Nous voudrions voir Jésus
« Nous voudrions voir Jésus »
Homélie 5ème dimanche de carême, année B :
Jr 31, 31-34 ; He 5, 7-9 ; Jn 12, 20-33
Le verbe voir, combien de fois ne l’utilisions-nous pas ? « Je veux voir. », « Puis-je voir ? », voici des phrases qui introduisent notre désir de voir qui se révèle plus un désir de toucher. Rappelons-nous, pour voir tel objet ou telle image sur le portable d’un ami, nous avons instinctivement envi de le prendre dans nos mains. En effet la satisfaction du désir de voir implique dans bien de cas plus que l’acte de voir, elle passe d’une certaine manière par l’acte de toucher, une forme d’expérimentation.
Nous pouvons-nous demander si les Grecs de l’Evangile n’ont pas eu plusieurs occasions de voir le Christ depuis leur arrivée à Jérusalem : Jésus était souvent au Temple, il enseignait sur les places publiques…il était partout !
Les Grecs nous répondront que ces contacts anonymes ne leur ont offert qu’une vision impersonnelle du Christ. Leur soif, nourrie par tant d’histoires de miracles et tant de récit où Jésus prenait toujours le dessus sur ses adversaires, ne peut se laisser étancher par des contacts indirects, anonymes, impersonnels.
En disant « Nous voudrions voir Jésus », ils exprimaient en fait un désir plus fort : être avec Jésus, goûter le Christ, vivre de sa vie, être éclairés par sa lumière, contempler la Vérité sur Dieu, adorer le vrai Dieu, être sauver. Oui les Grecs ont parcouru des kilomètres pour adorer Dieu durant la Pâque à Jérusalem. Ils ne se pardonneraient donc pas d’être arrivés si prêt de celui qu’ils soupçonnent d’être le Messie sans le connaître – au sens strict du terme –, sans vérifier si le Dieu qu’ils sont venus adorer était le vrai et si leur adoration était rendu convenablement.
Jusqu’à quand nous autres chrétiens de ces temps, allons-nous nous contenter des contacts impersonnels, des relations de groupe, des rencontres d’ensemble avec le Christ Jésus ? C’est le même Christ qui a dit « là où deux ou trois personnes sont réunis, je suis avec eux », qui recommande aussi des contacts personnels et intimes avec Dieu (cf. Mt 6, 6).
Le monde de ce temps défie la foi chrétienne par ses modes, ses tendances et témoigner fidèlement de sa conviction chrétienne aujourd’hui est un véritable martyr. Mais où trouver la force pour dire non aux sollicitations du temps présent : sexe, loisirs malsains, habillement, corruption, mensonge, … si ce n’est en Jésus Christ ! Ainsi pour être chrétien et vivre en chrétien, il nous faut vivre du Christ. Et pour vivre du Christ, nous devons le VOIR comme les Grecs ont voulu le VOIR.
Voir le Christ, c’est l’accueillir dans mon cœur, c’est rentrer dans la logique de la nouvelle alliance que Dieu scelle avec chacun individuellement. « Voici venir des jours, déclare le Seigneur, où je conclurai avec vous une alliance nouvelle » (cf. 1ère lecture). Et cette alliance nouvelle, est une alliance d’amour : Dieu m’aime et je l’aime car je l’ai vu.
L’alliance d’amour est plus forte que l’alliance de loi. En effet, aucun amoureux ne se fait prier pour aller vers sa bien-aimée ; toute femme amoureuse accepterait tout sacrifice pour être avec l’élu de son cœur. Et deux personnes qui s’aiment, voudraient tellement avoir du temps à eux seuls ; les rendez-vous, les rencontres à deux (cinéma, dîner aux chandelles, ballade dans la nature, bain de soleil à la plage, …) sont plus propices à l’expression de l’amour que les rencontres de groupe (fêtes paroissiales, réunions de travail ou de prière, repas de famille, excursion de groupe, …). Vous le savez d’ailleurs mieux que moi ! Alors comment mon frère, ma sœur puis-je continuer à dire « Jésus je t’aime et tu le sais » si je n’ai aucun envi de passer du temps avec le Christ, de rencontrer le Christ personnellement, s’il m’est pénible de contempler et d’admirer le Christ ?
Le Christ, nous rappelle la lettre aux Hébreux, est la « cause de notre salut éternel ». Approchons-nous donc de lui, apprenons à le connaître et cultivons une relation personnelle avec lui. Pour ce faire, voilà certains moyens: prière régulière personnelle (prière de vie et vie de prière), adoration du Saint Sacrement, pratique du sacrement de pénitence, et surtout l’amour de ceux qui ressemblent au Christ (les pauvres, les enfants, les marginaux, ceux qui ont besoin de toi).
Et si ce sont nos péchés qui nous empêchent de VOIR le Christ, faisons nôtre les paroles du Psaume 50 (51) qui est lu ce dimanche :
Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour,
selon ta grande miséricorde, efface mon péché.
Lave-moi tout entier de ma faute,
Purifie-moi de mon offense.
Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu,
Renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit.
Ne me chasse pas loin de ta face,
ne me reprends pas ton esprit saint…
Amen !
Romain Séménou,
22-03-2012