Rita d’alors et Directeur des Œuvres. La table ronde a abordé les points de vue des différentes religions sur le concept de « Dieu comme Père ». La RTA désigne ce terme par « ATA, TOGBE », les presbytériens par « Père et mère » ; les musulmans et les catholiques par « Unique Créateur ». Le RP Christian disait : « Le seul fait de les réunir pour partager nos points de vue sur un tel sujet permet de nous rapprocher les uns des autres ». Les Eglises évangéliques et méthodistes du Togo, pour leur part, dans le cadre de la conférence des Eglises de toute l’Afrique (Ceta) et surtout du conseil chrétien du Togo, essaient depuis quelques années de mener des rapprochements entres les communautés religieuses en passant par des activités de formation consacrées « aux relations interreligieuses et instauration de la paix ».

Le président de l’UMT, EL Hadj Inoussa Bourahima s’est prononcé pour un dialogue interreligieux, invitant ses compatriotes à tourner le dos à l’intolérance religieuse. Il a fait observer que le monde des croyants s’active pour instaurer un dialogue interreligieux plus particulièrement le dialogue islamo-chrétien dans un sermon à l’occasion d’une fête musulmane de Tabaski. Déplorant les violences entre musulmans et chrétiens qui ont fait des centaines de morts récemment à Jos Au Nigéria, El Hadj Inoussa Bourahima a indiqué que chaque chrétien et chaque musulman doit cultiver la paix, l’amour du pardon et du prochain, appelant les croyants au Togo à éviter les violences pour le bonheur des populations.

Conclusion

Somme toute, l’histoire de l’Eglise est jonchée par toute une pléiade d’approches du dialogue interreligieux. De l’époque patristique jusqu’au second  Concile du Vatican, le dialogue a pris de multiples formes. Le Concile Vatican II a marqué une étape décisive et nouvelle dans les relations de l’Eglise catholique avec les croyants des autres religions. Les mutations rapides de la société contemporaine et l’approfondissement du mystère de l’Eglise-sacrement universel du salut-(LG 48) ont facilité cette attitude à l’égard des religions non chrétiennes. Ce dialogue va au-delà du simple fait de se parler et englobe l’ensemble des rapports interreligieux, positifs et constructifs avec des personnes et des communautés de diverses croyances, afin d’apprendre à se connaitre et à s’enrichir les uns les autres. Le dialogue devient alors une source d’espérance et un facteur de communion dans une transformation réciproque. Aussi, le Saint Esprit est-il Lui-même le guide qui conduit le projet de Dieu dans l’histoire des individus et du genre humain à sa réalisation jusqu’à ce que les fils de Dieu dispersé par le péché soient rassemblés dans l’unité.

         

7. Résume critique des théologies chrétiennes des religions

Introduction

Faut-il être fermé sur soi-même ou s’ouvert aux autres ? L’une ou l’autre position constitue une halte invitant tout homme à un choix, choix qui pourtant demeure difficile à faire vue que chaque position a ses côtés positifs et négatifs. Le juste milieu s’avère donc nécessaire à chercher. Cette analyse ne se limite pas seulement au niveau des relations individuelles ou mieux, interpersonnelles ; elle concerne aussi les institutions dont celles religieuses qui font l’objet de notre exposé. En effet faut-il être exclusiviste ou inclusiviste ou même pluraliste ? Telle est le choix nécessaire à opérer par chaque religion. Le choix, loin d’être unanime, on note des religions exclusivistes, d’autres inclusivistes et d’autres enfin pluralistes. Après avoir défini les trois termes clés à savoir l’exclusivisme, l’inclusivisme et le pluralisme, nous nous pencherons sur les enseignements de base de certaines religions principalement la Religion Traditionnelle Africaine (RTA), l’Islam, l’Hindouisme et le Bouddhisme.

 

7.1 Exclusivisme

L’exclusivisme se définit comme étant le caractère des gens exclusifs.

Est exclusif :

- ce qui appartient à un seul par privilège spécial. Exemple : la propriété exclusive d’un modèle.

- ce qui repousse tout ce qui est étranger. Exemple : un amour exclusif.

-ce qui exclut toute  autre chose comme incompatible. Exemple : droit exclusif de tout autre droit.

-Ce qui est de parti pris ; absolu : Exemple : être exclusif dans ses idées.

            L’exclusivisme se fait remarquer dans toutes les religions du monde.

            Dans le catholicisme par exemple, le conclave a cet aspect d’exclusivisme. Etymologiquement, il est une chambre fermée à clef et désigne à la fois le lieu où les cardinaux sont enfermés pour procéder à l’élection du Pape et l’assemblé même des cardinaux ainsi enfermés. Au sein même du christianisme, beaucoup d’églises  et de sectes sont exclusives. C’est le cas par exemple de l’église des Assemblés de Dieu et des témoins de Yéhova.

            Mais est-ce là la norme ou le bel exemple ? Ecoutons ce que nous dit Ronald MODRAS : « la variété des déclarations doctrinales,des théologies et des structures ecclésiale dont témoigne le Nouveau Testament ne permet à une église d’avoir des prétentions exclusive ou absolues en ce qui concerne  ses enseignements particuliers ou sa pratique particulière. Il n’y a ni dogme,ni rituel,ni structure d’organisation qui domine l’histoire et par conséquent la possibilité d’une reforme nécessaire. Il n’y a pas de théologie,que ce soit celle d’Augustin,de Thomas d’Aquin,de Luther ou de Calvin,qui ne pusse être corrigée,améliorée ou surpassée. Il n’y a pas de structure ecclésiale, qu’elle soit papale, épiscopale, presbytérale ou congrégationnelle qui puisse prétendre de façon exclusive à des origines apostoliques. L’ordre de l’Eglise aujourd’hui peut et doit rester ouvert en principe à toutes les possibilités qui ont existé dans  l’Eglise du Nouveau Testament. Les factions et les schismes ne peuvent être utiles mais ils résultent de plusieurs facteurs : quand ce qui est humain est considéré comme divin, quand ce qui est accidentel est considéré comme essentiel, quand ce qui est périphérique est comme central, quand ce qui est conditionné par l’histoire est considéré comme irréformable et absolu.

 

 

7.2  L’INCLUSIVISME     

L’inclusivement accepte que le salut soit produit dans les religions, mais il leur refuse une autonomie salvifique, à cause de l’unicité et de l’universalité du salut Jésus-Christ. Cette position est sans doute la plus commune parmi les théologiens catholiques, bien qu’il y est des différences entre eux. Elle cherche à concilier la volonté é salvifique universelle de Dieu avec le fait que tout homme se réalise en tant que tel à l’intérieur d’une tradition culturelle qui trouve dans la religion correspondante son expression la plus élevée et son fondement ultime.

L’inclusivisme est alors un concept théologique de certaines églises chrétiennes, particulièrement l’Eglise catholique romaine, qui affirme, à la suite du théologien Karl Rahner, que tout homme est un chrétien anonyme que l’on peut considérer comme ayant une foi chrétienne implicite. Il est à noter que cette conception a été progressivement adoptée part l Eglise catholique romaine à la suite du Concile Vatican II, en s’inspirant des réflexions de Karl Rahner sur les chrétiens anonymes. La croyance en une forme d’inclusivisme est aussi contenue dans la constitution Unitatis Redintegratio et la déclaration Subsistit in, où l’Eglise Catholique est décrite comme le centre de gravité ecclésial, les églises particulières et communautés reformées devant graviter autour. L’inclusivisme veut donc inclure en son sein toutes les religions en reconnaissant leurs richesses et le témoignage moral de leurs membres. Il préconise l’union de toutes les religions en un seul bloc en vue de la paix et la justice dans le monde. On reconnaît alors certaines valeurs dans toutes les religions. La valeur de ces religions réside dans le fait de promouvoir le royaume, le salut et le bien être de l’humanité. C’est pourquoi la déclaration Notra Aetate affirme que même si l’on ne peut nier la valeur des autres religions, celles-ci tiennent leurs éléments de vérité dans la Révélation de Jésus-Christ, une démarche que l’on appelle christocentrisme. Notons qu’une approche similaire fut adoptée par dans la déclaration Dominus Jésus.    

 

7.3  LE PLURALISME  

En sciences sociales, le pluralisme est un système d’organisation politique qui reconnaît et accepte la diversité des opinions. Le pluralisme est un cadre d’interactions dans lequel différents groupes montrent suffisamment de respect et de tolérance pour coexister et interagir dans un climat plus harmonieux que conflictuel et sans volonté d’assimilation.

En religion il existe une théologie du pluralisme religieux. Elle fut élaborée par le jésuite Jacques DUPUIS. Le pluralisme religieux se définit comme la diversité des religions. C’est un phénomène qui interpelle toute religion surtout le christianisme qui se veut universel.

Du dur énoncé du concile de Florence (1442) vouant au « feu éternel » païens, juifs, hérétiques, schismatiques, à la si flexible déclaration Nostra Aetate du Concile Vatican II (1962-1965) invitant l’Eglise Catholique à ne rien rejeter « de ce qui est vrai et saint » dans les religions non chrétiennes, à considérer « avec un respect sincère ces manières d’agir et de vivre, ces règles et ces doctrines  qui, quoiqu’elles diffèrent en beaucoup de points de ce qu’elle tient et propose, apportent un rayon de la Vérité qui illumine tous les hommes (n°2), le chemin parcouru par le catholicisme est celui de la fermeture à l’ouverture.

De fait, l’Eglise Romaine porte un regard attendri sur le Judaïsme et l’Islam ses sœurs en monothéisme, avec une mention toute spéciale pour le premier, les Juifs étant selon l’expression du Pape Jean-Paul II « nos frères aînés dans la foi ». Mais elle considère aussi que les sagesses orientales (formulées au travers de Tao-Te King, de Lao-Tseu, ou des textes confucéens) ne sont pas contradictoires, dans leurs principes et leur morale avec notamment la dimension de salut de la religion chrétienne. Ce qui n’a pas pour autant empêché le Pape Jean-Paul II d’être assez critique sur le bouddhisme dans son livre Entrez dans l’espérance.

Rome admet que les religions traditionnelles africaines ont le sens d’un Dieu unique et personnel. Le miracle de la Pentecôte rappelle Claude GEFFRE, théologien dominicain, où l’homme célèbre le mystère de Dieu dans la pluralité des langues, répond à l’épisode de la tour de Babel où les hommes ont été tentés de s’unir pour s’adresser à Dieu ; il convie donc à respecter le pluralisme religieux nécessaire pour cerner la vérité de Dieu, du monde et de l’homme. Cela ne signifie pas que les Catholiques doivent mettre entre parenthèses leur foi. Reconnaissance de la valeur de l’autre et mission évangélisatrice vont toujours ensemble.

Le monde orthodoxe quant à lui porte un regard plutôt critique sur les autres religions qu’il qualifie d’hétérodoxes. Toutefois il n’est pas exclusiviste. Valizar GAJIC, orthodoxe, membre de la section française de la Conférence Mondiale des Religions pour la Paix, déclare à ce titre : « Nous disposons d’une doctrine révélée par le Fils même de Dieu : c’est le lien le plus serré. Les autres suivent des chemins moins directs, ce qui ne veut pas dire qu’ils sont faibles. Convaincu de la rectitude de ma voie, je serai très heureux que mes frères dans l’altérité s’y engagent aussi car l’errance sur des sentes sinueuses est pénible. Mais, si surprenant que cela paraisse, j’avoue qu’il est possible de s’égarer sur une corde raide… »

Dans la tradition protestante, on note en général une certaine méfiance vis-à-vis des autres religions. Mais les églises protestantes proches du Conseil Œcuménique des Eglises ont un regard positif sur la diversité religieuse surtout envers les croyants monothéistes.

Quelles peuvent être l’origine et la cause de la diversité religieuse ? Selon le théologien Bernard HUGEUX, le pluralisme religieux est dû à la diversité des cultures. Une religion est toujours liée à un contexte culturel et la culture elle-même exprime toujours quelque chose de notre rapport au divin. Dans son livre Entrez dans l’espérance, le Pape Jean-Paul II affirme : « Au lieu de nous étonner que la Providence permette une aussi grande diversité de religions, nous devrions plutôt être surpris par le nombre d’éléments qui leur sont communs » et ajoute-t-il dans l’encyclique Redemptoris Missio au n°55 : « Le pluralisme religieux est un défi positif ».

En d’autres termes, la diversité religieuse est l’expression de la liberté de l’Esprit qui, agissant dans le cœur de l’homme, agit également dans la diversité des cultures et des mentalités. Nous sommes donc plus proches de l’Esprit de Pentecôte que celui de la tour de Babel.

Toutefois, le pluralisme religieux pratiqué avec trop de tolérance peut engendrer un syncrétisme religieux (tendance inclusiviste).

 

 

8. LES ENSEIGNEMENTS DE BASE DES PRINCIPALES RELIGIONS AFRICAINES.

 

Il s’agit surtout de la présentation de quatre grandes religions qu’on retrouve en terre africaine : la Religion Traditionnelle Africaine (RTA), l’Islam, le Bouddhisme et l’Hindouisme. Nous précisons d’ores et déjà que toutes ne sont pas d’origine africaine à part la RTA qui est authentiquement africaine. Les autres ne sont qu’importées.

 

8.1 Les enseignements de base de la RTA

La Religion Traditionnelle Africaine (RTA) n’est pas une religion unilatérale, ne regroupant en son sein qu’une seule culture. De cette considération, on comprend que la RTA rassemble en son sein toutes les cultures africaines. Comment donc parler de cette religion aux multiples faces culturelles ? En fait, point n’est besoin de porter l’inquiétude loin. Il s’agit pour nous de relever quelques éléments caractéristiques constituants la toile de fond de cette religion à travers toutes nos cultures. Nous verrons spécialement les notions de Dieu, de la création, de l’au-delà, des intermédiaires et Dieu dans l’aujourd’hui des hommes.

 

8.1.1 Dieu et la création

Les Africains, dans leur ensemble, se sont posés, tout comme les autres hommes, la question énigmatique de l’origine du monde et de l’homme. La réponse presque unanime qui jaillit de toutes les cultures de la RTA est que le monde et l’homme sont l’œuvre d’un Etre suprême, Tout-Puissant. La création n’est donc pas fruit du hasard. La RTA désigne cet Etre toujours au singulier indiquant par là combien cet Etre est unique en son genre. Chaque culture lui attribue un nom ; ainsi le nomme t-on Sangband chez les Nawdeba, Mawu chez les Ewé, Esso chez les Kabyè, Yendu chez les Moba…

Vu sa toute puissance, on lui attribue, en premier, toute la création de l’univers y compris l’homme.

 

8.1.2 L’au-delà et la mort

 

L’au-delà est une réalité que reconnaît la RTA. En effet, toutes les cultures reconnaissent l’existence d’un monde invisible. C’est le monde par excellence de L’Etre suprême, des esprits (bons ou mauvais), des ancêtres, des génies.

 

Cette croyance en l’au-delà soutient celle de la vie après la mort. « Les morts ne sont pas morts » s’exprimera B. Diop. C’est le principe de « vie-mort-vie » qui est ainsi affirmé. Dans l’au-delà, les âmes des ceux qui ont vécu en pratiquant la justice, la vérité et en faisant le bien rejoignent les ancêtres. En  effet, ces derniers sont qualifiés de protecteurs des vivants. En retour les vivants leur doivent des sacrifices et libations en guise de soutien et de reconnaissance.

 

Cependant ceux qui ont vécu en faisant le mal (sorcellerie, envoutement…) ne sont pas accueillis par les ancêtres après leur mort. Ils errent partout et deviennent des fantômes, des esprits mauvais.

Egalement, dans les cultures de la RTA, on remarque la certitude du phénomène de la réincarnation, une notion aussi confuse et aux multiples aspects d’une culture à une autre.

 

8.1.3 Les intermédiaires

Ils sont chargés d’assurer le pont entre le monde visible et celui invisible du  fait que ce dernier n’est pas facilement accessible au commun des mortels. Les intermédiaires sont de deux catégories : les intermédiaires visibles et les intermédiaires invisibles.

8.1.3.1 intermédiaires visibles

Ce sont des hommes vivants parmi les hommes mais avec une spécificité. Ils sont généralement dotés de certains privilèves potentiels leur permettant d’entrer en communication avec le monde invisible des ancêtres et des génies. Ils sont chargés de décortiquer  et d’interpréter certains signes, événements, phénomènes  ayant pour origine le monde invisible. C’est généralement le rôle que jouent les devins ou charlatans : Taadba chez les Nawdeba, Tiiya chez les Kabyè, Bokowo chez les Ewé. Un homme comme une femme peut remplir cette tâche. Une autre catégorie de ces intermédiaires est celle des hommes sacrificateurs chargés d’immoler les victimes animales lors des sacrifices.

 

8.1.3.2 Les intermédiaires invisibles.

Ce sont généralement les ancêtres, les bons génies. En effet, selon la conception de la RTA, Dieu existe mais il est trop loin des hommes qu’il ne peut entendre la voix de ces derniers. C’est alors qu’on comprend le rôle des intermédiaires invisibles qui présentent à Dieu les requêtes des hommes et leur obtiennent des faveurs.

 

8.1.4 Dieu dans l’aujourd’hui des hommes.

Dieu dans la RTA est un Etre foncièrement bon d’où les noms théophores montrant sa bienveillance sur les hommes : Essozimna (c’est Dieu qui sait, en Kabyè), Diissirama (c’est Dieu qui m’a donné, en Nawdm), Mawulawè (Dieu accomplira, en Ewé)… La toile de fond significative de ces noms est que Dieu ne saurait chercher le malheur de l’homme. Dieu est bien sûr loin des hommes mais Il ne cesse d’intervenir dans la vie de ces derniers d’une manière ou d’une autre.

 

8.2 LES ENSEIGNEMENTS DE BASE DE L’ISLAM

Les enseignements

L’unicité de  Dieu et le concept de la vie après la mort  sont les articles de la foi. En Islam, point de clergé hiérarchique.

En effet, ses enseignements sont divinement révélés par le saint Coran. Ce texte sacré  est devenu le fondement de la religion musulman.

Le coran se présente sous la forme de 114 Sourates divisé en 6226 versets.

Les sourates dessinent les contours d’une doctrine simple accessible au plus grand nombre, plus proche du déisme de Voltaire que des théologiens chrétiens ou hébraïques.

Ce coran proclame la restauration d’un monothéisme authentique, dépouillé des influences corruptrices  du Judaïsme et du christianisme. Il prescrit à chaque homme de se soumettre à Dieu. Il organise la religion de façon très simple autour de 5 rituels fondamentaux, les piliers qu’il suffit à chaque fidèle de suivre pour accéder à la vie éternelle. Il détaille aussi de façon précise les règles de la société y  compris le droit de la guerre, le droit commercial et le droit filial.

Les 5 piliers de l’islam

-La shahada : la profession de foi en un Dieu et en son prophète Mahomet. (Il n’y a de Dieu que Allah et Mahomet est son envoyé).

-Salah : la prière quotidienne : elle doit être précédée par des ablutions  et prononcée en direction de la Mecque cinq fois par jour ; à l’aube, à midi,  l’après midi, au couché du soleil et le soir. Le vendredi, les musulmans sont invités à la prononcer à la Mosquée.

- L e jeune du mois de Ramadan.

Les musulmans se doivent de jeûner du lever au coucher du soleil chaque jour  du mois de ramadan, mois du calendrier lunaire  des Arabes parce que le prophète aurait reçu ce mois là, la première révélation divine.

Du jeûne sont exemptés les malades, les femmes enceintes, les enfants et les personnes qui accomplissent le djihad. La fin du jeune est marquée par la grande fête de l’îd ad fîtr ou fête de  la rupture de jeûne.

-L’impôt islamique zakat : il est estimé à  un dixième environ des revenus et il s’y ajoute l’aumône charitable au bon vouloir de chacun (çadaqa)

-Le pèlerinage à la Mecque ou hadj.

Il est recommandé à tous les musulmans au moins une fois dans la vie  et il se déroule   chaque année du 7 au 13 du dernier mois de l’Hégire.

Pendant le pèlerinage  se déroule la fête du sacrifice ou grande fête (aid el kebir) en souvenir d’Abraham père du monothéisme, chaque famille sacrifie un mouton.

Il est à noter par ailleurs que le Djihad  ne figure pas parmi les 5 piliers de l’islam

La Sunna ou la tradition musulmane

A coté du coran il y a la sunna  qui veut dire coutumes ou règles. La sunna fait donc  références aux usages, coutumes et manières de vivre du prophète Mahomet qui ne sont pas contenues dans le coran et qui deviennent pour les musulmans une référence de vie. Pour eux c’est un exemple à imiter.

-Selon la Sunna, parmi les prophètes (doués de constances) : Noé, Abraham, Moïse, Jésus, Mohammed est le sceau de tous les prophètes par ce que  révélateur du coran parole définitive d’Allah

-Croire au dernier jour et en la vie de l’au-delà : après le tombeau  où il y aura un premier jugement  individuel  suivi du jugement final.

 -Croire à la prédestination

 C’est être convaincu  que «  toutes les actions  des hommes (tant libres que nécessaires) sont voulues par  la volonté du Tout Puissant Allah, selon un prétexte qu’il a défini pré-éternellement. Rien ne peut se passer  dans le monde sans la permission de Dieu Allah.     

8.3 LE BOUDDHISME ET L’HINDOUISME

8.3.1 Le Bouddhisme

 

C’est l’un des plus grandes religions du monde. Elle est prêché par un sage de l’Inde antique à qui on donne le nom de Bouddha c'est-à-dire celui qui s’est "éveillé" à la vérité. Ici, nous nous pencherons essentiellement sur les notions de Dieu, de la création, de la souffrance, de la vie après la mort et de la morale.

 

8.3.1.1 Notion de Dieu

Le Bouddhisme ne proclame ou ne confesse pas un dieu. Il enseigne une méthode destinée à découvrir la réalité qu’il considère cachée derrière les apparences  et  à se libérer définitivement des illusions, des passions et de la douleur inhérente à toute forme d’existence.

 

8.3.1.2 Notion de la création

La notion de création n’y est pas assez explicite. Ici, tous les êtres vivants transmigrent sans cesse d’une existence à une autre, passant par les états d’homme, d’animal, de revenant affamé et de damné. Les êtres comme les choses ne sont donc que des composés vides de principe personnel.

 

8.3.1.3 Origine de la souffrance

Pour le Bouddhisme, tout est douleur puisque tout ce qui existe est composé d’éléments de durée limitée. Il apparaît un jour, déterminé par des causes multiples, se transforme sans cesse et périt inéluctablement. La douleur est donc liée à cette impermanence dont tout être est sujet. Elle a pour origine la soif c'est-à-dire le désir qui s’attache au plaisir et accompagne donc toute existence. Cette soif a pour cause l’ignorance de la réalité qui  engendre les racines du mal que sont la convoitise, la haine et l’erreur d’où naissent les autres vices.

La cessation de cette douleur ne serait atteinte que par la « voie de la délivrance »
ou la « sainte voie à huit membres » : opinion correcte, intention correcte,
parole correcte activité corporelle correcte, moyen d’existence correcte, effort
correct, attention correcte, concentration mentale correcte.
Cette cessation de la douleur qui n’est autre que celle des racines du mal est nommée « Nirvanà » ou « extinction ». Il s’agit d’une étape où l’on ne connaîtra plus  la renaissance mais un état de sérénité imperturbable où l’on est définitivement  à l’abri de la douleur, de la crainte et du doute. Il s’agit d’un état de béatitude éternelle.

 

8.3.1.4 La Vie après la mort

La mort pour le Bouddhiste est un changement d’état, une transformation. Chaque mort est suivie d’une renaissance causée par le désir de s’attacher au plaisir pour goûter encore aux voluptés et déterminée par la valeur morale des actes précédemment accomplis. Pour échapper à ce cycle et atteindre la béatitude suprême, il faudra observer rigoureusement les lois de la morale et pratiquer assidûment les méthodes psychiques, permettant les unes à découvrir et à se convaincre de la vérité et les autres à épuiser progressivement les passions et à développer la sérénité.

 

8.3.1.5 La Morale

 

Pour atteindre le nirvànà auquel tous les bouddhistes sont appelés et afin d’échapper au cycle de la renaissance, le Bouddha impose dans son enseignement une discipline rigoureuse à chacun de ses adeptes. Il s’agit de la « Sainte voie à huit membres » précitée.

Chacun de ces membres doit être visé au moyen de diverses méthodes dont la première est l’abstention rigoureuse de toue mauvaise action dont le meurtre, le vol, la luxure, le mensonge et la consommation de boissons enivrantes.

Les autres méthodes visent à vaincre l’ignorance et à supprimer les passions. Il s’agit de se convaincre de la vérité, de se débarrasser des illusions, des opinions fausses, des passions etc.

 

8.3.2 L’HINDOUISME

C’est l’une des plus anciennes religions du monde qui tire son origine du brahmanisme auquel il emprunte plusieurs rites

8.3.2.1 Notion de Dieu

Le panthéon hindouiste fait mention de trente trois dieux. De ces trente trois, l’hindouisme accorde une importance particulière à un, qu’il considère comme trônant au-dessus des trente deux autres. Il s’agit du Brahman qui se manifeste sous trois aspecte : Le Brahmà, le Visnù et le Siva que la tradition donne comme présidant le premier à la création, le deuxième à la conservation de l’univers et le dernier sa destruction.

8.3.2.2 Notion de la création

L’hindouisme n’admet pas une création ex nihilo. Le monde est soumis à un cycle au cours duquel il est émis par l’action du Brahmà. Il est ensuite détruit par l’énergie de Siva au cours de ce que l’hindouisme nomme la nuit du Brahman, après un temps de conservation par Visnù ; et le cycle reprend.

8.3.2.3 Origine de la douleur

Tout comme les autres grandes religions de l’Inde, l’hindouisme porte un souci particulier à la question de la souffrance dont la libération est en lien intrinsèque avec le cycle de la renaissance et de la rétribution qu’il prêche.

En Hindouisme, toute existence, outre celle de la Personne Suprême qui est  l’Absolu, gémit sous le poids des fluctuations du relatif et n’est pas immuable. Aussi, faudra-t-il adopter les trois principales voies ci-après pour atteindre la libération :

            -Discipline des actes

            -Discipline de la connaissance

            -Discipline de la dévotion

Cette libération définitive sera donc l’état où l’on est à l’abri de toute mutation ou renaissance, état de grande sérénité et de paix véritable.

 

8.3.2.4 La vie après la mort

L’hindouisme véhicule une croyance aux renaissances successives (samsàra) auxquelles, sous le poids des actes accomplis dans les existences antérieures, tout homme est astreint jusqu’à sa parfaite purification.

Aussi, à chaque renaissance, l’homme est appelé à observer aussi rigoureusement que possible la discipline que préconise l’Hindouisme. Seule la libération complète, fruit d’une vie exemplaire, l’épargne du cycle de la renaissance et lui accorde une vie bienheureuse pouvant l’assimiler aux dieux.

 

8.3.2.5 La morale

Une notion qui s’est rapidement et efficacement développée dans l’Hindouisme est celle de l’Ahimsà. Il s’agit de  la non violence dont la pratique est très radicale. Elle implique l’interdiction de frapper, de tuer et s’étend même jusqu’au non désir de nuire, l’intention en Hindouisme comptant autant que le fait ou l’acte. Notons ici que l’Hindouisme parle du mal que l’on commet « en action, en parole et en pensée »

C’est donc une religion qui établit une discipline sévère en vu de la libération complète ou de la délivrance et afin d’échapper au cycle de la renaissance qui est lié à l’idée de la rétribution.

 

 Conclusion

Après cet exposé sur les enseignements de base des grandes religions, il se révèle  qu’on ne perd rien à connaître. Connaître offre le terrain favorable à la réflexion et au discernement, connaître offre un vaste champ de bons choix et des refus. En effet, il est avant tout nécessaire de se connaître : savoir qui on est permet de sauvegarder son identité. De ce point de vue, chaque religion aurait un intérêt à se connaître dans sa doctrine et ses perspectives, ceci pour éviter de tomer dans une pratique  syncrétiste, cette dernière illustrée par l’inclusivisme dont nous venons de parler.

D’autre part, il est nécessaire de connaître l’autre pour se rendre compte qu’on n’a pas le monopole de la vérité, du bon…De ce point de vue, chaque religion devra chercher à découvrir les autres religions notamment dans leurs traits caractéristiques. Cela témoigne d’un esprit d’ouverture et constitue une véritable piste de dialogue. C’est ce qui échappe à certaines religions qui s’enferment sur elles-mêmes. C’est cette attitude que nous avons d’illustrée par l’exclusivisme dont font preuve certaines  religions. Au regard de toutes considérations, l’esprit pluraliste semble être la position meilleure parce que constituant la position medium des deux précédentes : l’exclusivisme et l’inclusivisme.

9-Les qualités et les conditions nécessaires pour un dialogue interreligieux fructueux

Introduction

La rencontre entre les religions est toujours difficile et  onéreuse qui repose sur cette conviction, comme dit Claude Geffré : « que le Dieu qui nous réunit est celui qui nous divise. »Le dialogue est d’autant plus délicat qu’il se veut plus respectueux de l’autre, plus soucieux de vivre l’altérité et de permettre à l’autre d’exprimer ce qui fait sa richesse. Notre travail  porte sur les qualités et les conditions pour un dialogue interreligieux fructueux. Nous aborderons entre autres, la connaissance des autres religions, la guérison des mémoires historiques.

9.1 L’identité religieuse définie

A notre époque ou le genre humain devient de jour en jour plus étroitement uni et où les relations entre les divers peuples augmentent, l’Eglise doit prendre en compte son identité religieuse dans son rapport avec  les autres confessions religieuses pour  ne pas  se laisser entrainer à tout vent de doctrine. L’Eglise Catholique s’identifie aux autres confessions religieuses par sa foi trinitaire, sa foi au verbe incarné, Fils de Dieu né de la Vierge Marie ; elle reconnait la Vierge Marie comme Mère de Dieu et de l’Eglise. L’Eglise apparaît comme un peuple qui  tire son origine de l’unicité de Dieu en trois personnes : Diu le Père, créateur du ciel et de la terre,  de l’univers  visible et invisible et tout ce qu’ils contiennent ; Dieu le Fils et Dieu l’Esprit-Saint. Jésus-Christ est l’Envoyé du Père pour inaugurer le Royaume de dieu sur terre en fondant l’Eglise. L’Esprit –Saint sanctifie et vivifie l’Eglise. Le symbole  des Apôtres est le résumé de la foi chrétienne. Dans le symbole nous confessons l’unicité, la sainteté, la catholicité et l’apostolicité de l’Eglise fondée par le Christ après la résurrection. Le Christ, l’unique médiateur  entre Dieu et les hommes, crée et continuellement soutient sur la terre, comme un tout invisible, son Eglise sainte, communauté de foi, d’espérance et  de charité par laquelle il répand à l’intention  de tous la vérité et la grâce. Son enseignement se fonde sur les Saintes Ecritures, c’est-à-dire  l’enseignement de Jésus  lui-même,
la Tradition de l’Eglise et le Magistère. Elle a pour mission  d’annoncer  et elle
est tenue d’annoncer sans cesse le Christ qui est « la Voie la Vérité et la Vie »(Jn14,6),
dans lequel  les hommes doivent trouver la plénitude de la vie religieuse et dans lequel Dieu s’est réconcilié toutes choses (2Cor5,18-19).Cette mission  de l’Eglise trouve son fondement même dans l’unité du genre humain .cette unité  radicale  qui appartient à l’identité même 
de l’être humain se fonde sur le mystère de la création divine. Le Dieu Un dans lequel
nous croyons, Père, Fils et Saint-Esprit, Trinité Très Sainte  a crée  l’homme et la femme avec une attention particulière selon le récit de la Genèse (Cf. Gn1, 26ss ; 2, 7, 18-24).
Cette affirmation contient et communique  une profonde vérité: L’unité de l’origine divine de toute la famille humaine, de tout homme et de toute femme, qui se reflète dans l’unité de l’image divine que chacun porte en lui (Gn1, 26) et oriente par elle-même à une fin commune qui est Dieu (Nostra aetate, n°1). Aussi , l’Eglise trouve son identité et sa tâche de « sacrement universel du salut « en étant précisément « signe et instrument de l’union intime avec Dieu  et de tout  le genre humain (LG,1).Cela signifie que l’Eglise est  appelée à travailler de toutes ses forces par l’évangélisation ,la prière et le dialogue pour que disparaissent entre les hommes les fractures  et les divisions  qui les éloignent de leur  principe et fin et les rendent hostiles  les uns aux  autres. » »Tous les hommes sont donc appelés à cette unité  du peuple  de Dieu,  qui préfigure et promeut la paix universelle et à laquelle appartiennent sous diverses formes ou sont ordonnés et les fidèles catholiques et ceux qui, par ailleurs, ont foi dans le Christ, et finalement  tous les hommes sans exception que la grâce de Dieu appelle au salut.

 

9-2       Ouverture 

L’ouverture dont il est question ici est une disposition, une attitude qui permettent à l’homme de nouer des contacts amicaux avec les membres de sa propre religion et surtout avec ceux des autres religions.il s’agit de travailler de manière à attiré l’estime des membres de différentes religions en vue de favoriser de bonnes relations, de soutenir des initiatives adaptées aux exigences du temps. Pour cela il est souhaitable de promouvoir  des rencontres entre les croyants  appartenant à des religions diverses. L’ouverture touche aussi le domaine doctrinal, ainsi que les relations quotidiennes entre les croyants qui sont appelés au respect mutuel et à la connaissance commune. L’on parle  également du dialogue de la vie et dans les affaires sociales l’Eglise catholique est en avance avec la construction d’écoles, des hôpitaux… L’ouverture dans ce cas contribue énormément à la coexistence pacifique et à la collaboration en vu d’une société plus juste où l’homme pourra croitre  dans l’être et dans l’avoir.

La famille à ce niveau mérite  une particulière attention car elle constitue la cellule de base, le noyau à partir duquel l’éducation religieuse modèle tout homme. C’est dans la famille que l’on apprend à partager, à confronter, les opinions, à enrichir les expériences spirituelles et les formes de prière  comme voie de rencontre avec Dieu.

L’esprit d’ouverture consiste aussi à élargir  notre manière de voir, de considérer notre religion et celle d’autrui. Il s’agit de briser le cercle  des évidences établies. L’ouverture  consiste  essentiellement en un mouvement de l’esprit qui questionne  et qui s’interroge devant le spectacle  de ce monde pluraliste où les religions poussent comme des champignons au jour le jour; tenter  d’en comprendre le sens  et peut-être même les raisons. L’ouverture c’est aussi un effort  soutenu dans le but de sortir du solipsisme  pour aller vers les autres et apprendre d’eux dans un  esprit d’humilité et de franchise.

9.3. La connaissances des autres religions

 « L’Eglise catholique ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions non chrétiennes… » (Nostra aetate, n° 2). Pour en arriver là, elle a besoin de connaitre ces religions, de les scruter. La connaissance est importante afin de proposer des pistes ou des bases d’un dialogue fructueux. Le but de cette connaissance  pour l’Eglise Catholique est de pouvoir exhorter ses fils pour que avec  prudence et charité, par le dialogue et par la collaboration avec ceux qui suivent  d’autres religions et tout en témoignant de la foi et de la voie chrétienne, ils reconnaissent, préservent et fassent progresser les valeurs spirituelles, morales et socioculturelles qui se trouvent en eux (Nostra aetate n°2). Ainsi donc, l’on est arrivé à relever que dans l’hindouisme, les hommes scrutent le mystère divin et l’expriment par la fécondité inépuisable des mythes et par les efforts pénétrants de la philosophie. Ils cherchent la libération des angoisses de notre condition, soit par les formes de la vie ascétique, soit par la méditation profonde, soit par le refuge en Dieu avec amour et confiance.

L’islam

Les musulmans adorent le Dieu Un, miséricordieux et Tout puissant, créateur du ciel et de la terre, qui a parlé aux hommes .Ils cherchent à se  soumettre par toute leur âme aux décrets de Dieu comme s’est soumis à Dieu Abraham, auquel la foi islamique se réfère volontiers. Bien qu’ils ne connaissent pas Jésus comme Dieu, ils le vénèrent  comme prophète ; ils honorent sa mère virginale Marie et parfois même l’invoquent avec piété. Ils attendent le jour du jugement où Dieu rétribuera tous les hommes ressuscités. Aussi ont-ils en estime la vie morale et rendent-ils un culte à Dieu surtout par la prière et le jeûne

 Le judaïsme

 L’Eglise du christ reconnait que les prémices de sa foi et de son élection se trouvent selon le mystère divin du salut, dans les patriarches, Moïse et les prophètes. L’Eglise ne peut oublier qu’elle a reçu la révélation de l’Ancien testament par ce peuple auquel, Dieu dans sa miséricorde a daigné conclure l’antique alliance. Les apôtres, fondements et colonnes de l’Eglise, sont nés du peuple juif, ainsi qu’un grand nombre des premiers disciples qui annoncèrent l’évangile du Christ.

 La Religion Traditionnelle Africaine (RTA)

Les adeptes de cette religion reconnaissent l’existence d’un Diu  Unique, Créateur de toutes choses. Il est le Tout autre et pour l’atteindre il est très difficile, d’où l’urgence de passer par de intermédiaires visibles et invisibles à savoir: les devins, les divinités, les ancêtres, les esprits.

Toute cette connaissance des autres religions permet de repérer les aspects sur lesquels l’on peut aborder telle ou telle religion sans risque confusion ni de polémique en vu d’un dialogue interreligieux fructueux, souple tolérant, compréhensif et fructueux.

9.4  Le respect

Selon le Dictionnaire Universel, le respect est la considération que l’on a pour quelqu’un et que l’on manifeste par une attitude déférente envers lui. Ainsi défini, le respect doit être une attitude qui imprègne ou devrait imprégner toutes les activités du dialogue.

Le dialogue, pour l’Eglise, se fonde sur la vie même de Dieu un et trine ; le Christ s’est unit tout homme, l’Esprit opère en tout homme : c’est pourquoi le dialogue se fonde aussi sur l’amour pour l’homme qui, en tant que tel, est la route première et fondamentale de l’Eglise et sur le lieu existant entre les cultures et les religions professées par les hommes (Redemptor hominis, n°12).

Cette relation amicale entre croyants des différentes religions naît du respect et de l’amour pour l’autre ; elle suppose l’exercice des libertés fondamentales pour pratiquer entièrement sa propre foi et la confronter avec celle des autres. Il s’agit du respect mutuel ou réciproque auquel tous les croyants sont appelés. Ceci doit commencer dans les familles où les fréquents rapports domestiques permettent de connaître les personnes dans leur histoire et dans leurs valeurs.

Pour que le dialogue soit favorable, il est urgent que les fidèles de toutes les religions s’engagent à respecter et à estimer les valeurs, la tradition et les convictions des religions d’appartenance les unes des autres.

Le dialogue est avant tout un style d’action, une attitude et un esprit qui inspirent le comportement. Il comporte attention, respect des différences, accueil, acceptation, compréhension et écoute de l’autre, à qui on laisse l’espace nécessaire à son identité, à sa foi, à son expression propre et à ses valeurs.

A cause des migrations, des voyages, des communications sociales et des options personnelles, les croyants de diverses religions et cultes se rencontrent facilement et souvent vivent ensemble. Il est donc nécessaire (surtout pour l’Eglise particulière) une pastorale qui encourage au respect, à l’accueil et au témoignage afin que les valeurs spirituelles animent nos sociétés. Le Concile Vatican II insiste sur l’exigence de promouvoir et de respecter en chaque interlocuteur, une vraie liberté sans contrainte aucune dans le domaine religieux. Dans sa Déclaration sur les relations de l’Eglise avec les religions non-chrétiennes, il est écrit : « L’Eglise catholique ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions. Elle considère avec respect sincère ces manières d’agir et de vivre, ces règles et ces doctrines qui, quoiqu’elles diffèrent en beaucoup de points de ce qu’elle-même tient et propose, cependant apportent souvent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes ». (Nostra aetate, n°2).

En matière du dialogue interreligieux, le respect mutuel doit être règle d’or et tout prosélytisme est à proscrire.

9.5  La guérison des mémoires historiques

Un grand défi reconnu qu’il faut apaiser par une pratique honnête du dialogue porte sur les diverses formes de divisions. Il a été remarqué qu’à l’intérieur de la société, la coexistence des groupes ethniques, des traditions, des langues et même des différentes religions rencontre souvent des difficultés dues à de graves hostilités réciproques. Les oppositions tribales mettent parfois en péril, sinon la paix, du moins la promotion du bien commun de l’ensemble de la société et créent aussi des difficultés pour la vie des Eglises et l’accueil des pasteurs d’autres ethnies. (Ecclesia in Africa, n°49). Il y a aussi les conflits, les attitudes racistes, les guerres, les affrontements entre les religions qui dominent encore trop le monde des relations humaines. C’est l’exemple de l’affrontement récent entre chrétiens et musulmans à Jos au Nigéria au cours duquel des milliers de chrétiens sont massacrés. A ceci s’ajoutent les préjugés de certaines religions qui ont la prétention de supériorité et d’absolutisme, la responsabilité de l’Eglise dans la colonisation et la Traite négrière (Commerce  des esclaves). Ces phénomènes constituent alors un grand obstacle au dialogue. Pour le rendre possible et fructueux, toutes les religions doivent lutter contre ces facteurs qui dégradent l’être humain, et en reconnaissant les erreurs, les fautes, les tors, les offenses commis, elles vont recourir au pardon et à la réconciliation par un dialogue qui se pratiquera d’abord au sein même de chaque Eglise famille ou communauté d’appartenance. « L’attitude du dialogue est le mode d’être du chrétien à l’intérieur de sa communauté comme avec les autres croyants, et les hommes et les femmes de bonnes volonté » (Ecclesia in Africa, n° 65).

Loin d’être un motif d’accusation ou de discrimination, le dialogue sera plutôt un témoignage de vie dans le respect des valeurs et des traditions religieuses propres à chacun, travaillant ensemble pour la promotion humaine et le développement à tous les niveaux.

Parlant du dialogue avec les musulmans, le Concile affirme : « Si au cours des siècles, de nombreuses dissensions et inimitiés se sont manifestées entre chrétiens et musulmans, le Concile les exhorte tous à oublier le passé et à s’efforcer sincèrement à la compréhension mutuelle, ainsi qu’’à protéger et à promouvoir ensemble, pour tous les hommes, la justice sociale, les valeurs morales, la paix et la liberté » (Nostra aetate, n°3).

Dans cette logique, s’inscrivent les démarches et les actes les plus concrets et les plus spectaculaires du pape Jean-Paul II. A Assise, à deux reprises (le 27 Octobre 1986 et le 22 Juin 2002), il a invité les responsables des plus grandes religions à prier chacune selon sa manière propre pour obtenir la paix dans le monde. Il a dénoncé l’antisémitisme. A la grande synagogue de Rome en Avril 1986, il déclare que les Juifs sont « nos frères bien-aimés et, d’une certaine manière, nos frères aînés.

Lors d’un colloque en 1997, Jean-Paul II affirme qu’un « examen lucide du passé peut démontrer clairement que l’antisémitisme est sans justification aucune et est absolument répréhensible ».

En mars 2000, il se rend au Mémorial de Yad Vaschem, où il trouve une rescapée qu’il avait secourue, et demande pardon à Dieu pour les actes antisémites commis par les chrétiens, dans un billet glissé dans une fente de mur des Lamentations. De même, le pape Jean-Paul II prit l’initiative de visiter d’autres religions notamment l’Islam et le Bouddhisme.

En novembre 1979, il visite la Turquie. En 1985, il effectue une visite à Casablanca au Maroc et là il prononce un discours devant 80000 musulmans. Concernant sa visite au Bouddhisme, il a rencontré le 14e Dalaï Lama, Tenzin Gyatso au Vatican en 1980, 1982, 1986, 1988 et 1990. Aussi, le pape Benoît XVI a-t-il emboîté le pas son prédécesseur.

Avec le Judaïsme : le 29 mai 2006, au cours d’un voyage en Pologne, le pape Benoît XVI se rend à Auschwitz, visite hautement symbolique du fait de la nationalité du pape qui est allemand.

Avec l’Islam : les relations avec l’Islam s’avèrent très vite difficile dans le pontificat de Benoît XVI, du fait du contexte international tendu après le 11 septembre 2001, mais aussi parce que le pape avait soutenu le refus de l’entrée dans la Turquie dans l’Europe.

Les extraits du propos du pape, lors du discours de Ratisbonne sont alors considérés par certains comme une provocation, chose que le pape n’a pas voulu.

Le 12 septembre 2006, dans un discours à l’Université de Ratisbonne, il déplore énergiquement toute violence commise pour des desseins religieux. Son argument est ceci : Dieu est le Verbe, le Logos, la raison primordiale. Or la raison s’oppose à la violence et passions.

Le défi du dialogue est, au fond, le défi de la transformation des relations entre les hommes, les notions et les peuples, dans la vie religieuse, politique, économique, sociale et culturelle. C’est le défi de l’amour du Christ pour tous les hommes, amour que le disciple doit reproduire dans sa vie comme nous le rappelle l’Evangile selon saint Jean: « A ceci tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres » (Jn. 13, 35).

 

9-6  L’égalité

Le principe d’égalité affirme que « tous les êtres humains sont égaux en droits, quels que soient leur sexe, leur origine, leur religion, leur culture, leur condition sociale, leur état de santé ou leur niveau d’instruction » (Déclaration universelle des droits de l’homme, art. 1er). C’est un principe inhérent à la nature humaine. Aussi, chaque gouvernement de Nations doit garantir et veiller au respect scrupuleux à ce droit fondamental qu’est l’égalité pour le bien commun de tous les citoyens sans distinction. La dignité de l’homme en dépend car elle a sa racine dans l’image et le reflet de Dieu qui sont en chaque être humain. Par là, toutes les personnes sont essentiellement égales entre elles[47]. Ainsi comprise, l’égalité ne signifie pas seulement le partage équitable des biens matériels mais aussi, et même plus, la reconnaissance de la valeur égale et unique de chacun à un niveau qui dépasse largement celui des besoins matériels. Enfants d’un même Père, nous sommes tous appelés à vivre en frères et sœurs et à promouvoir l’amour universel de Dieu excluant toute discrimination. C’est pourquoi, ‘’l’Eglise Catholique réprouve toute discrimination ou vexation opérée par des hommes en raison de leur race, de leur couleur, de leur classe ou de leur religion[48]. Elle déplore au nom de la charité religieuse de l’Evangile les persécutions et les haines contre tous les hommes quels qu’ils soient[49]. L’affirmation de l’égalité doit orienter le dialogue vers une communion fondée sur l’amour, l’estime et la compréhension mutuelle[50]. Ceci permet de découvrir en tout frère l’image de Dieu. L’égalité doit se manifester aussi dans l’accueil, le respect, le service de tout homme, considéré toujours dans sa dignité de personne et de fils de Dieu. A ce niveau, le dialogue interreligieux mettra au centre de ses actions la charité qui rassemblera cette dimension de frères dans la foi et en humanité parce que ‘’tout homme est mon frère’’[51].  Ainsi, la reconnaissance de l’égalité permet de nouer un style de dialogue plus humain et plus fraternel.

 

9-7       La liberté sociale (surtout la liberté religieuse)

 La Déclaration universelle des droits de l’homme en son article, affirme que « tous les hommes naissent libres et  égaux en dignité et en droits ».

Cette liberté est inscrite dans la nature humaine et est la base de toute liberté dans la société. Nous nous intéresserons ici à la liberté religieuse dans le sens du dialogue interreligieux. D’entrée de jeu, notons que la Déclaration universelle des droits de l’homme garantit cette liberté en son article 18; elle déclare: « toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction, seul ou en commun, tant en public qu’en privé, par l’enseignement, la pratique, le culte et l’accomplissement des rites ». Pour l’Eglise, la liberté religieuse est l’option personnelle de chaque être humain à pratiquer la religion de choix. Cette liberté soustrait les hommes à toute contrainte quelle qu’elle soit et leur donne la possibilité d’agir selon leur propre volonté[52] allant dans l’optique de leur salut. La reconnaissance de ce droit s’exprime dans la dignité de la personne humaine telle que l’ont fait connaître la parole de Dieu et la raison elle-même. Ce droit dans l’ordre juridique de la société doit-être reconnu de telle manière qu’il constitue un droit civil[53]. Il régira les activités du Dialogue interreligieux en sorte que chaque partie du dialogue soit respectée dans ses convictions religieuses. Par ailleurs, l’homme a des droits et des devoirs vis-à-vis de la vérité. Cet aspect aussi rendra fécond le dialogue en ce sens que ‘’ la vérité doit être recherchée selon la manière propre à la personne humaine et à sa nature sociale, à savoir par une libre recherche, par le moyen de l’enseignement ou de l’éducation, de l’échange et du dialogue par lesquels les uns exposent aux autres la vérité qu’ils ont trouvé ou pensent avoir trouvée, afin de s’aider mutuellement dans la quête de la vérité. La vérité, une fois connue, c’est par un assentiment personnel qu’il faut y adhérer fermement ‘’[54]. Le dialogue s’orientera alors dans le sens de l’expérience religieuse, où des personnes enracinées dans leurs propres traditions religieuses, partagent leurs richesses spirituelles, par exemple par rapport à la prière et à la contemplation, à la foi et aux voies de la recherche de Dieu ou de l’Absolu. Ces considérations permettront aux uns et aux autres de rechercher ensemble le chemin de la paix. C’est ce qu’affirme le n°68 de Pastores gregis où Jean Paul II exhorte à surmonter les fractures et à favoriser l’amitié réciproque et le respect entre les hommes. La liberté religieuse est donc un facteur favorable au dialogue entre les religions qui sont toutes appelées au service de la paix entre les peuples.

Conclusion

Nous ne pouvons pas invoquer Dieu Père  de tous les hommes, si nous refusons de nous conduire fraternellement envers certains hommes créés aussi à l’image de Dieu. La relation de l’homme à Dieu le Père et la relation de l’homme à ses frères sont tellement liées que l’Ecriture dit : « qui n’aime pas  ne connaît pas Dieu » (1 Jn4, 8; Nostra aetate, n° 5). Comment cette réalité serait-elle vraiment effective si l’on ne considère certaines valeurs et qualités telles que l’ouverture, le respect, l’égalité, la liberté et  le tout soutenu par un effort de guérison des mémoires historiques? Ne perdons pas de vue que c’est la main de Dieu qui conduit le cours de l’histoire, c’est Lui notre paix. Avec confiance et persévérance, sommes – nous tous invités à s’ouvrir pour un dialogue qui porte des fruits et des fruits qui demeurent.

 

 

10. Les défis du dialogue

Introduction

La question du dialogue interreligieux est l’une des plus actuelles, mais aussi des plus urgents pour l’Eglise de notre temps. Malgré toutes les initiatives, sans doute prometteuses, nombreux aussi sont les défis qui s’imposent inévitablement. Nous voulons ici essayer d’en analyser quelques uns ; nous dégagerons ensuite la spiritualité du dialogue interreligieux, avec les conséquences qu’elle implique.

10.1. L’unicité et universalité de Jésus

L’unicité au premier abord exclut toute idée de multiplicité ou de pluralité, et l’universalité, celle de limitation ou de restriction.

Dieu unique prend l’initiative de réaliser le salut pour tous, en Jésus Christ. Israël fut élu pour être la lumière pour tous les peuples et pour tracer la route qui amènera tous les peuples à l’adoration  du seul Dieu, Créateur de tous et de tout. Yahvé s’exprime ainsi par la bouche de son prophète Isaïe : « Que mon salut atteigne aux extrémités de la terre ». [55]Le concile Vatican II exprimait déjà cette idée en termes très clairs : « Le Sauveur veut le salut de tous les hommes » [56] et de tout homme. C’est donc un salut unique, « universel et intégral » [57]. Cette universalité et cette intégralité du salut, loin de laisser l’homme dans la passivité, rendent inséparable le lien entre le rapport que l’homme est appelé à entretenir avec Dieu, et sa responsabilité à l’égard du prochain.

Le Jésus de Nazareth, le Jésus historique est le même que nous connaissons aujourd’hui dans la foi commune de l’Eglise. Aujourd’hui plus qu’hier on entend de la bouche de plus d’un : ‘’Toutes les religions se valent’’. Mais toutes les religions se valent-elles ? Certes les religions sont diverses. Mais leur nom commun de ‘’religion’’ ne doit pas masquer leurs différents contenus doctrinaux, formes de célébration, effets produits sur les personnes et les sociétés… D’ailleurs il faut reconnaitre qu’on peut avoir une ‘’bonne’’ religion et être un croyant médiocre, ou encore l’inverse. Il est vrai que l’on peut marcher vers la Vérité à partir de toute religion, mais cela ne signifie pas que tous les types de religions et toutes les expériences religieuses soient pout autant équivalents. Quel que soit ce que l’on aura dit, Jésus est le dernier mot de toutes les religions. Cela ne sera manifeste qu’à la fin des temps. Car le fait que Jésus soit Présence même de Dieu parmi les hommes, lui qui est selon le mot de saint Irénée « le visible de Dieu (Père) comme le Père est l’invisible de Jésus», confère à l’évangile un sens qu’il est seul à avoir. Dieu ne peut aller plus loin que dans le don, et le don de Lui-même.

En réalité il n’y a de religion universelle que là où Dieu répond, par son unité et sa sainteté, aux besoins de toutes les époques et de toutes les consciences. Il ressort que la seule religion qui ait les caractères de l’universalité est celle qui s’est exprimée dans l’universalisme des prophètes hébreux, prédicateurs du Dieu unique et saint, qui s’est incarné dans la Personne et dans l’œuvre de Jésus-Christ. Hélas, l’orgueil de l’homme et son ambition l’attachent si fort au nationalisme religieux que lorsqu’il pense avoir un Dieu plus puissant que les autres, il ne songe qu’à le confisquer pour lui et à en tirer parti au détriment de ses voisins, se permettant toutes sortes de mépris.

Ainsi, il serait inexact de dire ou même de penser  que Jésus, puisqu’il n’est pas né dans tel peuple ou dans telle culture particulière, n’y a rien à avoir ou à faire ; et par là attendre une autre voie de l’incarnation. Le salut apporté par Jésus s’étend à toute l’humanité de tous les temps. Le pape Jean XXIII, dans son encyclique Pacem in terris insiste qu’il faut « pouvoir distinguer entre l’erreur et ceux qui la commettentCar, poursuit-il, l’homme égaré dans l’erreur reste toujours un être humain et conserve sa dignité de personne à laquelle il faut toujours avoir égard. Jamais non plus, conclut-il, l’être humain ne perd le pouvoir de se libérer de l’erreur et de s’ouvrir un chemin vers la vérité »[58].

Pour que le dialogue soit sincère, il faut y entrer avec sa propre foi intègre. Mais il faut aussi « se rappeler que Dieu s’est également manifesté de quelque manière aux membres des autres traditions religieuses ». Et la Vérité à laquelle tous aspirent « n’est pas une chose que nous possédons, mais une Personne par qui nous devons nous laisser posséder »[59]. Et chacun devra être convaincu qu’il a quelque chose à recevoir de l’autre, dans un esprit d’humilité. Ainsi ne devrait-on pas être « ni trop ingénus, ni hypercritiques, mais…d’esprit ouvert et accueillant »[60]. Un vrai dialogue est le lieu où l’on écoute vraiment l’autre, où on se laisse interpeller par lui en profondeur, tout en restant pleinement soi pour l’interpeller aussi. Dans ce dialogue, chacun vient avec le meilleur de lui-même, et non avec en ligne de mire les faiblesses, les erreurs et les défauts de l’autre.

Si Dieu est unique (comme l’expriment plus ou moins explicitement toutes les religions, révélées du moins), Unique aussi est le Médiateur entre Lui et les hommes. L’unique et universelle médiation du Fils exclut tout mépris des autres religions, et s’oppose vivement à la complaisance dans la résignation et le statisme. Puisque « tous ont une même origine…et une seule fin dernière »[61], Jésus assure la médiation d’un salut valable pour tous et pour tous les temps.

Le Christ est Un, alors son ‘’Corps’’ lui aussi ne peut et ne doit être qu’un, et cela malgré les déchirures qui apparaissent trop clairement au grand scandale du monde, un monde qui cherche des témoins de la lumière du Salut. Tout salut véritable dépend du Christ, dans l’unité de son Eglise.

L’universalisme a :

ü    pour fondement, l’œuvre de Jésus-Christ : « Quand j’aurai été élevé de la terre, j’attirerai tous les hommes à moi »[62]

ü    pour règle, l’ordre du Christ : « Allez donc, de toutes les nations faites des disciples » [63]

ü    pour expression ecclésiastique, les déclarations de saint Paul : « La circoncision n’est rien, l’incirconcision n’est rien ; ce qui importe…, c’est d’être une nouvelle créature… Il n’y a plus ici ni Juif ni Grec, ni esclave ni homme libre…, vous êtes tous un en Jésus-Christ »[64]. Enfin la théorie de la valeur eschatologique de l’universalisme stipule que tous les hommes seront finalement sauvés.

10.2. Le salut dans les autres religions

Le mot salut du Latin salus, signifie le fait d’échapper à un danger, à un malheur.

Dans le christianisme, le salut est la visée de la vie éternelle ; ce qui implique d’être sauvé du péché et de la damnation grâce à la médiation du Sauveur, mais qui doit être dominée par l’aspiration la plus haute, celle de l’amour de Dieu dans l’espoir d’une union indissoluble de l’âme avec lui. On retrouve des doctrines assez analogues dans l’Islam, le Bouddhisme.

Toutes les religions autres que le christianisme ont une sorte de système de points pour l’obtention de la vie éternelle.

Les Hindous doivent vivre en se conformant autant qu’ils le peuvent à leur éthique ; ne portant pas atteinte fut-ce au moindre des animaux afin d’accéder à une vie meilleure lors de leur réincarnation prochaine. S’ils mènent mal leur vie, ils risquent d’être réincarnés dans une vie humaine plus médiocre ou même de revenir sous forme d’insecte.

Selon l’Islam, tout le monde entrera au paradis sauf celui qui ne veut pas y entrer. Le salut est une certitude pour quiconque confesse l’unicité de Dieu et observe un certain nombre d’obligations : s’abstenir d’alcool, faire un pèlerinage à la Mecque, jeûner durant le mois du Ramadan et prier cinq fois par jour.

Les  Bouddhistes doivent s’efforcer de vaincre tout désir, toute passion, et observer les règles morales du bouddhisme  s’ils veulent obtenir le salut.

Dans la religion traditionnelle africaine, l’idée de l’au-delà existe. En effet le bien sera toujours récompensé, tandis que le mal sera toujours puni, tout de suite, plus tard, ou dans l’au-delà, mais il le sera toujours .Il y a un au-delà pour les bons, un au-delà pour les mauvais. Ceux qui ont bien vécu rejoignent leurs ancêtres, les autres non. Il y a une croyance qu’on pourrait assimiler à celle du purgatoire. Seuls les ancêtres sanctifiés, conformément aux lois imposées par Dieu, bénéficient du statut d’ancêtres dans l’au-delà. Bénéficier du statut d’ancêtre, signifie que non seulement l’âme de l’individu a rejoint la demeure divine pour l’éternité, mais aussi qu’elle a la possibilité de participer à la vie de sa famille restée sur terre, afin de l’assister. Ceux qui  n’ont pas reçu le grade d’ancêtre dans l’au-delà, sont ceux qui ont vu leur âme détruite de par leur action trop en contradiction avec les préceptes divins, et ne peuvent intervenir chez ceux qu’ils ont laissé sur terre, d’aucune manière. Ils rejoignent le bas-fond de l’au-delà  où sont regroupées les âmes pécheresses pour une souffrance émotionnelle éternelle.

Ceux qui se retrouvent entre les deux situations, sont  renvoyés dans un corps physique, qu’ils auront eux-mêmes choisi, pour une réincarnation afin de se parfaire avant de rejoindre la source divine, ou s’ils échouent après plusieurs réincarnations ratées, de rejoindre les bas-fonds.

10.3. La Révélation dans le christianisme et dans les autres religions

Du latin révélatio signifie écarter le voile (velum), dévoiler. La révélation est alors définie comme la manifestation d’une vérité que Dieu opère par l’illumination surnaturelle de l’intelligence humaine. Elle peut se définir également comme l’ensemble des vérités révélées par Dieu et contenues dans l’Ecriture. Elle est pour une religion la connaissance qu’elle affirme détenir de source divine.

Des religions abrahamiques comme le judaïsme et l’Islam, en particulier sont dites révélées.

Au cours de la révélation, YHWH dictant les tables de la loi à Moise, l’ange Gabriel inspirant Mahomet, aucune nouvelle connaissance scientifique n’est donnée aux hommes.

En théologie chrétienne, on distingue la révélation générale et la révélation spéciale.

La révélation spéciale est celle par laquelle Dieu se révèle à tous les humains, notamment par la nature, la conscience et l’histoire.

La révélation spéciale est celle par laquelle Dieu se révèle par des paroles ou des actes. Elle culmine en Jésus-Christ auquel les Ecritures (la Bible) rendent témoignage. Deux applications de la révélation spéciale sont : la révélation continue et la révélation personnelle. La révélation continue est le concept selon lequel, à certaines époques, Dieu communique sa volonté à ses prophètes (Cf. Amos 3,7) ; et la révélation personnelle pour sa part est le concept selon lequel chaque personne ici-bas peut recevoir des communications de Dieu pour être guidé dans sa vie.

  • La révélation dans l’Islam

L’Islam est une religion monothéiste qui s’inscrit dans la famille des religions abrahamiques avec le christianisme et le judaïsme. S’il se distingue des deux religions, il a toutefois de nombreux éléments communs.

Le mot  «  islam » avec une minuscule désigne la religion révélée à Mahomet. Mahomet est pour les musulmans le dernier d’une lignée de prophètes de Dieu. Pour l’Islam, les paroles de Dieu ont été communiquées à Mahomet directement en langue arabe par l’ange Gabriel, Mahomet les a répétées à ses compagnons, qui les ont retenues par cœur, puis écrites telles qu’elles. Le coran est la totalité de cette révélation, dite aux hommes pour l’éternité. L’original du livre est gardé au ciel, il n’a pas été crée, car il est de toute éternité.

  • La révélation dans la religion traditionnelle africaine

Pour l’homme de la tradition africaine, au sommet, se place un être suprême. Souvent il s’agit d’un Dieu inaccessible qui depuis la création, n’a que peu de rapports directs avec le monde et les hommes : il a abandonné tout pouvoir à un moniteur céleste. La plupart du temps, les hommes ne lui adressent qu’un culte partiel et indirect. Mieux encore, il n’a parfois ni temple, ni officient. On pense que ce Dieu est trop loin des hommes, ou trop puissant, donc on ne peut l’atteindre. On pense également qu’il a tout ce qu’il lui faut et qu’il n’a que faire de nos prières. Certains peuples disent qu’il nous a donné ses intermédiaires, ses génies, pour nous aider et nous servir et que cela suffit.

10.4. La désunion des chrétiens

 

Le christianisme n’a cessé d’être troublé depuis les origines par des contestations (de nature doctrinale le plus souvent) occasionnant ruptures et dissidences. En effet, à la suite des conciles d’Ephèse en 431 et de Chalcédoine en 451 pour des raisons d’ordre tant théologiques que politiques.des groupes d’Eglises dites nestoriennes et monophysites ont rompu leur lien d’unité tant avec Rome qu’avec Constantinople. Au XIe siècle avec le schisme consommé par le patriarche de Constantinople Michel Cérulaire, presque toutes les Eglises qui au sixième siècle vivaient dans la mouvance du patriarcat de Constantinople se sont séparées de Rome. Enfin au XVIe siècle, la réforme protestante va provoquer dans l’Eglise Catholique un ébranlement sans précédent et causer des fissures très graves de tout l’édifice chrétien jusqu’à notre temps. De nos jours, des désaccords sur des points de doctrine, des questions sociales et sur la pratique pastorale continuent de séparer les chrétiens et font obstacle au dialogue interreligieux. A cela il faut ajouter un enracinement insuffisant en sa propre foi, une compréhension  insuffisante de la croyance et des pratiques des autres religions, pouvant mener à un manque d’appréciation de leur signification et parfois même à de fausses interprétations, des facteurs socio-politiques ou certaines séquelles du passé, enfin une suffisance et un manque d’ouverture qui conduisent à une attitude défensive, voire à l’agressivité. Alors que devons-nous faire pour relever ce défi ?

Il faut reconnaître que malheureusement, les obstacles qui s’opposent à la véritable union des chrétiens sont immenses et graves, et apparaissent humainement comme des barrières insurmontables. Cependant, ce qui est impossible à l’homme ne l’est pas à la grâce de Dieu qui peut tout en éclairant les esprits et en soutenant les volontés désireuses de vérité et de bien.

Il y a lieu de noter que les conversations théologiques et les contacts opportuns ont déjà abouti à une certaine atténuation de positions rigides des confessions  séparées, et à une appréciation moins inexacte de la vérité catholique ; mais, cette attitude ne s’est pas encore étendue à la masse des communautés séparées. La vérité, doit nécessairement être accompagnée  de la charité. A tous et à chacun  de nous incombe le devoir de coopérer à l’Esprit Saint et d’avoir à l’égard des frères séparés une attitude de vraie et sincère affection fraternelle qui exclut toute forme de ressentiment ou d’indifférence, pour faire place à la charité fondée sur la vérité. Cette charité facilitera aussi notre sanctification personnelle, et notre vie exemplaire sera un moyen efficace pour l’union. Par l’exemple de notre union toujours plus intime et mutuelle, nous attirerons tous ceux qui sont séparés de nous.

A la vérité et à la charité. « Il faut joindre la prière. Il faut prier sans cesse et ne pas se décourager »[65]. Si cette recommandation du Seigneur s’étend à toute la vie chrétienne, individuelle et sociale, combien plus profondément doit-elle retentir dans l’âme de chaque chrétien en face de l’important et difficile problème de l’unité. Prions avec foi, espérance et persévérance, selon les enseignements évangéliques, sans nous laisser décourager si l’on ne voit pas encore l’aune de la nouvelle lumière.

Notre prière doit être la prière du Christ dans sa sublime invocation sacerdotale « qu’ils soient tous un comme toi Père, tu es  en moi et  moi en toi »[66] en demandant au Seigneur qu’il daigne diriger et acheminer vers la bonne voie les efforts et les travaux de ceux qui, dans une intention droite, s’occupent du problème de l’unité. Il faut demander l’unité des chrétiens comme un don de Dieu, et nous nous confions dans le fait que ce sera le Seigneur qui nous la garantira.

10.5. La religion et la politique

La religion est « un ensemble de croyances ou de dogmes et de pratiques cultuelles qui constituent les rapports de l’homme avec la puissance divine ».[67] Tandis que la politique est « l’art de gouverner un état ».[68] L’Eglise catholique conçoit la politique comme une véritable vocation : « votre vocation peut  bien, en effet, être considérée comme  une véritable vocation à la gestion des affaires publiques, tout cela à différents niveaux »[69]. Concernant la relation entre l’Eglise et  la communauté politique, l’Eglise tient à faire savoir qu’en raison de sa charge spirituelle et de sa compétence, elle « ne se confond d’aucune manière avec la communauté politique et n’est liée à aucun système politique  et sur le terrain qui leur est propre, la communauté politique et l’Eglise sont indépendantes l’une de l’autre et autonomes. Mais toutes deux, quoique à des titres divers, sont au service de la vocation personnelle et sociale des mêmes hommes »[70]. Ce n’est pas une ambition politique ou le désir de conquête de pouvoir qui pousse l’Eglise à la politique, mais la volonté sincère et désintéressée de contribuer positivement à la recherche commune de solutions aux problèmes et défis qui se posent en société et dans le monde dans lequel les chrétiens sont eux aussi des citoyens à part entière.

De fait, l’engagement bien compris des chrétiens en politique ne se limite pas à la simple transformation de structures. Ce travail si louable de changement de structures oppressives et injustes, que l’on peut trouver dans les gouvernements des nations serait une œuvre seulement à moitié accomplie, s’il n’est pas soutenu par des valeurs ou une culture qui la nourrit et la motive. En effet, « si à la base il n’y a pas une culture capable de recevoir, de justifier et de transformer en projets les exigences qui dérivent de la foi et de la morale, les transformations reposeront toujours sur des fondements fragiles »[71]. Quant au magistère ecclésial, comme le rappelle la congrégation pour  la doctrine de la foi : « avec son intervention dans le domaine politique, le magistère ecclésial n’entend pas exercer un pouvoir politique ; au contraire prenant cet engagement comme un devoir pour lui, il veut former et illuminer la conscience de tous ses enfants et surtout de ceux qui s’engagent directement en politique pour que leur action reste toujours au service de la promotion de la personne et du bien commun »[72]

11. La spiritualité du dialogue interreligieux

Quand on parle de la spiritualité du dialogue interreligieux, il faut sous-entendre la spiritualité chrétienne. A la suite du concile Vatican II, les Catholiques et les autres chrétiens engagés dans le dialogue interreligieux, sont de plus en plus convaincus que l’exercice du dialogue dépend essentiellement d’une spiritualité chrétienne qui obéisse à l’œuvre de l’Esprit Saint. Dans cette perspective, le Conseil Pontifical du dialogue interreligieux a tenu en 1998, une assemblée sous le thème : « La spiritualité du dialogue interreligieux ». Et voici ce qui en ressort :

  • Le mystère trinitaire d’amour et de communion est le modèle éminent de toute relation humaine et le fondement du dialogue.
  • La spiritualité dont il est question est essentiellement témoignage du Christ auprès des autres croyants .car c’est dans cette perspective qu’ils seront proches les uns des autres. Toutefois elle ne suppose pas que le chrétien écarte certains éléments de la foi ou de la pratique chrétienne ou. les mette en doute.car les croyants veulent savoir clairement à qui ils ont affaire (cela éviterait le relativisme religieux.)

En définitive, la spiritualité du dialogue signifie vivre pleinement dans le Christ et s’ouvrir à son Esprit. C’est poser constamment un acte de foi éloquent dans toutes les circonstances de rencontre avec les croyants des autres religions.

11.1. L’ouverture à la conversion continuelle

La conversion est un retour de cœur humble et contrit à Dieu avec le désir de lui soumettre plus pleinement sa propre vie[73] Toutefois sans l’action vivifiante de Dieu, l’activité humaine est incapable de produire des biens spirituels permanents. Voilà pourquoi dans l’optique chrétienne, l’agent principal de la conversion n’est pas l’homme mais l’Esprit Saint. Ainsi à la mesure où nous nous ouvrons à l’Esprit-Saint nous discernerons positivement la volonté de Dieu et l’accomplirons. Donc on ne peut entrer dans la démarche d’une conversion authentique sans la compagnie de l’Esprit Saint, puisque cet Esprit opère en nous non seulement la conversion mais nous aide à regarder au-delà de l’histoire et des frontières visibles du Corps mystique, pour découvrir d’où IL vient et où va sa grâce (cf. LG16, AG15).

Cette ouverture à la conversion ne s’opère que si l’on est ouvert à l’Esprit Saint et sensible à sa voix.

Elle s’accomplit chaque fois que nous rencontrons les croyants de foi différente pour dialoguer des valeurs telles que la vérité et la paix.

Dans cette perspective, la rencontre d’Assise initiée par le pape Jean-Paul II en 1986, et regroupant toutes les délégations des autres religions est significative et signe tangible de l’action de l’Esprit Saint et de la conversion.

11.2. Reconnaissance à l’appel commun à la sainteté

Notre conviction c’est que Dieu veut que tous les hommes soient sauvés (cf. 1Tm2, 4).et qu’il peut accorder sa grâce au-delà des frontières visibles de l’Eglise (cf. LG16.Redemptor Hominis 10) mais en même temps, le chrétien est conscient que JESUS CHRIST, Fils de Dieu fait Homme, est le seul et unique Sauveur de toute l’humanité et que ce n’est que dans l’Eglise fondée par le CHRIST que l’on peut trouver les moyens du salut dans la plénitude.

Ce caractère unique de la foi chrétienne doit être respecté. Il en ressort donc que Jésus est le modèle de toute perfection, initiateur et consommateur de la sainteté. (Cf. LG 40). Toutefois « l’Eglise catholique ne rejette rien de ce qui est vrai et Saint dans les autres religions. Elle considère avec un respect sincère ces manières d’agir et de vivre, ces règles et ces doctrines qui, quoiqu’elles diffèrent en beaucoup de points de ce qu’elle –même tient et propose, cependant apportent souvent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes »[74].

De ce qui précède il  est clair  d’une part que l’initiateur du salut c’est Dieu. D’autre part, Il n’y a qu’une seule sainteté pour tous ceux que conduit l’Esprit de Dieu et qui obéissent à la voix du Père et adorent Dieu en esprit et en vérité.

Bref le salut ou la sainteté est la motivation de l’annonce et du dialogue.car dit le pape Jean-Paul II : « le dialogue interreligieux à son niveau le plus profond est toujours un dialogue de salut parce qu’il cherche à découvrir, à clarifier et comprendre mieux les signes du long dialogue que Dieu poursuit avec les hommes »[75]

11.3 La responsabilité de l’expansion du Règne de Dieu

La responsabilité de l’expansion du Règne de Dieu incombe à l’Eglise et constitue l’essentiel de sa mission. En effet, par les paroles : « Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit »[76] et « Allez par le monde entier proclamer la bonne nouvelle à toute la création. Celui qui croira sera sauvé, celui qui ne croira pas sera condamné »[77] Jésus confie à ses apôtres la charge de continuer et d’achever la mission pour la quelle, lui Jésus, notre nature humaine. De ces paroles « découle pour l’Eglise, le devoir ; mieux la responsabilité grave de propager la foi et le salut apportés par le Christ » [78] car Dieu veut sauver tous les hommes. « Née de l’amour du Père eternel fondée dans le temps par le Christ ensemble l’Esprit Saint, l’Eglise poursuit une fin salvifique et    eschatologique qui ne peut être pleinement atteinte que dans les siècles à venir »[79] lorsque le règne de Dieu atteindra le dernier converti. L’Eglise composée des hommes de toute race, langue, peuple et nation « forme la famille des enfants de Dieu : elle doit croître sans cesse jusqu’à la venue du règne du Seigneur »[80] où l’Eglise rendra compte de sa mission d’expansion du règne de Dieu sur la terre. Ainsi donc, l’Eglise use-t-elle des moyens propres à elle pour l’expansion du règne de Dieu. Ces moyens sont, entre autres, l’Evangélisation, la catéchèse, les actions caritatives, le témoignage de vie des chrétiens, le mass média…

11.4 La croissance spirituelle dans le partage.

A la fois « assemblée visible et communauté spirituelle »[81] l’Eglise fait ainsi route avec toute l’humanité et partage terrestre du monde. Elle est communauté de foi, d’espérance et de charité par laquelle le Christ répand, à l’intention de tous, la vérité et la grâce. Mais l’Eglise en poursuivant la fin salvifique qui lui est propre, ne communique pas seulement à l’homme la vie divine : elle répand aussi et d’une certaine façon sur le monde entier la lumière que cette vie divine irradie ; celle est porteuse de l’unité des chrétiens : vœu sublime du Christ. Si Dieu «  a envoyé son esprit à tous les hommes pour les disposer intérieurement à l’aimer de tout leur cœur, de toute leur âme, de toute leur intelligence et de toute leur force(Mc 12, 30) ; et aussi à s’aimer mutuellement comme le Christ  les aime(Tm 13,34) »[82] , c’est en vue du partage d’un même héritage spirituel.

La croissance spirituelle atteindra sa perfection lorsque tous les hommes deviendront un seul corps dans le Christ. Pour cela, le Christ  «  a envoyé son esprit à tous les hommes pour les disposer intérieurement à aimer Dieu de tout leur cœur, de toute leur âme, de toute leur intelligence et de toute leur force(Mc 12, 30) ; et aussi à s’aimer mutuellement comme le Christ  les aime (Jn13, 34) »[83]  c’est en vue du partage d’un même héritage spirituel. C’est à toute l’humanité par le Christ a adressé un appel à l’unité et à la sainteté. Cet appel est manifesté dans toutes les grandes religions du monde animé du désir de l’immortalité. Ces religions encouragent à la prière contemplative, à la méditation et à d’autres activités ou exercices spirituels féconds. Même si ces grandes religions n’ont pas les mêmes significations de ces exercices spirituels avec l’Eglise, elles reconnaissent qu’ils sont des moyens de la sanctification pour atteindre le Transcendant. Ainsi, on constate dans ces religions, des efforts de la sanctification quotidienne à travers la prière régulière, de la mortification à travers le jeûne et de la charité à travers l’aumône. Il faut également souligner la place capitale que tient le pèlerinage dans le christianisme comme dans l’islam et dans le judaïsme. Le silence n’est pas du reste

D’une manière générale, dans chacune des grandes religions, chacun se sanctifie «  à travers les formes diverses de vie et les charges différentes ».

12 Les implications pastorales du dialogue interreligieux.

12.1 Des témoignages conjoints des valeurs communes.

Dans le document conciliaire Nostra Aetate au n°2, il est écrit au sujet des relations de l’Eglise et les autres religions : « Si au cours des siècles de nombreuses dissensions se sont manifestées entre le chrétiens et les musulmans, le concile les exhorte tous à oublier
 le passé et à s’efforcer sincèrement à la compréhension mutuelle, ainsi qu’à protéger et à promouvoir ensemble, pour tous les hommes, la justice sociale, les valeurs morales, la paix
et la liberté. »[84].
On note dans cette optique de nombreuses expériences de
rencontre entre Catholiques et Musulmans. Bien que certaines soient vécu dans
un conteste d’incompréhension mutuelle, d’autres au contraire font tomber les barrières permettant de mieux se connaître. C’est pourquoi l’Eglise Catholique dans sa mission d’écoute fraternelle et d’échange avec les croyants de l’Islam se veut fidèle.
Le Concile Vatican II, en éclairant les situations nouvelles du dialogue, met en lumière le rôle de l’Eglise. Celle-ci constitue pour sa part dans le christianisme un sacrement ou si l’on veut, un signe et un moyen d’opérer l’union intime avec Dieu et tout le genre humain. Alors d’une manière acceptable, des témoignages de dialogue se remarquent quotidiennement dans les quartiers, les villes, les villages et les milieux d’éducation professionnelle et associative, dans les écoles confessionnelles. Au Togo précisément au Collège Saint Albert le Grand d’Atakpamé, on note cette forme de témoignage. En effet les élèves musulmans accordent assez de respect aux enseignements religieux  et participent librement aux classes de chant pour les célébrations eucharistiques dudit Collège. Il y a même un professeur musulman dudit collège qui demande quelque fois des messes pour ses amis chrétiens et sa famille. Ceci rejoint le discours du Pape Jean Paul II adressé en 1985aux jeunes Marocains. Il disait : « La loyauté exige aussi que nous reconnaissions et respections nos différences. La plus fondamentale est évidemment le regard que nous portons sur la personne de Jésus de Nazareth »[85].   Mais il faut dire que dans certains endroits, les rencontres de dialogue sont manquées parce que les partenaires refusent d’accepter la différence. De toute façon, l’Eglise Catholique tient pourtant à conserver ce terme de dialogue pour exprimer la relation qu’elle se doit de nouer avec les autres religions. Car le dialogue avec les croyants des autres religions fait partie des tâches qui lui sont confiées par le Christ et à ce titre même s’il n’est pas toujours réalisable concrètement, qu’il demeure un idéal à poursuivre et un objectif à atteindre.

12.2 L’action commune et appel sur les questions sociales.

Des groupes islamo-chrétiens, par leur importance, leur profil et les objectifs qu’ils poursuivent, mènent des actions communes sérieuses. Ainsi remarque t- on de plus en plus, un compagnonnage en vue de rejeter les mépris, même si ailleurs tout récemment au Nigéria il eut affrontement entre musulmans et chrétiens. Dans cette perspective, il nous faut soutenir le travail de l’Eglise permettant l’acquisition de la formation nécessaire et l’accompagnement pour éclairer son action à la lumière de l’Evangile. L’Eglise œuvre pour le développement de la justice sociale et la libéralisation humaine, la promotion des droits de l’homme et la paix. Selon le concile Vatican II, pour que le dialogue puisse porter du fruit, il faut y associer
la charité, la reconnaissance de soit comme faisant partie du groupement dans lequel
vivent ces hommes,  participer à la vie culturelle et sociale par le biais des échanges.
Il faut aussi noter une collaboration des œuvres humanitaires, sociales, économiques
et politiques qui ouvre une voie à la liberté et au développement. On rencontre ce
type de dialogue dans les organisations locales, nationales et internationales où œuvrent
en ensemble des chrétiens et les adeptes des autres religions. On note également
des expériences au niveau de la prière.[86] Ainsi le 27 octobre 1986 à Assise, lors de la
journée pour la paix, 130 représentants de toutes les communautés chrétiennes et des
grandes religions non chrétiennes ont prié ensemble. Toujours à Assise en 1993 une prière commune pour la paix dans l’ex Yougoslavie et les Balkans fut organisée.
Il y avait plus d’une cinquantaine de personnalités chrétiennes, un rabbin venu de Jérusalem et une trentaine de dignitaires musulmans. En1986 le pape Jean Paul II s’était rendu à la synagogue de Rome pour prier.[87] De même en Janvier 2010, son successeur le Pape Benoît XVI en a fait autant. Enfin au Togo, le 13 Janvier 2010, au palais des congrès de Lomé, fut organisée une journée nationale pour la paix, la réconciliation et le bon déroulement des élections présidentielles au Togo, regroupant ainsi les représentants de toutes les confessions religieuses du pays.

 

Conclusion

Le dialogue interreligieux est une nécessité et une urgence pour l’Eglise. Le besoin de salut est une expérience universelle s’exprimant de diverses manières en fonction des cultures, des situations socio-historiques et des différentes religions. Toutes les religions jouent un certain rôle salvifique et ont des valeurs communes à promouvoir : dans les religions orientales, le salut est une libération des souffrances de la vie et du péché de désir ; dans les religions dualistes, il est la victoire du Principe du Bien sur le Principe du Mal. Dans le Judaïsme il s’accomplit dans l’histoire du peuple d’Israël, dans sa relation privilégiée avec Dieu. Au sens propre, le salut n’est pas quelque chose, mais Quelqu’un : Jésus-Christ, dont l’événement central se situe dans le Mystère pascal, source et sommet de la révélation de la gloire de Dieu, de la libération humaine, de la miséricorde qui recrée l’homme.

Certes de nombreuses initiatives sont prises et continuent de l’être, et des occasions mais  beaucoup de chemin reste encore à faire. L’Eglise détient le premier rôle dans l’union intime de l’homme à Dieu d’une part, et l’orientation dans la recherche commune des idéaux chrétiens et sociaux. Pour répondre au vœu très cher du Christ, tous les chrétiens et toutes les religions doivent trouver des moyens pour retrouver l’unité, qui témoignera de l’authenticité de nos croyances, de la sincérité et de la vérité de ce que nous annonçons. Tout est décidé en un Seul et donc tous doivent se décider pour Lui. Le Christ est le Sauveur. La Vérité se révèle dans le dialogue vrai et dans l’Amour

 Etudiants en Théologie I, 2008-2009

 

Bibliographie Partielle

 

-       Catholicisme hier, aujourd’hui et demain,

-       Petit LAROUSSE grand format 2003.

-       Pourquoi tant de religions in Actualité religieuse, No 148- 15 Octobre 1996.

-       Le défi bouddhiste actualité religieuse, Hors série, No 10, 

-       Encyclopaedia Universalis

-       Encyclopédie catholique THEO

-       Encyclopédie Encarta 2007.

-       Document de la commission théologique internationale, Le christianisme et les religions, Centre Emmaüs, Afagnan, 1996

 

-       Bouddhisme et christianisme, in Concilium, Revue internationale de théologie, Ed Beauchesne, Paris, 1978.

-       Le Bouddhisme, in « Que sais-je ? », Presses Universitaires de France, 1951

 

 

 

 

 

 

 



[1] Nostra Aetate, n°2

[2] Nostra Aetate, n°3

[3] Petit Larousse illustré, 1984

[4] Encarta 2009

[5]  Encyclopaedia Univesalis

[6] ibid

[7] Georges MARCHENKO, Où est la sagesse

[8] Nouveau Larousse Universel 1, Librairie Larousse, Paris, 1948

[9] Ibid.

[10] Petit Larousse, 1984

[11] Nostra Aetate, in Concile Vatican II

[12] Gaudium et Spes, n°22

[13] Nostra Aetate,n°2

[14] Ad Gentes, n°11

[15] Lumen Gentium, n°17

[16] Nostra Aetate, n°2 ; Gaudium et Spes, nn°92-93

[17] CEC. N°39

[18]  Secretaratus pro non Christianis, Citta Del Vaticano, Attitude de l’Eglise catholique devant les croyants des   autres religions, Réflexions et Orientations concernant le dialogue et la mission, Pentecôte, 1984 , P.7.

 

[19] Dialogue et Annonce, Réflexions et orientations concernant le Dialogue Interreligieux et l’Annonce de l’Evangile de Jésus Christ, Cité du Vatican, Pentecôte, 1991, P.264.

[20] Secretaratus pro non Christianis, Citta Del Vaticano, Attitude de l’Eglise catholique devant les croyants des   autres religions, Réflexions et Orientations concernant le dialogue et la mission, Pentecôte, 1984 , P.5

[21] Séminaire sur la Formation au Dialogue Interreligieux à l’intention des Formateurs dans les grands séminaires des régions ecclésiastiques de l’ACERAC, de l’AECAWA et de la CERAO, Faso,  Octobre 2005.

[22] Discours du Pape Jean Paul II, le 02 Septembre1990, à Dar es Salaam, aux représentants des diverses religions.

[23] Nostra Aetate n°03.

[24] DUFFE Bruno Marie, Dialogue interreligieux: une provocation à la réflexion éthique et théologique, in Revue d’éthique et de théologie morale «Le supplément», No217, Juin-Juillet 2001, P.254.

[25] Cf. Ad.Gentes, n°4

[26] Jean Paul II aux responsables bouddhistes et confucéens de Corée, 06 Mai 1984

[27]Cf. Nostra Aetate, n°02

[28] Ibid.

[29] -Jean-Paul II, Ut unum sint,p.

[30] -Jean-Paul II, Ut unum sint, p.

[31] -Jean-Paul II, Ut unum sint, p.

[32] -Nostra Aetate n°1, in Concile Vatican II

[33] -Ad Gentes n°3, p. 385, in Concile Vatican II

[34] -Jean-Paul II, Redemptoris Homnis, p.43

[35] Ad Gentes n°4, p. 386, in Concile Vatican II

[36] -Yves CONGAR, Cette Eglise que j’aime, (peuple missionnaire), p.71 ; Cf. Lumen Gentium, n°4

[37] -GaudiUm et Spes n° 69, in Concile Vatican II

[38] -Compendium de la Doctrine Sociale de l’Eglise n° 537

[39] -Nostra Aetate n° 2, in Concile Vatican II

[40] -Ad Gentes n° 11 ,  in Concile Vatican II

[41] -Lumen Gentium n°17, in Concile Vatican II

[42] Message du Pape Benoît XVI à l’occasion de la journée mondiale des migrants, 18 Janvier 2009 in Afriquespoir n°47 Juillet- Septembre 2009, P. 30

[43] Cf. Revue trimestrielle Afriquespoir n°47 Juillet-Septembre 2009, dans : Paul, migrant de l’Evangile, pp.29-30.

[44] Eric Fromm, L’arte die amare.il saggiatore,Milan,1971,p.18

[45] Discours à Madras, Inde, 5fev.1986

[46] F. Whaling, Christian Theology and Word religions , A. Global Approach London

[47] Les Evêques d’Afrique parlent, 1969-1992, pp.237-238 et 264.

[48] Nostra aetate, n°5, §3.

[49] Idem,n°4, §7.

[50] Paul VI, Pèlerinage à Bombay, 1964.

 

 

[51] Jean Paul II, Familiaris consortio, n°64, 1981.

[52] Dignitatis humanae, n°2, §2.

[53] Idem, §1.

[54] Idem, n°3, §2.

[55]  Is 49, 6

[56] Lumen Gentium n°16

[57] Compendium, de la doctrine  sociale de l’Eglise n°38

[58] Cf. Jean XXIII, Pacem in terris,éd. du Centurion, Paris, 1963, n°158

[59] Dialogue et Annonce, éd. Pentecôte, Cité du Vatican, 1991, n° 48 et 49

[60] Ibid. n° 47

[61] Nostra Aetate, n°11

[62] Jean 12, 32

[63] Mt 28, 19

[64] Gal6, 15 ; 3, 28

[65] Lc 18,1

[66] Jn 17,21

[67] Dictionnaire Universel, Ed. Hachette/ Edicef, Espagne, 2002, p.1030.

[68] Ibid., p. 948

[69] Jean- Paul II, Discours aux participants au jubilé des hommes politiques, Rome, 05 Novembre 2000.

[70] G.S.n 76

[71] Congrégation pour la doctrine de la foi, Note Doctrinale à propos de question sur l’engagement et le comportement des catholiques dans la vie politique, Vatican, 24 Nov. 2002, n° 6

[72] Ibid. ; n°6.

[73] Cf. AG13

[74] cf. Nostra Aetate 2

[75] Cf. Discours au conseil pontifical pour le dialogue interreligieux n°2, 13nov 1992.

[76] Mt 28,19

[77] Mc 16,15 »,

[78] Concile Vatican II , Ad Gentes n° 05

[79] Gaudium et Spes N°40§ 02

[80] Idem

[81] Idem

[82] Lumen Gentium  N°40

[83] Lumen Gentium  N°40

[84] Nostra Aetate numéro 2

[85] Discours de Jean-Paul II aux jeunes Marocains numéro 10, Casablanca 1985, Documentation catholique 06/10/1985

[86]Manuel de cours/  ATTITUDE DE L’EGLISE CATHOLIQUE DEVANT LES CROYANTS DE AUTRES RELIGIONS. Pentecôte 1995, pp 18, 19.

[87] Quid 1995, Edition Robert LAFFONT, p 529



06/06/2011
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