Ne mets pas l'échec dans tes projets!
Homélie du 4ème Dimanche de Carême - Année B.
Textes bibliques : 2Ch 36, 14-16.19-23 ; Ep 2, 4-10 ; Jn 3, 14-21.
Ne mets pas l'échec dans tes projets!, « Dieu est riche en miséricorde »
« Comment chanterions-nous un chant du Seigneur sur une terre étrangère ? » se lamentaient le peuple des déportés d’Israël dans le psaume 136.
Ce verset me fait penser à un chanteur togolais qui s’est donné le loisir de modifier un chant religieux exécuté pour l’offertoire. A la place de Dieu qui reçoit l’offrande des hommes, il met une femme et il fait du sexe la matière de l’offrande. Un véritable sacrilège ! J’ai souvenance aussi des années d’apogée du parti unique où pour assouvir le culte de la personnalité des monarques africains, des griots louangeurs n’ont pas hésité à tronquer des chants de louanges divines. Ils ont exécuté les chants du Seigneur à la gloire des hommes !
Le peuple d’Israël craint le Seigneuret il est donc sage en refusant de chanter des chants du Seigneur Dieu à ses bourreaux, à ses vainqueurs. Cependant il lui a fallu du temps et faire des expériences pour comprendre cela. Le second livre des chroniques rapporte en effet, que le peuple multipliait les infidélités et les sacrilèges. Aussi pour s’être détourné de Dieu, le peuple est livré aux Babyloniens qui le privent de ses repères identitaires : le temple (culte), la terre, la royauté. Déportés et loin de leur terre, le peuple comprend qu’il s’était fourvoyé comme pour donner raison à ce sage qui disait « c’est quand on perd son siège et que le moment vient de s’assoir, qu’on en connaît la valeur ».
L’infidélité, l’imitation du monde, la profanation directe comme indirecte, le mépris de la Parole de Dieu, la non considération des hommes de Dieu, voilà les maux reprochés aux peuples d’Israël. Certaines de ces actions mauvaises ont une place sur notre liste personnelle de maux. Chacun a ses manies, chacun connaît les actes peccamineux qui l’éloignent de Dieu et le livre à la merci des bourreaux des temps modernes ; tu as les tiens, j’ai les miens.
Peut-être nous avons passé ces trois semaines de carême à les combattre. Peut-être nous nous demandons si un jour nous pouvons nous en libérer. Ou encore il nous arrive des fois sinon toujours de croire que les événements malheureux qui adviennent dans notre vie sont des conséquences de ces péchés contre Dieu et les hommes. Mon chômage n’est-il pas lié à mes réussites négociées à coup de tricherie ? L’échec de mon foyer n’est-il pas dû à la licence sexuelle de ma jeunesse ? La stérilité de mon couple ne provient-elle pas des souffrances que j’infligeais aux petits enfants ou à cet avortement commis ?
A chacun ses questionnements qui trouvent aujourd’hui réponse. En effet la bonne nouvelle des textes de ce dimanche est véritablement bonne et consolante : « Dieu est riche en miséricorde » (St Paul dans la deuxième lecture). Mon frère, ma sœur cesse de te morfondre, arrête de te culpabiliser et pose désormais un regard neuf, un regard positif sur ta vie. Notre Dieu est le Dieu de miséricorde, il est le Dieu qui nous aime jusqu’à donner son Fils : « à cause du grand amour dont il nous aimés, nous qui étions morts par suite de nos fautes, il nous fait revivre avec le Christ ». Pourquoi alors gémir encore, pourquoi alors mettre l’échec dans nos projets, pourquoi alors ruminer nos fautes ?
Notre Dieu n’est pas dans une logique humaine de vengeance : le mal pour le mal ; il est le Dieu qui combat le mal par l’abondance de bien. Dieu ne nous juge pas ; sa volonté est un projet de salut et non de jugement. Pour notre salut, Dieu a élevé son Fils sur le bois du salut afin que tout homme qui croit obtienne par lui la vie éternelle. Pour avoir part au bonheur de Dieu, à la liberté des enfants de Dieu, il nous faut croire en lui, il nous faut accepter contempler le Christ, nous mettre à son école d’amour des pauvres et des faibles, il nous faut lever les yeux pour voir le Christ souffrant sur la croix et s’engager dans son armée pour soulager les misères humaines. C’est notre foi qui nous sauve, et cette foi passe par l’accomplissement d’œuvres bonnes : « Prouve-moi ta foi sans les œuvres et moi je tirerai de mes œuvres la preuve de ma foi… sans les œuvres, la foi est morte » (Jc 2, 18. 26).
Dieu nous aime tellement qu’il ne peut même pas nous contraindre au bien. Il est vrai que le Christ ne vient pas pour juger mais pour sauver. Cependant, le Christ ne sauvera que ceux qui se laisseront sauver. Puisse ces dernières semaines de carême nous donner l’occasion de choisir réellement le Christ et nous décider par nos œuvres à laisser le Christ nous sauver. Amen
Union de prières
Romain Séménou
17-03-2012